Vénéneuses ou pas ?

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Le lendemain matin, je me lave à l'eau froide avant d'aller au réfectoire. Je suis la dernière à arriver à notre table. Tout le monde semble en forme, particulièrement Bellamy qui flirte avec Beatrice et parvient à la faire rougir. J'espère que ce n'est pas seulement sa manière de surmonter l'absence de son ami.

Puis on nous demande de nous présenter à l'amphithéâtre. Nous sommes maintenant 97. Le docteur Barnes sourit derrière sa barbe grise et nous répète que lors des examens qui vont avoir lieu maintenant, les mauvaises réponses seront pénalisées.

Nous sommes appelés par groupe de six. À ma grande surprise, Monty et Bellamy sont avec moi. Dans cette nouvelle salle d'examen, les tables sont plus hautes et portent nos symboles respectifs. Nous prenons place sur des tabourets pivotants. Je suis à la deuxième rangée au milieu, Monty est devant moi à droite et Bellamy juste sur ma gauche. Il m'adresse un clin d'œil. Devant nous se trouve une grande boîte en bois.

Une femme aux cheveux gris nous demande de lever la main quand nous aurons terminé. La boîte nous sera alors enlevée et une autre nous sera apportée. Le but est de faire le plus d'exercices possible. Il n'y aura pas de pause à l'heure du déjeuner. Puis elle répète les recommandations du docteur Barnes concernant les réponses erronées.

Nous devons avant tout réussir à ouvrir la boîte et ensuite suivre les instructions que nous trouverons à l'intérieur.

Ça me semble facile, ce qui me rend nerveuse. J'étudie ma boîte sous toutes les coutures pendant que d'autres candidats tapotent la leurs ou la secouent. Magnifiquement décorée, elle est d'un bois sombre et lisse. Mais je ne suis pas là pour l'admirer. Ma mère a une boîte similaire à la maison que son père avait fabriquée pour elle. C'est un genre de casse-tête et pour l'ouvrir, il faut faire glisser les morceaux de bois dans un certain ordre. Là aussi, il doit y avoir un truc.

J'examine la boîte de près et découvre, sur une des faces, un minuscule bouton dissimulé dans un des entrelacs du décor peint. J'appuie dessus et j'entends un cliquetis. Le couvercle est débloqué. Je sors la feuille qui se trouve à l'intérieur.

Déterminez quelles plantes de la boîte sont comestibles ou non.



L'avertissement est répété :

Si vous n'êtes pas sûr de la réponse, mettez la plante de côté.

Je souris. Cette épreuve a été faite pour moi.

La boîte contient huit plantes dont six que je reconnais immédiatement. Les ombrelles blanches sont de la ciguë. D'après mon père, elles étaient déjà mortelle avant la grande pollution. La rhubarbe, aux feuilles vertes veinées de rouge est également dangereuse. La branche aux feuilles ovales brunes doit être du hêtre. Je reconnais aussi du sassafras, de l'oignon sauvage et de l'ortie.

Je renifle l'avant-dernier échantillon, une feuille aux contours dentelés qui dégage un léger parfum floral. Je passe mon doigt dessus, elle est lisse et me fait penser à une plante sauvage que mon père m'a montrée quelques années plus tôt. C'était du poison mais il en adorait l'odeur. Serait-ce la même ? Je suis presque sûre qu'elles sont au moins de la même famille. Je la pose dans la pile des vénéneuse. La dernière plante est une racine bulbeuse ornée de feuilles qui ressemblent à des fleurs. J'en gratte la surface et je la porte à mon nez. L'odeur est sucrée mais pas comme une carotte ou une betterave. Ça me rappelle quelque chose. Mon père m'a un jour parlé de variétés de racines qui poussaient dans le Sud. L'une d'entre elles s'appelait la chicorée et Lincoln voulait en étudier un exemplaire. Il pensait que ça pourrait l'aider à améliorer sa pomme de terre. Je décide de la poser dans le tas des comestibles.

Les autres candidats m'observent à la dérobée pendant que l'officielle vérifie mon travail. Elle veut savoir si je suis sûre de moi. Je regarde une nouvelle fois les plantes et j'acquiesce. Elle sourit et griffonne quelque chose sur un carnet. Puis elle prend mes plantes non comestibles. et m'enjoins de m'asseoir en attendant que les autres aient fini.

Dix minutes plus tard, le travail de chacun a été contrôlé. La femme nous demande une nouvelle fois si l'un d'entre nous désire modifier ses réponses. Tout le monde refuse.

-Parfait, lance-t-elle gaiement, dans ce cas, ingérer un morceau de chacune des plantes que vous avez estimé être comestibles ne vous posera pas de problème.

L'Élite tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant