Le Motesine

28 - Camping raté

— Oulah dure nuit ? Demandais-je à Dan, vautré devant son café au lait, le dos voûté, le visage blafard. Il lève les yeux vers moi et je sens que c'est un effort surhumain.

— Oh meuf... j'ai été malade toute la nuit, je ne boirais plus jamais de ma vie !
Je soupire en m'installant à côté de lui.
— Tu sais .. Je fais une pose en me servant du jus d'orange, le nombre de personnes que j'aie entendu dire ça et qui ont recommencé quelques heures après ne peut même pas tenir dans ce manoir.
Et j'exagère qu'à peine.

Lara et Julian font leur entrée en plaisantant sur un sujet inconnu, et je ne peux m'empêcher de les envier. Ils ont l'air si.. Heureux.

Lara glisse à Dan une boite de médicaments,
— Prends ça, et retourne dormir un peu.
— Lara...
Elle lève le doigt pour le faire taire et je ricane à cette vision,
— Tu en as déjà assez fait.
Il grogne quelque chose, attrape les cachets et disparaît en continuant de marmonner des paroles inintelligibles.

Je le suis des yeux jusqu'à la sortie et reporte mon attention sur le couple, un sourcil levé. Julian est déjà parti dans l'arrière-cuisine.

— Il a débarqué en plein milieu de la nuit pour dormir au milieu de nous et a fini par vomir à nos pieds, avoue-t-elle en se laissant tomber sur un tabouret.

Je ne peux m'empêcher de pouffer à cette vision. Je ne sais pas pour qui j'ai le plus de peine. Lara et Julian pour le vomi ou Dan d'avoir dormi dans ce lit qui a servi à bien plus de choses cette nuit vu le bruit provenant de leur chambre.
Je peux sentir les poils de ma nuque se dresser. Tonío vient d'entrer dans la pièce et je n'ai pas besoin de me retourner pour vérifier. Il passe devant moi, un short bas sur ses hanches et... rien du tout en haut.

Je manque de m'étouffer avec mon jus.

— Tiens donc, tout va bien ? Me demande Lara avec un sourire coquin.

Pétasse, pensais-je très fort. Je lui fais une grimace quand Tonío se sert des œufs et du bacon que Sergio a cuisiné et vient s'asseoir à côté de moi.

— Ça va biscuittino ? Me demande-t-il en plongeant sa fourchette dans un bacon grillé. Non sans oublier de mettre une serviette en tissu sur sa cuisse. Son épaule frôle la mienne et je me rappelle soudain ses muscles se crisper hier dans la douche. Un soupçon de regret me hante, mais un autre sentiment enfoui me fait serrer les cuisses sous la table.

— Je ne sais pas comment te remercier, en fait.
Il m'a offert un dermographe, un vrai.
— Alors ne me remercie pas, et tatoue-moi. Cette fois, je recrache vraiment mon jus dans mon verre et me tourne franchement vers lui,
— Quoi ?
— Tu as entendu.
— Non, je .. je ne sais même pas m'en servir.
— Apprends, et dès que tu te sens prête, tatoue-moi, ok ? Un petit truc ? On ne le verra même pas parmi tous mes tatouages.
Je glisse mes yeux sur son torse, la panthère d'encre qui me dévisage et je déglutis.
Qui suis-je ? Je cligne plusieurs fois des yeux, ah oui, le tatouage. Julian revient, une mixture ressemblant à du fromage blanc dans les mains, il vient s'asseoir à coté et Lara, face à Tonío.

— Vous avez vu Marisa d'ailleurs ? Elle est toujours dans le coin le matin habituellement.

— Je l'ai vu avec Sarah et Lake dehors, me répond Tonío. Et comme par magie, les voilà qui entrent dans les lieux. Lake se met à courir pour sauter au pied de Julian, et elle récolte des papouilles de Lara qui lui gratte le ventre.

— Bon, j'espère que vous êtes prêtes les filles ! On se tourne vers Sarah comme une seule femme. Prêtes ?

— On part après le déjeuner, continue Sarah, vous savez... elle pâlit en voyant notre confusion, pour le camping.
J'échange un regard avec la blonde qui veut dire "oh oh". Je me souviens vaguement de ce souvenir, mais je ne m'imaginais pas le vivre.