Plus on s'éloigne de l'homme plus on le respecte. Il suffit de se promener sur un chemin de campagne pour s'en rendre compte. Lorsque l'on se retrouve complètement seul au milieu de la nature, on croise parfois un promeneur. Il semble alors naturel de se regarder dans les yeux et de se dire bonjour. C'est l'inverse exact de la ville, où oser un « bonjour » au premier venu sera reçu avec curiosité ou incompréhension, là-bas un regard peut être une agression. C'est une question de dilution de responsabilité. Au milieu d'une foule, on ne comprend pas pourquoi une personne s'en prendra spécifiquement à nous : Pourquoi m'a-t-elle choisi moi, parmi le choix infini qu'il y a autour ? Pourquoi me regarde-t-elle quand il y a tant de paires d'yeux disponibles ? Qu'ai-je fait de mal pour mériter ce bonjour ? La cible devient trop consciente d'elle-même au milieu de la masse dans laquelle elle s'était diluée. C'est comme un réveil soudain à son individualité, à sa responsabilité.
Alors qu'en terrain désertique, l'homme s'assume entièrement car il n'a pas le choix. Il n'y a pas de protection de la masse pour partager la responsabilité, il est ici obligé d'être responsable. Il est entièrement lui-même, et face à la rencontre d'un autre, il représente l'humanité entière et embrasse ce devoir, l'absence d'un salut serait préjudiciable.
C'est fort de ces réflexions lors de sa balade, le long d'un champ, que Didier observait un promeneur solitaire lui faire face. Il restait une dizaine de mètres pour que les deux individus se croisent.
10...9...8...7...6...5...4...3...2...1
- Bonjour, s'exclame Didier.
- Tu veux ma photo fils de pute ? aboie le promeneur.
VOUS LISEZ
Arborescence et autres histoires
HumorLes grenouilles sont-elles heureuses dans un aquarium de luxe ? Est-ce une bonne idée de porter un costume de Mario à un rencard ? Comment un insecte écrasé au milieu d'un livre peut faire voyager dans le temps ? Peut-on écrire quelque chose d'origi...