La Reine des Glaces

Chapitre 29 : Tous les autres sauf moi

– Allez Anna, me sollicite-t-elle en postant ma chaise de bureau en face de moi. Je ne t'ai jamais vu dans cet état-là, elle s'assoit. Tout comme je n'ai jamais vu Laura et Alejandro dans cet état d'inquiétude non plus...

     Je me redresse sur mon lit et me positionne face à elle. Je respire des grandes bouffées en fermant les yeux pour essayer de me calmer. Pour le moment je suis en incapacité de parler, trop de sanglots étouffent mes mots. Une fois mon visage asséché et ma respiration plus régulière, je rouvre les yeux.

     Ma tante attend bien sagement que je lui parle. Elle est assise, les bras posés sur ses cuisses. Elle me regarde attentivement, mais ses yeux ne reflètent ni inquiétude, ni pitié. Contrairement à ceux de mes parents. Je commence d'une voix posée :

– Je me suis fâchée avec ma meilleure amie, tu sais Soraya, demandais-je en lui jetant un rapide coup d'œil pour m'assurer de sa compréhension. En gros, hier nous sommes allées fêter le nouvel an dans un bar. Et elle a commencé à me faire un peu la tête car j'ai dansé avec son frère. Enfin... Ce n'est pas vraiment ça l'ordre. C'est d'abord parce que je lui faisais un peu la tête, précisais-je un peu pour moi-même. Mais ce n'est pas vraiment ce qui est important...

– Alors qu'est ce qui est si important, que tu n'arrives pas à me dire ? demande gentiment ma tante. Tu sais que peu importe tes actes, je ne te jugerais jamais. Même si tu considères que tu as fait quelque chose de pas très moral, ça arrive les erreurs, surtout à ton âge.

– Non, mais... Attends, tu crois que j'ai fait quoi exactement ? m'énervais-je presque.

– Bah, j'imagine bien qu'il y a dû avoir un baiser échangé entre son frère et toi non ? Si ce n'est plus. L'alcool joue beaucoup dans ces moments-là, affirme-t-elle comme si elle l'avait déjà vécu.

– Mais non ! Tu me prends pour qui ? Je savais que Soraya n'aimait pas quand Sofyan me tournait autour. Je lui avais assuré que je ne sortirais jamais avec son frère. Déjà parce que c'est son frère, et surtout parce qu'il ne me plait pas ! débitais-je agacée.

– Ok ok, excuses moi ma belle... Mais comprends-moi, tu me sors une histoire un peu décousue et tu tournes autour du pot... Ce n'est pas facile de comprendre ce qui te met dans cet état, dit-elle en prenant des précautions.

– Tu as raison, admis-je en prenant une grande inspiration. Soraya a fini par me dire qu'elle m'aimait.

– Oh, bon là pour le coup il me manque des détails Anna.

– En gros, dans la soirée, j'ai vu Soraya se faire draguer par une fille, pas du tout à sa hauteur d'ailleurs. Ça m'a un peu énervé qu'elle m'ait lâchée pour elle, alors que j'étais partie nous chercher des verres. C'est à ce moment-là que j'ai croisé son frère, je lui ai donné un verre et on a été danser. Quand elle nous a vu, elle m'a reproché de l'avoir laissé tomber pour aller avec son frère, la poêle qui se fout du chaudron ! Quand nous sommes rentrées, elle m'a demandé pourquoi je lui ai fait la gueule. On a fini par s'engueuler à moitié. Je lui ai dit que la fille qui l'avait draguée m'a agacée, et elle a dû mal me comprendre car elle m'a embrassé, dis-je dans un souffle en ayant toujours la sensation sur mes lèvres.

– Et qu'est-ce que tu as répondu ? demande-t-elle précipitamment, peinant à cacher son excitation.

– Je, je... Rien. J'étais sous le choc. J'ai appris que ma meilleure amie est lesbienne, car elle me l'a dit. Et qu'elle était amoureuse de moi. C'était dur à assimiler, je... les larmes montent. Je suis partie en disant que je suis désolée et que pour moi c'était simplement mon amie.