C'est enfin le grand jour. Celui où le collège va grouiller d'ado déguisés en tout et n'importe quoi. Celui aussi où les parents vont en profiter pour nous alpaguer et nous parler de leur merveilleuse progéniture.
Avec Hélène, on avait prévu de se déguiser en Mercredi Adams et Enid. Je vous laisse deviner qui devait porter la perruque de la brune qui fait toujours la tête. On en parlait depuis cet été et j'avais hâte qu'elle nous confectionne nos costumes. Mon amie est une professionnelle de la machine à coudre. Elle réalise elle même quasiment toute sa garde robe. Une magicienne de l'aiguille !
Bref, n'ayant plus aucun signe de vie d'elle depuis des semaines entières, j'en ai déduit que notre plan était tombé à l'eau.
Voilà pourquoi, je me retrouve habillée en petit chaperon rouge de l'horreur. Tresses de chaque côté, robe rouge, tablier blanc tacheté de sang et faux couteau dans mon petit panier en osier.
Quand j'ai expliqué à Julien quel déguisement j'avais choisi, il s'est allègrement moqué de moi, arguant que j'avais plus de traits communs avec la mère-grand qu'avec la charmante petite fille. Pourquoi j'ai laissé cet énergumène entrer dans ma vie déjà ?
Derrière mes airs de vieilles rabougries, je dois avouer que j'adore cette ambiance festive. Tous les élèves et les professeurs déguisés, nous nous retrouvons sur un pied d'égalité. Ils me semblent moins pénibles dans leur costume et je dois leur paraître moins sévère dans le mien. Enfin, c'est ce que j'en déduis des quelques sourires qui me sont adressés à droite, à gauche.
- Tu es la star du jour !
Avec armure et gorgerin, Arthur ressemble à s'y méprendre à un vrai chevalier. J'en ai presque la mâchoire qui se décroche. Allo Amandine, faut se réveiller !
- N'importe quoi ! C'est ton costume qui envoie du lourd par contre. Tu l'as volé au musée du coin, c'est ça ?
De sa main gauche, il vient frotter sa barbe naissante en souriant, fier de lui. Je réalise alors que ses fossettes sont à présent dissimulées derrière ses poils et, bizarrement, ça me dérange.
- C'est ta mère qui m'avait conseillé une boutique de déguisement dans l'arrière-pays.
- Ahhh, sa fameuse caverne au trésor !
Ma mère adore les fêtes médiévales. Et encore le mot est faible. Quand on était enfant, elle me forçait à me déguiser en princesse d'époque. Pas les jolies robes qui font rêver les petites filles. Non, pas du tout. Je devais porter de vieilles fripes qui font tellement plus "authentique". Quelle horreur ! Mon père a toujours réussi à se dégager de ses obligations ce jour-là et Alicia a du porter une robe comme la mienne les premières années uniquement. Ensuite, elle a ensuite convaincu ma mère qu'avec son amour pour la cuisine, elle serait beaucoup mieux en servante. Bizarrement, c'était le seul costume qui n'était pas une vieille guenille. Ma sœur a toujours été plus maligne que moi.
- Tu t'en sors bien parce que la vieille sorcière qui tient ce bazar me donnait toujours des déguisements affreux.
Un sourire malicieux nait aux commissures des lèvres de mon collègue.
Je crains le pire.
- Tu as vu des photos c'est ça ?
- J'ai eu le droit à toutes les photos de tous les festivals auxquels ta mère a participé.
Pauvre de lui !
- Alors c'était certes un peu barbant mais certains passages étaient très divertissants, je dois le reconnaître.
- Tu fais références à mes robes plus moches les unes que les autres ?
- Non, à la tête que tu tirais sur les photos. Ça a beaucoup fait parlé ta mère d'ailleurs.
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Impensable !
RomanceA 28 ans, Amandine a une vie bien établie : un petit ami, un travail stable, un appartement à elle. Bref : aucune ombre au tableau ! Son quotidien sans relief est alors chamboulé par l'arrivée d'un nouveau collègue, Arthur, qui bien que plus jeune q...