Chapitre 36

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Chapitre 36 ~ Aidez moi à espérer, Koro-senseï...

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Je pousse la porte de la boutique de fleurs, un sourire triste aux lèvres. Le vendeur se tourne vers moi en souriant.

Vendeur- Bonjour, je peux vous aider ?

Je lui rends son sourire en hochant la tête avant de m'avancer vers lui.

- Oui, je souhaiterais acheter des chrysanthèmes blanches.

Vendeur- Cela tombe bien, il me reste de quoi faire un bouquet ! Je vous le fais tout de suite.

- Merci !

Tandis qu'il part dans l'arrière boutique chercher de quoi attacher les fleurs ensembles, j'en profite pour faire le tour des plantes proposées.
J'aperçois un mignon petit bonsaï. Je regarde son prix et souris, il est tout à fait dans mon budget. Un peu à côté, j'aperçois quelques camélias. Je caresse leurs pétales du bout des doigts, me demandant si Itona l'aimerait bien...

Vendeur- Je vois que le bonsaï et le camélia vous ont tapé dans l'oeil.

- Oui... Je vais prendre un camélia et le bonsaï avec les chrysanthèmes.

Vendeur- Je vous les mets dans un sac ?

- Je veux bien, mais pas les chrysanthèmes, ce n'est pas nécessaire.

Il hoche la tête et s'occupe du reste de mes achats. Je paye et prends le sac où se trouve le bonsaï et le camélia d'une main, et porte le bouquet de chrysanthèmes avec mon autre bras.
Je sors de la boutique et rentre chez moi pour poser mon sac avant de filer au cimetière.

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Je pousse la grille rouillée du cimetière et me faufile entre les tombes, cherchant la rangée où se trouve la tombe des cendres des trois Tachibana qui ont partagé ma vie.

Je finis par y arriver et m'accroupis pour poser le bouquet sur la pierre en granit froide. Du bout des doigts, je caresse les noms gravés dans la pierre, ainsi que la phrase que j'ai choisie :

“ Les morts ne sont jamais loin, il suffit de fermer les yeux pour les revoir. „

Kanade Tachibana
1980 - 2017

Hitohito Tachibana
1978 - 2017

Angel Tachibana
2005 - 2017

Koro- Les morts ne sont jamais loin, il suffit de fermer les yeux pour les revoir. Jolie phrase... C'est toi qui l'as choisie ?

- Oui...

Je me relève en essuyant la terre sur mes genoux, puis recouvre mon nez avec l'écharpe que m'a offerte Itona. Koro-senseï pose un tentacule sur mon épaule et, ensemble, nous gardons une minute de silence. Je cligne rapidement mes yeux, sentant les larmes me piquer les yeux et le chagrin me nouer la gorge.

- Aidez moi à espérer, Koro-senseï... Aidez moi à croire que je peux être une bonne personne malgré tous les morts qui jalonnent mon chemin...

Koro- Blanche, tu es déjà une bonne personne. Les mauvaises personnes ne se sentiraient pas coupables de tous ces actes, elles n'éprouveraient pas de remords par rapport à ce qu'elles ont fait. Tu es une bonne personne qui se soucie des autres, quitte à donner ta vie...

Je le regarde, les larmes coulant le long de mes joues et trempant l'écharpe au passage. Un vent froid se met à souffler et quelques-unes de mes mèches de cheveux blancs se collent sur mes joues trempées, légèrement rosies par le froid. Les vêtements de Koro-senseï flottent légèrement avec le vent, tandis qu'il me regarde avec son éternel sourire.
C'est en voyant ça que je me suis demandée si son immense sourire n'était pas là pour cacher sa peur, la peur de mourir, la peur de ne pas être la hauteur, mais aussi sa culpabilité.

- Senseï, je peux vous poser une question ?

Koro- Je t'écoute.

- Avez-vous peur de ne pas nous avoir assez aidés ?

Koro-senseï penche la tête sur le côté et me frotte doucement les cheveux avec son tentacule.

Koro- Tu es très perspicace pour un si jeune âge.

- Je ne le dirais à personne. Ce sera notre petit secret.

Il ricane et je souris, avant de me mettre à rire avec lui. J'essuie mes larmes, qu'elles soient de rire ou de tristesse, puis fais un magnifique sourire à mon professeur.

- Koro-senseï, encore une chose.

Koro- Qu'est-ce qu'il y a ?

- Arigato.

Il me regarde sans rien dire, tandis que je le salue en m'inclinant pour montrer mon respect, puis je m'éloigne dans l'allée, me dirigeant vers le portail du cimetière.
Je ne vérifie pas s'il est parti ou non, car ce n'est pas utile.

La conversation que je viens d'avoir avec Koro-senseï vient en quelque sorte de m'apaiser, comme si je venais enfin de m'accepter et de m'aimer, que je venais d'accepter mon passé et que je me souhaitais bonne chance pour la suite. Et que j'allais l'écrire en commençant mon prologue par :

Il y eut, un jour, un poulpe professeur prêt à tout pour ses élèves.

Et il finirait par :

Ce poulpe professeur existe toujours si on ferme les yeux.

Avec un sourire, je rentre chez moi et saute dans les bras d'Itona qui me réceptionne en souriant, sûrement un peu étonné par mon comportement.

- Itona, j'ai envie de mettre des couleurs. Partout. Fini le blanc !

Itona- Toi, tu as eu quelque chose qui t'a profondément changée.

Je souris et lui fais un bisou sur la joue, avant d'aller chercher le sac du fleuriste que j'avais posé sur la table de la cuisine. En rougissant légèrement, je donne la fleur à mon bébé poulpe, puis pars mettre le bonsaï sur le meuble où se tient la télévision.

- Ah, j'ai failli oublié ! Joyeuse Saint-Valentin, Ito-kun !

De là où je suis, je le vois rougir et partir avec sa fleur. Je souris et ris doucement, avant d'aller préparer de quoi manger. En cuisinant la recette du curry de Kanade, je me souviens d'une phrase qu'elle me répétait constamment lorsque je pensais ne pas avoir ma place parmi eux :

Kanade- Oublie ton passé, qu'il soit simple ou composé, et profite du présent pour que ton futur soit plus-que-parfait.

Je souris en y repensant et remercie Itona d'avoir accroché les cadres qui prenaient la poussière dans mon placard.

Le bonheur, quelle sensation incroyable...

Blanche || AcOù les histoires vivent. Découvrez maintenant