Chapitre 4 - Jour 12

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Cela faisait presque deux semaines qu'elle était là.

Deux semaines.

Elle avait l'impression que son arrivée remontait à bien plus loin, mais le nombre de feuilles glissées dans sa petite pochette ne mentait pas. La jeune femme en sélectionnait une nouvelle pour chaque jour passé dans ce monde étrange. Au moins, elle ne risquait pas de perdre la notion du temps, pensait-elle à chaque fois.

Abandonner ne faisait habituellement pas partie du vocabulaire d'Hermione Granger. Mais Elle semblait vouloir avoir raison d'elle et de son courage gryffondorien.

Elle, c'était le surnom de la forêt. Cette forêt qui la gardait en son sein sans lui offrir de sortie, ni d'indice sur la présence de ses amis, ou sur toute autre forme de vie. Les oiseaux continuaient de gazouiller gaiement, bien loin des préoccupation de la Rouge et Or, mais elle n'en avait encore vu aucun, ni dans le ciel, ni perchés sur des branches d'arbres. Ainsi, leurs chants fantomatiques, qui l'avaient d'abord ravi elle et son ouïe retrouvée, l'avaient ensuite plongée dans un désarroi profond.

La Gryffondor n'en pouvait plus de ces bruits qui la rendaient folle.

Ni de ces arbres qui lui donnaient l'impression d'être enfermée dans une grande cage, dont l'intérieur très réaliste se redéfinissait chaque nuit pour redonner des formes semblables. Le temps était au beau fixe depuis son arrivée, aucun nuage ne tachait le ciel d'un bleu pur et la température était invariable. Quant aux buissons, ils donnaient des baies et des racines à foison, quand on savait les trouver.

Bref, le monde se régénérait jour après jour et semblait toujours au meilleur de sa forme, contrairement à Hermione.

La jeune femme se sentait très faible, elle buvait et mangeait maintenant à sa faim tous les jours mais pourtant elle dépérissait à vue d'œil. Les carences en protéines lui avaient fait perdre du poids si bien qu'elle n'osait même plus prendre ses bains quotidiens. Elle détester la sensation de ses os ressortant sur sa peau pâle et terne, sans vie. Ses cheveux avaient perdu leur éclat et la tête lui tournait les trois quarts du temps.

Et pourtant, elle continuait d'avancer.

La Rouge et Or n'était plus habitée par la motivation, mais par la répétition mécanique des gestes qu'elle pratiquait depuis son arrivée. Marcher. Avancer, un pied après l'autre. Sans tomber. Prêter attention aux nombreuses racines et aux rochers. Manger. Boire. Dormir. Et recommencer inlassablement ce cycle.

La solitude aurait certainement raison d'elle. Ses amis lui manquaient énormément et l'inquiétude la rongeait un peu plus profondément chaque jour. Avaient-ils remarqué sa disparition ? Peut-être qu'un groupe de secours avait été lancé à leur poursuite ? Devrait-elle s'arrêter de marcher et monter un camp en les attendant ? Étaient-ils au moins en vie ?

Et Rogue ? Avait-il survécu ? Car après tout, sa vie ne tenait qu'à un fil la dernière fois que son regard s'était posé sur lui.

Dépitée et sans énergie, elle se laissa choir piteusement sur le sable qui bordait la rivière et prit une poignée de petits cailloux qu'elle jeta un à un dans les flots tranquilles.

Cette insolente rivière, dont l'eau s'écoulait en rythme régulier vers de nouveaux horizons, la rendait jalouse. Si seulement elle pouvait aller aussi vite que l'eau, se glisser dans tous les sols, dans chaque arbre, dans un nuage et retrouver une quelconque trace de vie humaine. Elle enviait les gouttes d'eau qui fuyaient, toutes ensemble vers une sortie. Alors qu'elle, elle restait plantée là, seule.

Si seulement elle pouvait croiser quelqu'un, ou quelque chose.

Et Merlin entendit ses prières.

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