ROXANE
En fait, j'aurais pas dû.
Emmitouflée dans ma couverture, je me bats pour me préserver de la fraîcheur environnante. Je regrette de ne pas avoir emporté un pull avec moi. Les lueurs de la piscine maintiennent mes yeux ouverts et ces fichues libellules prennent ma patience pour une teubée.J'observe la structure des box, au loin. Mon cerveau nage dans l'alcool, mais il faut que je sorte de ce pétrin, que je réfléchisse à une solution. La chaleur que dégage un cheval pourrait être d'un chouette réconfort et je suis convaincue qu'un tas de paille servirait d'un matelas douillet. Un rire nasillard s'évade de ma bouche. J'imagine pas la tête que ferait un cavalier s'il me découvrait en train de ronfler sur son fidèle destrier.
Alors, quoi d'autre ? Frapper à toutes les portes pour y trouver un canapé où je sombrerai enfin dans le sommeil ? Matt et Falae n'en disposent pas dans leur gîte, et Hailey est rentrée chez elle depuis un bon moment. Robin est mineur, ce serait inapproprié de finir dans ses draps. Quant à Terry, je préfère encore mourir. Il n'aurait aucun scrupule à me parler de ses platines — les femmes de sa vie — jusqu'au lever du soleil. Mon poing se crispe. J'en ai ras le bol de ces réflexions qui ne débouchent que sur une stupide migraine. Histoire de comprendre réellement ma douleur, j'hésite à tremper mon crâne dans l'eau.Tiens, qu'en penserait ma connasse de mère qui profite de son hôtel huppé à Lloret Del Mar ?
— Bonsoir. Vous êtes perdue ?
Les yeux exorbités, je me fige avant de sortir le nez de la couverture. Une silhouette masculine se dessine dans le noir et braque sa lampe-torche sur moi.
— Roxane ? tique Alessio. Mais qu'est-ce que tu fais là ?
— J'me promène. Ça s'voit pas ?
Il réalise que je suis frigorifiée et se met à frotter mes côtes pour m'apporter un peu de chaleur. Je glousse sous ses chatouilles.
— Pourquoi t'es ici ? réitère-t-il. Avec une couverture, en plus ? Pourquoi ? Y a eu un souci avec les filles ?
— Mollo avec les questions, s'teuplaît. J'ai pas toutes mes capacités intellectuelles.
Mes dents claquent. Je masse mes tempes du bout des doigts, puis explique :
— Problème de couchage. En gros, une pièce du clic-clac a pas survécu quand j'ai commencé à l'déplier. Ça l'a bloqué.
— Tu veux que j'aille regarder ? Je te garantis pas un miracle, mais peut-être qu'en bricolant...
— Laisse. Kiara et Himi dorment. Le bruit va les gêner.
La brise effleure ses cheveux devenus argentés grâce au clair de lune. Je retiens ma respiration. Une nouvelle bourrasque m'assaille.
— Tu peux pas rester là. Viens avec moi.
Alessio m'aide à me relever, mais mes jambes tanguent et percutent les siennes. Je rigole comme une bécasse, à deux doigts de m'écrouler sur le gazon.
— J'en connais une qui a apprécié le rosé offert en dégustation, rebondit-il en enroulant mon bras autour de sa nuque.
— Ouais...
Nous rejoignons un sentier en gravier. Mon meilleur ami assure la stabilité de mes pas d'une main sur ma hanche pendant que nous avançons vers les écuries, où un lampadaire s'allume. Au bout d'une impasse, il y a une maisonnette. Sa façade est faite de mosaïque bleue. Alessio ralentit pour me faire entrer.
— Stylée, ta baraque, glapis-je.
Il saisit mon bras à toute vitesse en me voyant glisser contre un mur et me tire en hauteur pour que je reste sur mes jambes.
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Last Wounds
Lãng mạnUn regard aussi sinistre qu'une plage de sable noir. C'est ce à quoi Roxane Wilheim a pensé quand elle l'a vu pour la première fois. Photographe irlandais, Loric Ardery a tout d'intrigant. L'autorité qui coule dans ses veines ne semble pas là par h...