Chapitre 6

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Cela fait bien trois quart d'heure que je surveille la maison, allongé et invisible. Je devine du mouvement dans la maison à travers le rideau, celui-ci a bougé légèrement mais pas suffisamment pour me permettre une identification formelle. J'ai l'œil rivé sur la lunette de visée. La clé, pour un bon sniper, c'est la patience. Si je me précipite, je risque de tuer un innocent, ou de rater une information capitale, ou de tomber dans le piège qui m'a été tendu par le flic que j'ai payé. J'ai bien trouvé des empreintes de pas un peu plus loin, des allées et venues, mais elles ne sont pas d'hier. J'attends encore. Plus l'attente sera longue plus ceux dans la maison finiront par être nerveux, agacés et s'en aller. Je souris en regardant le soleil descendre à l'horizon. S'ils allument les lumières j'aurais une meilleure idée de combien ils sont là-dedans. Me plaçant sur le côté, j'urine en essayant de ne pas m'en mettre dessus, et je recouvre le tout de sable. Si c'est ce que je crois dans cette maison, mon odeur pourrait les alerter, mais je sors un petit flacon d'une de mes poches et en vaporise un peu sur mon tas, masquant mon odeur sous celle artificielle de poubelles, en mettant un jet sur moi aussi. Quand les lumières s'allument, je me lève et fonce. Un homme traqué prendrait plus de précautions. Je descend rapidement et furtivement vers la maison, fusil à l'épaule jusqu'à me placer dos au mur, de le faire passer dans mon dos et d'empoigner un glock. D'un coup d'œil à la fenêtre, je vois des hommes jouer aux cartes, armes contre le mur, mon flic sort d'une pièce en remontant sa braguette, toilette ou baise, je m'en fous. Si je les élimine, la description de mon Bronco sera donnée à la frontière, j'aurais du mal à repasser de l'autre côté sans devoir l'abandonner... sauf s'il n'a pas informé ses supérieurs et qu'il rançonne des gens de son côté. C'est la chance que je prends.

Faisant le tour de la maison, je range mon glock et reprend mon fusil, réducteur de son vissé au canon et à un, je donne un coup de pied dans la porte, faisant mon entrée. J'aime ce moment, j'ai l'impression que le temps s'arrête à chaque fois. J'aimerai voir, à travers les yeux surpris de ceux qui me font face à ce moment-là, le canon du fusil pointé sur eux. Comment me voient-ils ? Comme un ange de la mort ? El Chupacabra ? Entendent-ils de la musique comme la 5e de Beethoven ? Ou une marche funèbre ? En même temps, cette pensée ne doit durer qu'une fraction de seconde car je tire immédiatement, apportant la mort sur mon passage, avant de finir en tirant dans l'épaule droite du flic, l'empêchant de sortir son arme.

« Alors, Señor, vous avez quelque chose à me dire ?

— Pitié, ne me tuez pas.

— Tu as mon argent ?

— Dans ma poche.

— Sors-le, avec deux doigts. »

Je le regarde récupérer l'enveloppe et me la lancer, tremblant de peur.

« Tu as des informations à me donner ou pas ?

— Il est parti il y a deux jours. Je ne sais pas où.

— Adiós, hombre ».

Je tire une dernière balle avant de fouiller rapidement la maison, mais il n'y a rien, absolument rien. Je vide la bouteille de Tequila qui trône sur la table sur les corps des victimes et, passant la porte, je jette le briquet récupéré sur la table au milieu des mégots avant de disparaître dans les collines, retournant à ma voiture. Ces gars devaient avoir des familles, forcément. Ce soir des enfants ne reverront pas leurs pères, des femmes attendront, inquiètent, le retour de leurs maris. Je peux comprendre qu'ici c'est quasiment un travail normal et régulier les enlèvements contre rançons, malheureusement, c'est un métier à risque quand on tombe sur quelqu'un comme moi. Je ne suis pas de la race de celui que je traque, je n'en demeure pas moins un Alpha.

Une fois la frontière franchie, je m'arrête au bord de la route pour réfléchir à mes options. Je n'ai aucune piste pour le moment, je vais devoir augmenter la prime pour forcer les bavards à me contacter. Je dois aussi amasser un peu d'argent. L'argent, je sais où en trouver, je connais un petit business illégal dans une petite ville un peu plus haut. Ils doivent être nerveux avec la disparition de l'un des leurs, ils auront la gâchette facile. Quant à obtenir des informations, je connais une louve qui pourrait me renseigner, si je mets la main dessus. Pour la louve, je vais devoir m'installer près de l'endroit où je l'avais trouvée. Pour m'installer dans le coin, je vais devoir exproprier ceux qui y sont. J'aurais de l'électricité, un petit réfrigérateur, de l'ombre. J'ai déjà été bien moins lotis dans des coins non répertoriés ou caviardés dans mon dossier militaire. Je pourrais même récupérer leurs motos, ce qui me facilitera les recherches ou pour poursuivre Hailey, ma belle petite louve.

Mon AlphaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant