Septembre. La rentrée.
Il y avait une fraîcheur particulière dans l'air ce matin-là, comme si la fin de l'été se faisait définitivement sentir. Les rues avaient repris leur agitation, les rires d'enfants, les voitures pressées. Mais moi, je marchais d'un pas calme vers l'arrêt de bus, mon sac sur l'épaule, prête à entrer dans une nouvelle phase de ma vie.
Cette année, je quitterais définitivement le collège. J'aurais seize ans en janvier, un âge qui me semblait à la fois grand et encore si jeune. Je me sentais prête à affronter le lycée, malgré mes 1,56 m et mes doutes qui se glissaient parfois dans mes pensées.
A, lui, restait au collège. Il avait un an de moins que moi, et cette distance nouvelle me soulageait. Nous n'avions plus besoin de nous croiser dans les couloirs. Pourtant, je savais qu'il prenait le bus juste devant mon futur lycée pour rentrer chez lui. Inévitablement, il y aurait des retrouvailles forcées. Comment réagirais-je ? Devrais-je lui parler de L, ce garçon qui hantait encore mes pensées ? Une partie de moi savait que non. Ce qui reste en vacances reste en vacances, non ?
Un nouveau départ
Dans le bus, je me suis assise près de la fenêtre, observant les visages autour de moi. Ils étaient nouveaux, étrangers. Ce bus qui traversait des villages minuscules rassemblait une foule disparate de lycéens, chacun portant l'excitation ou l'appréhension de ce premier jour. Mon regard croisa celui d'une fille, brune, aux yeux pétillants mais incertains. Elle semblait aussi perdue que moi.
Nous avons échangé un sourire, hésitant d'abord, puis plus franc. Quelques minutes plus tard, nous parlions comme si nous nous connaissions depuis toujours. Elle avait ce genre de rire communicatif qui rend les conversations légères. Très vite, elle devint une amie précieuse. Le bus, ce simple trajet de 40 minutes, devint notre confessionnal. Chaque matin, chaque soir, nous y racontions nos doutes, nos crushs, et les ragots du lycée, comme des versions locales de Gossip Girl.
Les ombres du passé
Deux mois passèrent, et je m'adaptais bien à cette nouvelle vie. A m'avait tout bonnement « ghosté », tant mieux. Le lycée me semblait un univers vaste, un terrain de jeu où tout restait à explorer. Je commençais à me faire un nom, à me faire une place. Je me sentais à l'aise, populaire sans excès, entourée mais encore libre.
Mais tout n'était pas aussi simple. A finit par réapparaître. Un jour, il vint jusqu'à ma porte, trempé et essoufflé. Je l'ai regardé, surprise et un peu agacée.
Pourquoi maintenant ? Pourquoi revenir ?
— Tu me manques, lâcha-t-il.
C'était sincère. Brutal. Nous avons parlé longtemps cette journée là, une vraie discussion pour la première fois. Je lui ai dit ce que je pensais, ce que je ressentais. Que nous n'étions pas compatibles. Que c'était fini. Il n'a pas protesté.
C'était triste, mais nécessaire. Une part de moi savait que c'était la bonne chose à faire, pour lui comme pour moi.
Le froid et la solitude
Décembre arriva, et avec lui, le froid mordant de l'hiver. Les journées étaient courtes, les nuits interminables. Bien que je sois entourée d'amis, une solitude sourde s'installait parfois en moi. Les flirts et les nouvelles rencontres ne suffisaient pas à combler ce vide.
L'idée de se revoir
Un soir, alors que nous parlions comme d'habitude avec L, sa voix prit une intonation différente. Plus hésitante. Il semblait chercher ses mots, comme s'il préparait quelque chose d'important. Puis il lâcha : — Et si tu venais ? Pendant les vacances de Noël. Je veux te voir.
Je restai silencieuse un instant, mes pensées en ébullition. Cette idée me paraissait à la fois folle et merveilleuse. Partir seule, à quinze ans ? Et si ça ne se passait pas comme prévu ? Mais avant même que je puisse vraiment réfléchir, je savais déjà ce que je voulais.
Oui. Je voulais le revoir.
L avait tout organisé. Il avait parlé à sa mère, qui avait accepté de m'accueillir. Je ne dormirais pas avec lui, bien sûr, mais tout était prêt. Il ne me restait plus qu'à convaincre la mienne. Ce ne fut pas simple. Je lui ai raconté toute l'histoire, dramatisant un peu les choses pour qu'elle comprenne à quel point cela comptait pour moi. Contre toute attente, elle finit par accepter, après une conversation avec la mère de L.
C'était fait. La deuxième semaine des vacances de Noël, je partirais en Suisse. Une semaine avec lui.
Une semaine pour nous
L'attente
Les jours précédant mon départ furent une véritable épreuve. Chaque matin, je comptais les heures, les minutes. J'imaginais nos retrouvailles, les conversations, les moments que nous partagerions. Mais aussi, quelque part au fond de moi, une peur. Et si tout avait changé ? Et si ce qu'on avait vécu cet été n'était qu'une illusion ?
Mais ces doutes s'effacèrent vite sous l'excitation. L'idée de le revoir, de rendre cette relation tangible à nouveau, suffisait à me donner le courage d'avancer.
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Fragments d'un discours amoureux
RomanceLes souvenirs sont comme des éclats de verre : fragments éparpillés, tranchants, impossibles à assembler sans se blesser. Pendant longtemps, j'ai refusé de les regarder, de les toucher. Je vivais parmi ces morceaux éparpillés de ma vie, évitant soig...