Mon cœur battait à tout rompre, comme si chaque battement anticipait ce qui allait se passer. Une tension envahissait tout mon être. Je le voulais. V. Intensément. Follement.
Et pourtant, une autre partie de moi était encore attachée à R, engluée dans une relation sans saveur, prisonnière d'une dépendance affective qui m'enchaînait plus sûrement que des liens visibles.
Pourquoi ne pas quitter R alors ?
Parce que nous partagions un appartement, un quotidien, une vie arrangée autour de meubles bien rangés et d'une routine étouffante. Parce qu'il n'y avait, après tout, rien de concret entre V et moi.
Enfin... C'est ce que je me répétais pour me convaincre que mes sentiments envers V n'étaient qu'une illusion.
Mais les jours passaient.
Chaque matin, je brûlais d'impatience à l'idée de le voir. Nos échanges, toujours plus nombreux, se prolongeaient bien au-delà des cours. Les week-ends eux-mêmes ne suffisaient pas à rompre ce fil invisible qui nous reliait.
Nous passions nos soirées à jouer à GTA et Call of Duty avec un ami à lui. Mais même lui avait fini par sentir cette tension électrisante entre nous, si palpable qu'un soir, il s'éclipsa discrètement, nous laissant seuls.
La distance creusée avec R
En rentrant à l'appartement, tout me semblait terne. R était là, mais il n'était plus vraiment présent. Affalé sur le canapé, les yeux rivés sur son téléphone ou la télévision, il semblait s'être transformé en un meuble de plus dans notre salon.
Je tentais de raviver quelque chose :
« On sort ce soir ? On va dîner quelque part ? »
Et toujours la même réponse monotone :
« Non, la flemme. »Je suffoquais.
R ne comprenait pas. Moi, je ne supportais pas cette routine sans âme. J'avais besoin de vivre des instants passionnés, de retrouver cette folie douce qui donne un sens à chaque moment partagé.
V, lui, incarnait tout ce que R ne pouvait plus m'offrir.
Nous faisions les fous ensemble, notamment lors des soirées du jeudi avec la classe. Complètement éméchés, nous nous éclipsions dans la rue pour voler des décorations de Noël ou danser au milieu des trottoirs jusqu'à l'aube.
Rien ne se passait réellement entre nous, mais chaque nuit passée chez lui après ces soirées rallumait une flamme en moi.
Amsterdam : le point de rupture
Puis vint ce voyage à Amsterdam pour célébrer deux ans de relation avec R.
Je voulais croire que ce séjour pourrait changer les choses. Je lui avais demandé un petit geste : réserver un restaurant pour notre arrivée. Mais non.
À peine arrivés, il évitait les conversations au bar. Je voulais fumer, profiter du cadre, m'évader un peu. Il refusa de m'accompagner. Je me suis retrouvée seule, assise devant une télévision diffusant une vidéo de nouilles asiatiques, complètement défoncée, pendant qu'il dormait dans notre chambre d'hôtel.
Pathétique.
Je tentai de le convaincre de visiter un musée, mais là encore, ce fut un combat. R préférait marcher en silence. Une fois, excédé par mes tentatives de dialogue, il lâcha :
« Tu sais, tu pourrais te taire. On n'est pas obligés de parler tout le temps. »Ce fut le coup de grâce.
Le silence m'étouffait. J'avais besoin de discussions, de vie. Avec V, tout aurait été différent. Nous aurions ri, fait des folies, et j'aurais arboré ce sourire sincère que je croyais perdu.
Tout au long du week-end, V était présent. Pas physiquement, mais à travers nos conversations par messages.
Il me manquait. Horriblement.
La soirée de trop
Deux semaines après notre retour d'Amsterdam, ce fut la soirée qui allait tout bouleverser.
R, V, et quelques amis étaient réunis chez mes parents.
Tout avait bien commencé. Nous avions bu, chanté, ri. Puis, j'eus l'idée d'aller jusqu'à l'aire de jeu près de chez moi, une tradition lors de nos soirées.
Comme à son habitude, R déclina. « Je vais me coucher », murmura-t-il en retournant s'isoler avec son téléphone.
Il ne faisait plus aucun effort. Moi, je ne voyais qu'une ombre de ce qu'il avait été, et cette ombre me terrifiait.
Nous sommes donc partis, mes amis, V, et moi.
Nous étions ivres, riant, chahutant, faisant des paris insensés. V avait juré qu'il ne vomirait jamais à cause de l'alcool. Ce soir-là, il perdit ce pari.
Quand nous sommes enfin arrivés à l'aire de jeu, nous nous sommes assis sur une rambarde du skate park, partageant une bouteille de Cîroc à la cerise.
Tout semblait irréel, comme suspendu.
Et puis, sans que je comprenne comment, cela arriva.
Nos regards se croisèrent, et en un instant, nous nous embrassâmes.
Ce n'était pas un simple baiser. C'était un raz-de-marée. Nous tombâmes ensemble, roulant sur le sol, complètement emportés.
Autour de nous, mes amis étaient figés, choqués par la scène.
Mais ce n'était que le début.
Le pire était encore à venir.
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Fragments d'un discours amoureux
RomanceLes souvenirs sont comme des éclats de verre : fragments éparpillés, tranchants, impossibles à assembler sans se blesser. Pendant longtemps, j'ai refusé de les regarder, de les toucher. Je vivais parmi ces morceaux éparpillés de ma vie, évitant soig...