Gouffre.

Douzième partie.

Bip biiiiip bip, bip biiiiip bip, bip bii--

*clac*

7:20.

Je me retourne sur le dos. Fixe le plafond. Pense aux deux derniers jours semblables à un rêve. Tout est passé à la fois très vite et très lentement. Les disputes avec mon père sont les plus marquants souvenirs de ces "vacances".

Je me lève doucement et baille. J'ouvre mon placard. J'ai vraiment la flemme de m'habiller, là. Puis je pense au fait que je vais retourner au lycée, et ça me renhardit. J'attrape une chemise blanche sur laquelle je mets un pull en coton léger, puis choisit un jean moulant bleu-marine. Deux chaussettes, une touche de gloss et de mascara et me voilà fin prête.

Je regarde l'heure. 7:30. J'ai l'impression de me retrouver.

Je descends les escaliers et arrive dans la cuisine. Mon chocolat chaud et mes tartines m'attendent, rayonnants, au centre de la table. Amélie me fait un sourire timide. Je lui fais un signe de la main.

- Bonjour, mademoiselle.

- Salut Amélie.

Il me faut à peine quelques minutes pour finir mon petit-déjeuner. J'essuie avec ma serviette les quelques miettes qui traînent autour de ma bouche. Je me lève et pénètre le grand hall, mais bouscule mon père dans ma démarche. Il me fusille du regard. Je fais de même. Ce n'est pas parce qu'il apparaît qu'il se doit de ruiner mon moral ! Je l'ignore et vais mettre mes bottines. Je m'en vais sans le saluer, nan mais faudrait plus que je lui fasse la bise, tiens !

Le chauffeur me dit bonjour, salutation à laquelle je ne réponds pas. Il soupire et démarre la voiture. Un sourire se dessine sur mon visage. Ça m'avait manqué.

Nous arrivons rapidement au lycée. Je sors de la voiture, arrange quelques mèches de ma coiffure et pénètre dans la cour de l'établissement.

Des cris et des rires retentissent de partout. Je m'avance au centre du cercle que forment les différents bâtiments et attends. Mais personne ne vient. Aucun suricate n'est là pour m'accueillir, les dindes qui d'habitude gloussent en ma présence ne me remarquent pas, les porcs qui d'ordinaire me reluquent m'ignorent.

Je ne comprends pas. Qu'est-ce qu'il se passe ? Ils sont stupides au point qu'ils ont oublié mon existence au bout de deux jours ? Je souffle de frustration et regarde nerveusement autour de moi. Allez, que quelqu'un me remarque ! C'est pas si compliqué, je suis littéralement au centre de la cour !

Je jette des coups d'œil par-ci par-là et aperçois enfin Léa. Elle discute avec des filles de sa classe. Mais quelle cruche ! Évidemment que je ne l'ai pas vu tout de suite, elle ne s'est pas mise au point de rendez-vous habituel !

Je commence à marcher dans sa direction, mais un poids me bouscule soudain et je manque de tomber. Par chance, c'est l'autre qui se ramasse. Je me retourne vivement et tombe nez à nez avec Mystérieuse.

Oh.

         Putain.

                            De.

                                     Merde.

Je sens la colère monter. J'attrape les lunettes rondes et dorées qui gisent au sol.

- C'est ça que tu cherches ? dis-je d'un air moqueur.

Elle redresse la tête et son regard désolé s'assombrit dès l'instant où ses yeux se posent sur moi. Je ris intérieurement. On va bien s'amuser...

Elle se lève et époussette sa jupe d'une main, l'autre étant occupée à ramasser son sac. Encore une fois, celui-ci est bien fermé. Un tel soin pour ses affaires m'amuse venant d'une fille aussi maladroite. Finalement, ses yeux dorés rencontrent les miens.