Partie 3 La lutte Chapitre 26

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Il était tendu, il devait l'admettre. Il savait qu'elle allait avoir mal, souffrir, il savait que c'était un passage obligé. Et pourtant, pour la première fois de sa vie, il était tendu.

Il arriva en salle de soins, à 13h45, alors que les échanges entre soignants avaient déjà commencé. Dès son entrée, tous se turent. Il savait qu'il était craint, bien que respecté, et connu pour son mauvais caractère. Et cela l'arrangeait, surtout au travail. Normalement, il ne venait pas pour les transmissions, mais aujourd'hui il avait une raison bien précise de le faire. Aussi il s'assit dans un silence absolu et leur intima de reprendre :

- Je vous en prie, continuez, j'écoute.

Les soignants reprirent où ils en étaient, et en arrivèrent à Lisa, présente depuis le matin. Il écouta, prenant mentalement des notes concernant tous les patients du jour en chimiothérapie. Quand ils eurent fini, il prit la parole.

- Bien, je suis là aujourd'hui avec vous pour que les choses soient claires. Je suis en couple avec Lisa TORRINI. Cela pose-t-il un problème à quelqu'un ?

Ils le dévisagèrent tous, surpris, mais évidemment, personne n'osa rien dire.

- Ma vie privée ne vous regarde en rien, mais là, la situation étant un peu spéciale, je pensais qu'il était important de le notifier. Dès le retour du Dr ALMONT, il reprendra le suivi. D'ailleurs je vais de ce pas voir comment elle va. Tara, numéro de chambre s'il vous plait ? Je n'ai pas envie de la chercher partout dans le service.

L'interpellée mis quelques secondes à répondre.

- Chambre 415.

Il reprit ses affaires et se leva.

- Merci à tous.

Il passa la porte, ignorant superbement les jacasseries qui reprirent dès sa sortie. Il se dirigea directement dans la chambre et ouvrit doucement la porte. Il savait que ses parents l'avaient emmenée ce matin et revenaient la chercher ce soir.

Il entra de son pas décidé. Elle somnolait, la perfusion de son traitement passant dans sa chambre implantable. Comme il s'y attendait, son cœur se serra. Il s'approcha et l'embrassa doucement.

- Hello ma belle au bois dormant.

Elle sourit dans son sommeil et ouvrit les yeux.

- Mon prince charmant. J'avais si hâte de vous voir.

Il lui caressa doucement la joue.

- Alors, pour info, ils savent. J'ai tout balancé aux transmissions, demain tout l'hôpital sera au courant.

Elle resta silencieuse quelques secondes et répondit : 

- J'espère que cela ne te dérange pas. On aurait pu ne rien dire tu sais. J'aurais compris et je ne me serais pas vexée.

Il secoua doucement la tête.

- Ça ne me dérange pas. Et même mieux, je suis bien content. Comme ça, ils nous taillent tous des manteaux pour l'hiver.

Elle éclata de rire et il sentit son cœur fondre. Cette femme l'avait retourné, changé, apaisé.

- Je t'aime Lisa.

Elle l'attrapa par sa blouse et l'amena à elle.

- Moi aussi je t'aime et bien plus encore que tu ne l'imagines.

Ils s'embrassèrent longuement.

- J'y vais mais je ne suis pas loin si besoin. Et sinon, je repasserais ce soir.

A 15h, Naël entendit son téléphone sonner pour la Xème fois de la journée :

- Laverne.

Il sentit une hésitation à l'autre bout du téléphone.

- Docteur ? C'est Tara. C'est, euh, à propos de Mlle TORRINI.

Son cœur rata un battement.

- Oui, je vous écoute ?

Tout en parlant au téléphone, il prenait déjà le chemin du service.

- Elle vomit malgré le traitement. Impossible de calmer les nausées.

Il grogna.

- Je suis là dans 2 minutes.

Il raccrocha, pensant déjà à ce qu'il allait pouvoir mettre en place comme autre traitement. Il se dirigea en salle de soins, se connecta à l'ordinateur et ouvrit le dossier de Lisa. Il connaissait ce dossier par cœur, mais aujourd'hui, cela l'embêtait. Il n'avait presque pas envie de savoir. Il soupira et entra sa nouvelle prescription. Tara entra alors.

- Comment va-t-elle ?

Elle haussa les épaules.

- Moyen.

Il se leva sans un mot et se dirigea vers la chambre. Il frappa et entra, mais elle n'était pas dans son lit. Il ouvrit la porte de la salle de bain et la trouva affalée à côté des toilettes, encore blanche.

- Lisa.

Elle l'arrêta d'un geste.

- Non Naël, non. Laisse-moi. Je ne veux pas que tu me vois comme ça.

Il sentit la colère monter, colère de la voir ainsi, colère que tout ça lui arrive à elle.

- Lisa, ne soit pas idiote.

Elle le regarda alors, droit dans les yeux.

- Je t'en prie Naël : sort. Tu es à cet instant même, mon médecin et non pas l'homme que j'aime. Je t'en supplie.

Elle sentait une nouvelle vague de nausées monter et elle ne voulait pas qu'il garde cette image d'elle. Il le comprit et se recula.

- Tara arrive avec la nouvelle prescription. Cela devrait te soulager.

Il sortit alors, croisa Tara, à qui il n'accorda aucun regard et sortit du service. Encore quatre lundis de l'enfer à vivre pour elle. Il en avait déjà le ventre retourné.

L'amour du dernier espoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant