La Reine des Glaces

Chapitre 28 : Le torrent

     Par où commencer ? Je ne peux pas lui dire que j'ai été énervée par dame pipi, juste parce qu'elles discutaient ensemble... Je suis une horrible amie d'être agacée par une autre amitié qu'elle pourrait nouer. Je ne suis pas possessive. Ou du moins, je n'en ai pas l'impression. Pas avant ce soir.

– J'aime pas trop Amy c'est tout, minimisais-je.

– Et c'est une raison pour me faire la gueule ça ? s'énerve-t-elle un peu en jetant ses chaussures sur le palier.

– Comme elle te monopolisait, je n'ai pas eu trop le choix que de t'éviter pour ne pas avoir à lui parler, dis-je en regardant par la fenêtre.

– Admettons que je te crois... Comment ça se fait que tu m'ais évité au début de la soirée, alors que j'étais aux toilettes ? Tu ne connaissais même pas Amy à ce moment-là ! ajoute-t-elle.

– On en a déjà parlé, j'ai croisé ton frère alors que j'avais deux verres à la main. Tu ne revenais pas, alors je lui ai donné et on est allé danser, dis-je en me raccrochant aux branches.

– Oh bah tiens, en parlant de mon idiot de frère, tu t'es bien amusée avec lui ? Danser en se tenant les mains, boire des verres ensemble... Tu m'avais dit qu'il ne se passerait rien avec lui, me lance-t-elle visiblement blessée.

– On a déjà eu cette conversation Soraya, soufflais-je. Je ne suis pas intéressée par ton frère. Comme j'étais un peu énervée, il a essayé de me faire danser et rire. C'était très gentil de sa part. Et je ne pense pas qu'il m'envisage de cette manière. Il a même pris le Instagram de Marie.

– En es-tu bien sûre, qu'il ne t'envisage pas de cette manière ? dit-elle en croisant les bras, les yeux dans les miens.

– Je ne sais pas, avouais-je. Mais ce n'est pas mon problème. Je ne suis pas intéressée, point.

– Hum... Et pourquoi tu étais énervée ? renchérie-t-elle.

     Je n'ouvre pas ma bouche pour répondre. A quoi bon ? Je vais lui dire que je n'ai pas apprécié de la voir rire avec dame pipi ? Et que je n'ai pas apprécié de la voir lui faire du rentre dedans ? Elle va me prendre pour une foutue homophobe. Alors que je m'en fous qu'elle soit homosexuelle, ce n'est pas mon problème.

– Tu sais quoi, j'abandonne, lâche-t-elle soudain. Tu fais bien ce que tu veux, je vais dormir, achève-t-elle en se déshabillant.

     Les larmes me montent, j'ai tellement envie de lui dire ce que je ressens. Dès que quelque chose de nouveau se passe dans ma vie, ou que je viens de faire quelque chose, Soraya est la première personne à qui j'ai envie de le dire. La personne à qui je veux me confier...

     J'entre en trombe dans sa chambre, bien décidée à vider mon sac. C'est peut-être égoïste, mais j'ai besoin de tout sortir. Et puis j'ai pas mal bu ce soir. Si cela se passe mal, je pourrais faire croire que l'alcool a altéré mes paroles.

– J'ai pas aimé qu'elle te tourne autour. Elle n'avait aucune subtilité... Et merde elle n'est même pas intéressante. J'm'en fous qu'elle soit lesbienne, mais tu mérites mieux qu'elle en fait ! T'as pas besoin d'une dame pipi dans ta vie ! m'empressais-je de déballer.

– Mais de qui tu parles Anna ? dit-elle en s'arrêtant de ranger ses affaires, toujours en sous-vêtements.

– Dame pipi, fin Amy... dis-je en baissant les yeux.