Chapitre 8

54 6 0
                                    


On était à la veille de l'opération et Naël était conscient que demain, la chirurgie prendrait tout son sens pour Lisa. Il revoyait point par point son protocole. L'infirmière lui avait dit qu'elle avait prévenu Lisa de sa venue dans la chambre afin de voir avec elle les derniers détails. Mais il reculait le moment... Il avait très envie de la rejoindre et en même temps, il avait bien conscience que cela n'était pas vraiment « normal ».

"- Vous le faites exprès, vous n'êtes pas un vrai méchant. Mais pourquoi ?"

Quelle bonne question et quelle perspicacité. Elle avait lu en lui comme dans un livre ouvert. En repensant à ce moment, un léger sourire s'inscrit sur son visage. Enfin, il se décida à sortir de la salle de soins.

Quand il entra dans la chambre, elle portait encore un foulard différent, rouge cette fois. Mais il ne put s'empêcher de penser que, quel que soit le tissu porté, il la trouvait rayonnante.

Il prit la chaise et la mit au pied du lit. Puis, il vit Lisa le regarder avec ses grands yeux et il lui sembla entendre comme une supplique. Aussi il reprit sa chaise et la porta au niveau du buste de la jeune femme.

Lisa était bizarrement mitigée par cette visite : elle avait hâte et en même temps, appréhendait. Elle ne savait pas pourquoi un tel sentiment ambivalent, mais elle aimait cela. Quand on sait que l'on va peut-être mourir, on se raccroche aux moindres petites choses.

Elle le regarda refermer le dossier avant de prendre la parole.

- Lisa, demain c'est le grand jour, le bilan de ce matin est bon. Je vous ferais passer en milieu de matinée. Je vais prendre mon temps, je veux que ce soit bien, parfait même, afin que dans quelques temps, si vous le souhaitez, vous puissiez faire appel à un chirurgien plasticien.

On en avait déjà parlé à Lisa, mais elle n'avait pas encore réussi à se projeter si loin. Aussi elle ne put s'empêcher de dire :

- Si je suis encore de ce monde.

Naël la regarda intensément.

- Lisa, vous serez encore là, on ne fait pas tout ça pour rien. J'ai retravaillé une grande partie de la nuit dernière sur les procédures, la chirurgie et l'après. Je sais qu'on va y arriver.

Lisa le regarda alors étrangement.

- Le professeur avait raison, vous êtes un homme extraordinaire. Pourquoi une telle carapace alors ?

Naël ne répondit pas, il resta silencieux à la regarder. Elle reprit alors la parole.

- Je trouverai la clé du mystère car, à penser à vous, je ne pense plus à ce petit crabe en moi qui, petit à petit, grignote ce que je suis.

Elle était sincère et tellement belle. Naël se trouva surpris d'avoir ce genre de pensées, surtout que cela ne lui était encore jamais arrivé. Il avait régulièrement des « petites amies », mais là, il se sentait presque... perdu. Surtout que ce n'était pas n'importe qui, c'était SA patiente et ça, ça changeait tout.

Lisa prit pleinement conscience de ce qu'elle venait de dire, aussi tenta-t-elle de détendre l'atmosphère :

- J'ai confiance en vous, je sais que vous ferez un travail parfait. Mais promettez-moi de dormir cette nuit.

Elle accompagna sa phrase d'une petite grimace et, pour son plus grand plaisir, Naël sourit.

- Promis. Allez, je repasse ce soir.

Elle était étonnée et heureuse de voir comment, en quelques jours, ils avaient réussi à se détendre et à se parler tous les deux, le tout agrémenté, dans une certaine mesure, d'une forme de complicité. Cela lui faisait comme une onde de chaleur au creux de l'estomac. Il faisait vibrer quelque chose en elle et elle se sentait bien. Et confusément, elle était persuadé que lui aussi ressentait ce petit lien ténu.


L'amour du dernier espoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant