Mon Alpha

Chapitre 44

« Qu'est-ce que je vous ai fait ? » demandais-je en rentrant à la maison. Tous étaient là, à m'attendre, impatients de savoir ce qu'il s'est passé.

« Chacun fait sa part, Frank, c'est le but de notre Communauté » me rappelle Sophia.

« Essayes-tu de me dire que je ne fais pas ma part, depuis le premier jour ? Laisse-moi réfléchir. J'ai résolu votre problème de nourriture, j'ai mis un terme au braconnage, j'ai dégagé le Shérif, j'ai débarrassé le Collège d'emmerdeurs, je vais apporter du sang neuf. J'estime avoir fait ma part.

— C'est vrai que tu as fais beaucoup, énormément, tu as même changé des vies, mais nous avons besoin de toi, protecteur, et être Shérif est la meilleure façon de nous protéger.

— Et vous ne pouviez pas m'en parler au lieu de faire cela dans mon dos ?

— Aurais-tu seulement accepté d'en discuter ? » demande Sophia en me souriant.

« Oui.

— Menteur.

— J'en aurais discuté pendant trois ou quatre secondes. Maintenant je me retrouve coincé dans un travail qui ne m'intéresse pas.

— Qu'as-tu envie de faire dans la vie ?

— M'occuper des animaux me suffit.

— Menteur » rigole Sophia.

« Je me retrouve dans un poste de police tout seul, sans employé, sans adjoint. Je vais devoir recruter du monde. »

Alex lève la main, comme à l'école. Je le savais, je n'attendais que ça.

« Tu sais te servir d'un ordinateur ?

— Je regarde des vidéos en streaming, je sais me servir de Google.

— C'est parfait, c'est exactement ce qu'il me faut ! » éclatais-je de rire.

« J'ai un diplôme du secondaire en administration qui ne me sert à rien.

— Si tu viens travailler avec moi, nous devrons avoir une relation professionnelle, pas de sexe dans mon bureau, dans la voiture, dans une cellule ou en patrouille.

— Nous pouvons être amis ?

— Bien sûr.

— Je veux travailler avec toi.

— Le reste de l'équipe devra être composé d'humains, que les habitants ne s'imaginent pas que nous prenons le pouvoir. Que ce soit clair, je ne fais pas sauter les contraventions, pas de favoritisme, nous sommes d'accord ? » demandais-je en regardant tout le monde d'un air faussement sévère.

« Absolument.

— Bon, je vais me coucher, je suis en formation avec la police d'État dès demain. Toi aussi, Alex. »

Les premiers jours étaient intenses, tant pour moi que pour Alex, mais les collègues policiers étaient patients. Alex apprenait à se servir des logiciels, puis suivit un cours accéléré sur des textes de lois à l'aide d'une FAQ qu'elle mémorisa par cœur.

L'avantage d'avoir un loup-garou au bureau, c'est que sous ses airs de jolie adjointe, elle pouvait soulever un lutteur sumo d'une main et le conduire en cellule tout en ouvrant elle-même la porte. Elle courrait plus vite que n'importe quel fuyard qui tenterait de lui échapper, elle avait la vue, l'ouïe et l'odorat plus développé que n'importe qui. Elle ne se laissait pas intimider et devint rapidement la coqueluche des femmes de la ville, tout comme Jesse. Ma femme régla rapidement le problème des invitations à des rencontres. Elle était végétarienne, souffrait d'une intolérance au lactose, au gluten et ne mangeait pas de dessert. Cela réglait une partie du problème. Pas l'autre, elle plaisait. Elle était gentille, belle, spirituelle, d'une conservation agréable. Le Maire avait organisé une campagne de publicité jouant sur notre couple, effaçant les frasques de mon prédécesseur. Je me demande ce que diront ces braves femmes si notre enfant n'est pas humain et cherche à les bouffer.

Je lui serre la main, je suis probablement plus stressé qu'elle, alors que je regarde Lucy lui appliquer du gel à ultrasons sur le ventre. J'ai peur de faire des cauchemars pendant quelques nuits, quelques mois. Je la regarde poser la sonde et à la seconde où j'entends les battements de son cœur, je me tourne vers le moniteur.

« Beau travail, Jessee. »

Et moi ?

« Est-ce que... » Je me penche pour mieux voir l'écran, cherchant à démêler ce que je suis en train d'observer, mais je ne suis pas sûr. « c'est... je ne vois pas de queue ni de museau.

— Non Frank. »

Je ne suis pas rassuré pour autant, cela ne fait qu'éliminer un bébé boule de poils.

« Lucy ? » demandais-je. Elle sait très bien ce qui m'angoisse, je la laisse étudier l'image, elle sait ce qu'elle fait.

« C'est une petite fille... humaine » dit-elle en me souriant. « Félicitation à vous deux ». Elle imprime une image et me la tend. Je me sens tout puissant à cette seconde, c'est moi qui ait fait ça !

« C'est son cœur que l'on entend ? Il bat vite, non ? » m'inquiétais-je.

« C'est normal, Frank, chez les humains aussi il bat un peu plus vite, mais là tu es en présence d'un bébé avec des gènes de loup-garou. Ne t'inquiète pas, elle est en bonne santé.

— Une petite fille, c'est génial ! » dis-je les larmes aux yeux avant d'embrasser Jessee, Lucy essuyant le ventre de Jessee. « Nous allons pouvoir décorer sa chambre. Il faut trouver un prénom, quel est celui de ta maman ?

— Sinon celui de ta sœur ? Jane c'est joli » réplique Jessee.

« Sinon un mix des deux » propose Lucy « Sara-Jane, c'est joli, non ? »

Oui, c'est joli, très joli même.

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