CHAPITRE 35

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ALESSIO

Avoir un chiot me permet de penser à autre chose qu'à Roxane et à ses nouvelles occupations. En revanche, je n'imaginais pas une seule seconde qu'un bouledogue puisse se montrer aussi destructeur.

Ce soir, il m'a réservé une jolie surprise : le sol du salon est jonché de lambeaux de papiers essuie-tout. Il y en a partout, éparpillés comme les fragments de mon esprit torturé. Papa n'est pas encore rentré. Dieu soit loué.

— Au moins, t'as fait l'effort de les rapprocher de la poubelle ! ironisé-je.

Certaines feuilles ont été mâchées. Le rouleau à moitié déchiqueté a été déposé près de la cuisine, là où Mambo est assis. Je soupire. Il est craquant avec sa bouille imperturbable et sa petite patte plâtrée. Il en joue. Il n'a aucun mal à m'amadouer avec ses yeux globuleux. Je lâche mon sac de cours et avance dans la pièce en évitant de piétiner son œuvre.

— Tout ça, ce sont des bêtises, mon grand. Si tu ne veux pas que je devienne fou, il va falloir que tu arrêtes.

Mon chien m'examine.

— Pourquoi tu me fixes ? Tu penses que je le suis déjà, pas vrai ? Peut-être. J'ai besoin d'une psy, après tout. Ne complique pas les choses.

T'es en train de parler à un putain d'animal.

— T'as gagné, je la boucle.

Je prends un bon quart d'heure pour nettoyer ses dégâts. Lorsque j'ai fini le ménage, je l'attache à son harnais et l'emmène en promenade du côté des champs de vignes. Je reste inquiet malgré sa forme de champion olympique et je saisis mon téléphone pour me rendre sur le contact de Roxane. J'appréhende une conversation avec elle, mais je me force à l'appeler après plusieurs secondes de remise en question. Elle décroche immédiatement. Mon souffle se suspend.

— Attends, je te mets en haut-parleur, commence-t-elle.

Sa voix est douce, posée. Elle ne m'en veut pas.

— Excuse-moi, je ne vais pas te déranger longtemps. J'ai fini les cours et j'ai découvert un rouleau d'essuie-tout défoncé par Mambo. C'est dangereux ?

— Défoncé ? souligne-t-elle. Tu veux dire qu'il en a mangé ?

— Je pense que oui.

— Il va comment, là ?

— Bien. Il ne montre pas de signes inquiétants, dis-je, les yeux rivés sur lui.

— Surveille que son ventre ne gonfle pas. Si tu as un doute sur son comportement, tu peux joindre Lara sur le numéro des urgences vétos.

Un son d'objet qui se casse traverse mon portable. Ma meilleure amie pousse un petit cri avant de râler.

— C'était quoi ? Rien de grave ?

— Ma palette de fards à paupières. Merde, elle est foutue !

J'ose un léger rire, puis je me rappelle que nous sommes le soir et qu'elle n'a aucune raison de se faire belle. J'écarte mon appareil de l'oreille. L'écran s'allume. 18:46.

— Tu te maquilles ?

Une ombre glacée traverse mes neurones. Un mauvais pressentiment.

— Tu sors ? renchéris-je d'une voix cassante, réalisant qu'elle ne me répond pas.

— Euh... ouais.

— Avec qui ?

— Loric et des clients à lui, rétorque-t-elle, plus incisive.

Last WoundsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant