Chapitre 36. Liberté.LE LENDEMAIN
KAHRAMAN Ayça
Assise comme à mon habitude sur l'une des nombreuses chaises hautes du bar, j'attendais l'arrivée de Mukthâr avec un de ses clients, une angoisse latente me serrant le cœur. Mon verre de jus de pomme à la main, je scrutais avec une minutie presque obsessionnelle mon environnement.
L'atmosphère du bar semblait immuable, comme figée dans le temps, chaque femme exécutant les mêmes chorégraphies, chaque homme retrouvant sa place habituelle pour admirer ses danseuses favorites. Les mêmes musiques résonnaient inlassablement, les mêmes visages se croisaient et se recroisaient, créant une routine monotone et oppressante. Plus le temps passait, plus cette répétition incessante devenait étouffante, m'emplissant d'une profonde lassitude.
Je ne pouvais m'empêcher de ressentir un dégoût profond envers certains hommes présents dans cette pièce, dévorant des yeux des femmes jeunes, bien souvent de l'âge de leurs propres enfants. Certains d'entre eux étaient même mariés, menant une double vie entre ces murs et leur foyer. Cette observation ne faisait que renforcer mon aversion envers la nature humaine, m'emplissant d'un sentiment d'indignation et de révolte.
Dans ma tenue légère, vêtue seulement d'un petit ensemble en lingerie, je me sentais vulnérable et salie, réduite à l'état d'objet sexuel plutôt que traitée avec respect en tant que femme. La sensation d'être traitée comme un animal, privée de toute dignité, me révoltait au plus haut point.
C'était un véritable calvaire pour moi de devoir endurer cela, surtout en sachant que chaque acte perpétré à cause de cet homme maudit m'attirait une culpabilité immense, malgré le fait que j'étais sa femme et la mère de son enfant, un fils qui, d'ailleurs, n'avait jamais reçu son attention ni son affection.
"Oh Seymen... tu me manques tellement, mon fils," murmurai-je dans un souffle, la douleur de son absence pesant lourdement sur mon cœur.
Cela faisait maintenant environ trois semaines que je n'avais pas vu mon fils. Je savais seulement, grâce à Ayoubkhan, qu'il était en compagnie de Saeeda, la première femme de Mukthâr. Cette femme semblait n'avoir aucun scrupule, préférant s'occuper d'un enfant qui n'était même pas le sien plutôt que de le protéger des griffes de son mari, fou.
Toutes ces pensées me ramenèrent à Asmahane.
Bien que nous n'ayons pas beaucoup échangé, un lien s'était tout de même tissé entre nous. J'avais appris qu'elle avait été renvoyée chez elle, aux Comores, et que Mukthâr l'avait répudiée.
Ayoubkhan m'avait également informée qu'elle s'était remariée avec un homme de l'Ouest africain et qu'elle endurait d'atroces souffrances, tout comme moi avec Mukthâr.
J'avais tellement de peine pour elle. Comment une femme si douce avait-elle pu se marier avec des hommes aussi indignes ?
Un rire amer s'échappa de mes lèvres en repensant que moi aussi, je m'étais mariée avec un homme semblable. Tout cela à cause de mon père et de sa soif d'argent.
Mon père ? Ce serait mentir que de dire qu'il me manquait. Non. Pas du tout. Une haine profonde envers lui s'était installée en moi à cause de tout ce que j'avais enduré. Je ne pouvais lui pardonner, il était impossible de pardonner un homme qui avait vendu sa fille à un monstre comme Mukthâr. Ce qui me peinait le plus, c'était qu'il n'avait même pas essayé de me contacter.
Au début, dès mon arrivée à Marseille, j'avais tenté de l'appeler tous les jours, en vain. Cet homme avait réussi à abandonner sa propre fille, à la laisser seule face à l'horreur.
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Taht sama' almaktub |
RandomAu cœur des quartiers sereins de la banlieue, Ibrahim, un jeune mauritanien de 18 ans, entrelace les fils de sa vie sous le regard bienveillant de la mère de son beau-frère, résidant aux côtés de sa sœur de lait, Nourhâne. Dévoué à surmonter les déf...