Avril s'étire en longueur, une période morne et pesante pour moi.
Je traverse actuellement les épreuves pour l'obtention du BTS, une formation qui ne trouve pas d'écho en moi, mais ça, ce n'est pas nouveau.
J'aspirais tant à quitter ce lieu perdu dans l'insignifiance, où le néant semblait régner en maître.
Je ne nourrissais plus aucun désir pour le domaine de l'environnement, cette certitude m'avait déjà étreint après l'obtention de mon baccalauréat professionnel ; mon unique désir résidait désormais dans l'enceinte des lettres universitaires.
Tous m'avaient mis en garde contre ce choix, arguant que je n'y parviendrais point, que je devais persévérer dans cette voie tracée ;
« L'environnement »
Ainsi, contrainte et forcée, je m'enlisais dans ce BTS, portant en moi l'amertume.
Je ne désirais qu'achever cette année pour rejoindre l'université ; c'était là toute mon aspiration.
Ce désir m'animait vraiment, emplissant l'essence même de mon être.
Je me répète peut-être, mais deux ans dans un endroit où vous ne voulez pas être est une douce torture.
C'était peut-être là l'unique flamme qui m'animait en cet instant.
Quitter ce village morne, s'installer en centre-ville, plonger dans la vie étudiante, découvrir les contours d'un autre monde...
J'avais le sentiment de passer à côté de quelque chose d'essentiel, comme si ma propre existence m'échappait peu à peu, et ça depuis des mois, des années.
Oui, je perdais le fil de ma propre vie.
Je réalisais que je vivais pour le bonheur des autres, et non pour le mien.
En agissant ainsi, je ne pouvais que leur causer du tort.
Une fois de plus, je menais une vie dictée par autrui.
Parfois, je me questionnais sur l'impact de tout cela sur ma relation avec R.
Est-ce que cette situation, ce malaise intérieur, n'avait pas entravé notre connexion ?Était-ce un ensemble de choses : des études qui ne m'enthousiasmaient guère, une relation en guise de pansement, un traumatisme enfoui, un amour non résolu pour S, et un amant, V, qui m'attirait toujours plus vers un abîme de questionnements incessants, semant le trouble et m'éloignant de ma véritable essence ?
Mais qui sommes-nous réellement ?
Trouverons-nous un jour notre véritable identité ?
Serons-nous capables de nous apprécier, seuls avec nous-mêmes, sans craindre nos démons intérieurs ?
À ce moment-là, j'avais peur de me retrouver seule avec moi-même, car cela signifiait affronter mes problèmes, une réalité que je n'étais pas prête à accepter, pétrifiée par la peur de l'inconnu.
On dit souvent que nous sommes maîtres de notre destin, mais je crois qu'il y a tant de nuances, de circonstances qui influent sur notre vie.
Parfois, nous nous retrouvons avec cette vie parce que nous n'avons pas d'autre choix, ou, comme moi, parce que nous n'avons pas eu le courage d'assumer nos choix.
Et nous restons là, bloqués.
Avec V, nos moments partagés se multiplient, jusqu'à passer ensemble les samedis, voire l'intégralité du week-end.
Nous sommes devenus inséparables.
Quant à R, nos chemins se séparent peu à peu, nous entamons la rupture du bail de notre appartement.
Tout s'achève lentement mais sûrement, et je sens qu'il ne veut pas me laisser partir.
Pourtant, c'est ma faute, je n'arrive pas à lui dire un non catégorique, décidé.
Comme je l'ai mentionné précédemment, je n'arrive pas à m'en détacher complètement.
Je succombe facilement à ses avances, et tout semble si simple quand on connaît une personne depuis deux ans.
On se laisse facilement emporter par une certaine forme de bienveillance et de sympathie.
Mais je ne tenais pas compte de mes propres sentiments envers lui.
R m'aimait, il m'avait toujours aimée, malheureusement pas moi.
Nous ne partageons plus d'intimité physique, R et moi.
Pour moi, cette relation est terminée sans vraiment l'être.
J'ai l'impression d'être dans une sorte de flou.
En réalité, je ne pensais qu'à S.
J'avais même dit à V que s'il revenait dans ma vie, il pouvait m'oublier.
Mais j'avais également précisé à V que cela n'arriverait jamais, car S était en couple (oui, je l'espionnais sur les réseaux sociaux).
De toute façon, il m'avait oubliée depuis bientôt plus de deux ans, et je n'aurais jamais su quoi lui dire dans tous les cas.
Un jour, alors que V et moi étions chez moi, mes parents absents, en pleine étreinte, j'ai entendu le bruit des clés dans la serrure de la porte d'entrée.
Un frisson m'a parcourue tout le corps.
C'était R. Il devait passer pour me rendre mes affaires, ainsi que le double des clefs et discuter.
Mais il devait venir à 11 heures, pas à 9 heures !
J'avais presque l'impression que c'était fait exprès.
Il ne fallait pas perdre une minute.
J'ai rapidement demandé à V d'aller se cacher dans le placard de ma chambre.
Il était complètement nu, en panique tout comme moi.
J'ai dissimulé toutes ses affaires sous mon lit.
Heureusement, ses chaussures étaient également dans ma chambre à l'étage.
Puis, j'ai enfilé un peignoir.
R était en train de monter les escaliers pour rejoindre ma chambre.
J'ai feint de me réveiller, mon cœur battant à tout rompre.
V était donc caché dans mon placard, complètement nu, recroquevillé.
Il ne devait surtout pas faire de bruit.
Et si R ouvrait la porte du placard ou remarquait quelque chose ?!
J'entends alors les pas de R se rapprocher,
La poignée bouge, il ouvre la porte.
J'ai peur, je suis complètement terrorisée.
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Fragments d'un discours amoureux
Romance« Suis-je amoureux ? Oui, puisque j'attends. L'autre, lui, n'attend jamais. Parfois, je veux jouer à celui qui n'attend pas ; j'essaie de m'occuper ailleurs, d'arriver en retard ; mais à ce jeu, je perds toujours : quoi que je fasse, je me retrouve...