Clarke

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J'enfourne un gros morceau de pain. Ça m'évite de parler et ça me donne un peu de temps pour réfléchir. Il semble que je vienne de réussir une épreuve.

Il a fait exprès de nous interpeller tout à l'heure dans l'aérojet. Bien sûr, Michael est le plus jeune Officiels que j'aie jamais rencontrés mais il n'a pas été choisi pour nous escorter par hasard. Il n'aurait jamais commis ce genre d'erreur. Maintenant une question se pose : était-ce une épreuve ordonnée par ses supérieurs ou une aide de sa part?

Il pose une assiette de biscuits sur la table. On dirait ceux que ma mère avait préparés pour fêter mon diplôme et au lieu de me faire envie, ils me serrent le cœur. Les autres se servent, ravis de cette friandise inattendue ; moi, je repousse ma chaise et demande si je peux aller marcher un peu.

-Je reste dans les environs, promis. Je veux juste me dégourdir un peu les jambes  avant de remonter dans l'aérojet.

-Pas de soucis, accepte Michael en jetant un coup d'œil à sa montre. Tu as 30 minutes devant toi. Quelqu'un veut l'accompagner?

Personne ne bouge. Je me décide quand même à prendre un cookie et je sors. Le soleil est haut dans le ciel. La chaleur est merveilleusement agréable. Ce qui l'est plus encore, c'est la sensation d'être libre. Sans caméra ni personne pour m'espionner et me juger, je n'ai plus peur de me tromper ou de dire une bêtise. Sachant ce qui m'attend, je m'applique à profiter au mieux de ces derniers moments d'insouciance. Dans les semaines qui viennent, je puiserai le calme et la sérénité nécessaire dans le souvenir de cette journée. Je me dirige vers un bosquet. L'herbe m'arrive presque aux hanches. Je grignote mon biscuit quand une voix m'interpelle :

-Lexa! Attends-moi!

Je me retourne, la main en visière sur le front. Je suis déjà à près de 100 mètres de la cabane et Clarke court pour me rejoindre. À l'idée de partager mes derniers instants de tranquillité, j'ai envie de lui hurler de s'en aller. Mais si elle retourne près des autres, elle sera sous l'œil des caméras, alors je me retiens.

-On va où? me demande-t-elle en haletant.

-Jusqu'aux arbres là-bas.

Nous marchons en silence avant de nous asseoir à l'ombre, sur le sol frais.

-Tu devrais faire attention ou Niylah va être jalouse!

Je la taquine mais une certaine vérité se cache derrière ma plaisanterie. Chaque fois que Niylah rejette sa crinière blonde en arrière, ou qu'elle bat des cils, c'est à l'intention de Clarke. Elle ne semble pas y prêter grande attention et je ne suis pas sûr de ce que je ressentirais si je me rendais compte qu'elle est intéressé.

-Je ne m'inquiète pas pour elle, rétorque-t-elle, mais pour toi.

Sa main effleure mon bras et je ne peux retenir un frisson.

-Pourquoi?

-Je te connais, Lexa, je sais que quelque chose te tracasse.

Je hausse les épaules.

-On vient de quitter nos familles et nos amis. On ne les reverra peut-être plus jamais.

-Je sais comment tu es quand tu te fais du souci pour ta famille, je sais aussi reconnaître quand tu stresses pour un examen. Mais là, c'est différent.

Elle pose sa main sur la mienne.

-Je sais que nous ne nous fréquentions pas beaucoup à l'école, mais tu peux me faire confiance, murmure-t-elle.

Mais c'est justement de ça que je ne suis pas sûre. J'évite son regard en tournant la tête vers l'aérojet et la cabane. Je connais Clarke depuis toujours. Nous avons travaillé sur des projets ensemble, nous avons partagé des jeux et nous avons même dansé dans les bras l'un de l'autre pendant une heure mémorable lors de la fête des diplômes de l'an dernier. En revanche cette année, nous ne nous sommes presque pas adressé la parole. Par ma faute uniquement. Clarke m'a plus d'une fois proposé de me raccompagner mais j'ai toujours trouvé une raison de refuser. Les moqueries de mes frères après la fameuse soirée, les regards noirs des autres garçons et filles, mes doutes sur la signification de ce moment, tout cela m'a fait peur. Aujourd'hui, j'ai le choix entre reculer encore ou faire un pas vers elle. Techniquement, Clarke est mon adversaire au Test et pour cette raison, je ferais mieux de la repousser.

Les autres sortent à leur tour de la cabane. Bientôt, nous serons de nouveau sous l'œil de la caméra. Je sais que c'est ma dernière chance de parler sans risquer d'être entendue. Mon père m'a recommandé de ne faire confiance à personne mais l'air grave de Clarke finit de me convaincre. Si je commets une erreur, j'en supporterai les conséquences.

-Il y a une caméra dans l'aérojet et j'en ai vu 2 là où nous avons déjeuné.

-Tu es sûre?

J'acquiesce.

Une mèche de cheveux lui tombe sur le front.

-Je ne comprends pas. Pourquoi prendraient-ils la peine de nous surveiller?

Je hoche la tête.

-Parce que le Test a déjà commencé.

L'Élite tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant