𝓬𝓱𝓪𝓹𝓲𝓽𝓻𝓮 𝓿𝓲𝓷𝓰𝓽 𝓺𝓾𝓪𝓽𝓻𝓮

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Le soleil de l'après-midi est étouffant, sa chaleur produit sur le bitume un halo mouvant. Tévy marche d'un pas léger à mes côtés, ses cheveux brunâtre flottent dans son dos. Nous sommes à Berlin depuis moins d'une journée et nous voilà déjà séparées du groupe. Pourtant, cela me soulage plus qu'autre chose. Je me sens épuisée. Épuiser de surveiller constamment mes arrières, épuisée de faire semblant. Tévy qui me connaît bien s'est vite rendue compte que quelque chose ne va pas mais je m'interdit de lui révéler quoi que ce soit pour le moment. Je vois déjà l'air penaud sur son visage, elle se serrait empresser de le cacher d'un sourire qui se serrait voulu réconfortant.
Non. Parler c'est mourir, parler c'est passer pour une idiote.
Nous franchissons les portes de l'hôtel sans que j'y fasse vraiment attention, la pression de la main de Tévy sur mon épaule me fait sursauter.

- Nous y voilà, clame Tévy en embrassant le hall du regard. Le groupe doit être rentrés.
Je pose mes yeux sur la porte d'entrée, une furieuse envie de fuir me prend aux tripes.           
- Je suis fatiguée dis-je, je vais monter me reposer un peu.
Tévy affiche un air inquiet, je la rassure avec un sourire.
- Très bien, tu as le temps de toute manière, je ne pense pas qu'ils voudront sortir ce soir après une journée aussi épuisante. Si tu as faim fait le moi savoir et je nous commanderais un truc.
Je hoche la tête puis m'avance vers l'imposant escalier.
- Au fait Willow, rajoute Tévy avant que je ne m'échappe, j'ai retrouver ton ticket, je l'ai glissée sous ta porte.
Je suis étonnée, mon ticket, je ne me souviens pas le lui avoir donné.
Je salue Tévy de la main avant de m'engager vers l'étage.

Une foule de sentiments m'envahit et m'accable tandis que je monte silencieusement vers ma chambre. J'ai hâte de pouvoir me jeter dans mon lit et ne plus en sortir avant demain. Le couloir est plongé d'un une lumière sombre. De nombreux portraits sont accrochés au mur, ils semblent me dévisager grossièrement. Je ne connais aucun des personnages représentés, sûrement des marquis et des duchesses allemands. Je remarque qu'ils ont tous, sans exceptions, des mines maussades et tristes. Une femme possède un nez bossu et disgracieux. Un des hommes est coiffé d'une perruque blanche dont les anglaises lui tombe dans le cou. Juste avant la porte de ma chambre se trouve le portrait d'une jeune femme, vêtue d'une longue robe rose agrémenter de perles et de dentelles. Elle aussi porte une perruque, quoi que moins sophistiqué que celle du marquis aux anglaises.
Quand je pénètre dans la pièce, une odeur d'humidité me prend le nez. Quand j'allume la lumière, une drôle de sensation m'emplit, un vide.
Peut-être est-ce du au fait que je n'ai pas dormis seule depuis plusieurs nuit ?

Le ticket de Tévy est bien là, reposant sur le sol en lino pourpre. Je me demande ce qu'elle veut que je fasse avec un vulgaire ticket de métro. Je le prend et le dépose sans intérêt sur la commode. J'entre dans la salle de bain avec la conviction qu'une douche me ferra décompresser. Je m'adosse à la vitre de la douche, l'eau coule lourdement sur ma peau. J'ai toujours aimée les prendre brûlantes, des douches si chaudes que votre peau se retrouve rougie une fois dehors, si chaude que vous avez l'impression que vous jambes vont flanchées si le froid saisissant de la pièce se propage d'avantage sur la chair.

Des coups secs contre la porte de la chambre me font glisser, je tombe pratiquement sous la surprise. J'éteins l'eau et sors rapidement de la douche. J'enfile un peignoir trouvé sur le séchoir près de l'entrée. Je doute soudain d'avoir penser à récupérer mon portable dans le sac de Tévy, elle doit certainement me le rapporter.
La porte grince tandis qu'elle s'entrouvre, je n'ai pas le temps de parler qu'une masse humaine se précipite vers moi et m'enlace avec férocité. Je reste paralyser. Le temps se fige un instant. L'odeur qui m'enveloppe à le don de me rassurer. Je n'ai même pas la force de refermer la porte, le couloir s'étend à perte de vue devant moi. Je me mets à trembler, ce n'est pas le froid, pas la fatigue qui à mystérieusement disparu mais la joie ou plutôt, la terreur. Je referme mes bras sur le corps qui tressaute contre moi. Des larmes me brouillent la vue, un hoquet m'échappe tandis que je serre contre moi le corps de l'être qui me fais si peur. Une peur si dévorante, si ardente que je me retrouve à le désirer.

Tout naît des flammes...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant