Dire que je suis un peu énervé est très loin de la vérité. Elle a de la chance d'être peut-être la seule mécanicienne en ville, si je lui pète les bras, je ne partirai pas d'ici à moins de louer une voiture, et je ne me souviens pas avoir vu d'agence de location. Je commence à avoir une désagréable impression, celle d'être entrée dans une ville d'où je ne repartirais pas, comme dans un épisode d'une vieille série télévisée, chaque route reconduisait en ville.
Je n'ai qu'une parole, aussi, je fais le plein et je lave la voiture avant de rentrer au motel, retournant rendre les clés à l'accueil, la mère de Jenny me souriant, me demandant comment j'ai trouvé la ville.
Géniale.
Elle semble satisfaite de ma réponse et me souhaite un agréable séjour. Je ne perçois pas si c'est ironique ou pas. Retourné dans ma chambre, je constate que le ménage a été fait, ça sent bon. Mon sac n'a pas été ouvert, la sécurité que j'ai déposé sur la fermeture éclair est toujours en place. Je sors ma lampe UV, le couvre-lit est toujours aussi sale, mais les draps sont impeccables. Sortant mon couteau multifonctions de ma poche, je dévisse le panneau dans la salle de bain et en récupère mon sac. Là-aussi, tout est en ordre. N'ayant rien d'autre à faire qu'attendre, je récupère mon chargeur et vais m'installer dans le restaurant, me plaçant de façon à voir qui est sur le parking. Il est trop tôt pour manger, ayant grignoté une bricole au bord de la rivière, mais pour justifier le fait que je vais squatter une banquette pendant quelques heures, je prends une part de tarte aux pacanes avec un café. Je branche mon téléphone à une prise contre le mur, surfant sur internet, des sites que je parcours quotidiennement pour le travail, pour mes loisirs.
« Désolé pour le retard pour votre voiture » m'interpelle une voix, me sortant de ma bulle.
« Ce n'est pas de ta faute, Jenny. Merci de m'avoir prêté la tienne.
— Ce n'est rien, je vous assure.
— Tiens » dis-je en sortant un billet que je place dans sa main. « Vraiment, j'apprécie. »
Je la vois regarder sa main puis plier le poing, l'approchant de moi.
« Je ne peux pas accepter, c'est trop.
— Disons que c'est les pourboires que je vais te devoir pour rester ici ce soir.
— Prenez la voiture pour sortir ce soir. Allez faire un tour au Pecos, il y a un groupe de musique live le soir.
— Je vais rester ici et attendre la dépanneuse.
— Oh, Billy ne viendra pas, il va aller au Pecos pour boire par contre.
— Et la femme que j'ai vu au garage ?
— Kariann ? Oubliez ça. Elle réparera votre voiture demain, c'est sûr, mais pas ce soir. Si vous cherchez de la compagnie, il y a un motel avec des emplacements pour des RV près de la sortie de la ville, prenez la voiture mais garez-vous dans un coin où l'on ne verra pas ma voiture, j'ai... une réputation à maintenir.
— Merci de chercher à m'occuper, Jenny. Je vais rester ici, prendre un repas, un bon dessert, ce sera très bien.
— Je n'insiste pas. Je serais votre serveuse ce soir », dit-elle en me souriant avec un clin d'œil.
L'après-midi passe vite, le soleil se couche, le restaurant se remplit, se vide. Je regarde les gens qui passent, dans leur petites vies. Ça parle, ça rit, ça crie. J'observe Jenny qui mène le ballet. C'est son territoire, elle est la maîtresse des lieux. Une femme entre et l'enlace. J'ai l'impression que tous ont baissé d'un ton lorsque la femme est entrée avant de reprendre. Je regarde Jenny lui parler puis de pointer un doigt dans ma direction. La femme vient me rejoindre et s'installe sur la banquette sans y être invité, me regardant sans un mot. Je reconnais alors la mécanicienne, lavée, changée et coiffée.

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Mon Alpha
ParanormalJessee et sa soeur Hayley se sont éloignées de leur meute, voulant vivre en fuyant leur passé. Que se passera-t-il lorsqu'elles croiseront la route d'un chasseur qui est sur la piste du loup-garou ayant tué sa soeur ? Celui-ci guette sa cible, tapis...