Chapitre 12

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Arthur semble avoir du mal à percuter et continue à me fixer d'un air perdu. Pour un prof de maths, il a bien du mal à faire 1 + 1 = 2. Cette situation est assez gênante comme ça, il pourrait a minima me saluer, j'ai déjà fait ma part du travail en ce qui me concerne.

Mais non, il persiste à me regarder comme s'il avait un extra-terrestre devant lui.

- Vous vous connaissez ? me demande Clément un peu confus à côté de moi.

Et il y a de quoi l'être. Je me tourne vers lui en essayant de garder un air assuré.

- Oui, c'est mon nouveau collègue. Tu sais, le remplaçant de Franck !

- Le petit jeune qui vient d'avoir le CAPES ?

- Oui voilà !

Le "petit jeune" avec qui tu as pris un cours de langue très intéressant l'autre soir, me glisse cette vieille mégère qui me sert de conscience.

Une tornade brune apparaît alors dans mon champ de vision et bouscule Arthur d'un coup de hanche. Alicia. En salopette près du corps et avec une cuillère en bois pour faire tenir ses cheveux, elle emplit l'espace de sa présence et je me sens d'un coup moins bien dans mes baskets. Enfin dans mes sandales en l'occurrence.

- Bah alors, ne sois pas malpoli, invite les à entrer ! Ça fait tellement longtemps que je n'ai pas vu ma grande sœur !

Et là, elle se jette dans mes bras. Pour un œil extérieur, on dirait que je lui ai beaucoup manqué. Est-ce que ça pourrait le cas ? Je suis sceptique. Très sceptique. Mais je lui laisse le bénéfice du doute. Les gens peuvent être surprenant des fois, non ?

Alicia finit par se détacher de moi et après m'avoir adressé un clin d'œil, se décale pour me laisser entrer dans l'appartement en me faisant une sorte de révérence. Ne pas tiquer sur son côté théâtral. Ça me plait chez Hélène après tout...

Je pose mes affaires sur le porte-manteau et cherche Mamita des yeux pour voir si quelqu'un s'occupe d'elle. Évidemment, non. Je l'aide à enlever son gilet et l'accompagne dans le salon pour qu'elle puisse s'asseoir. Mes parents sont là, à moitié affalés sur la canapé. Ils ont mis leurs "habits du dimanche" comme ils disent. En gros, mon père porte une chemise et ma mère une robe. Aucun d'eux ne se décale pour faire une place à ma grand-mère, ni pour nous dire bonjour d'ailleurs. A quoi servent la politesse et la bienséance de nos jours de toute façon ?

Ne t'énerve pas Amandine, tu viens seulement d'arriver... Je vais chercher une chaise et y installe ma grand-mère. Elle en profite pour m'attraper par le cou et me faire un bisou sur la joue, ce qui génère chez moi une bouffée de bonheur. J'ai vraiment bien fait de la faire venir ce midi. Elle va être ma bouée de sauvetage.

Je prends l'initiative d'aller faire la bise à mes parents, puisque si j'attends sur eux, ça n'arrivera jamais et constate qu'ils ont vraiment l'air d'être de très bonne humeur. Je ne leur demande pas pourquoi, je connais déjà la réponse. Réalisant que tous leurs invités sont arrivés, ils finissent par daigner se lever et nous demandent ce que nous voulons boire. Je demande un verre du vin blanc que j'ai ramené pour ma part et n'écoute pas les réponses des autres. Rien n'est en place pour qu'on s'installe tous. Ce n'est pourtant pas compliqué de faire un ratio nombre d'invités/nombre de places assises. On pourrait tenir à trois sur le canapé mais vu comment se tiennent mon père et ma mère, on va ne compter que deux places. Il manque donc quatre sièges. Je déplace de nouvelles chaises et vais chercher deux poufs que mes parents stockent dans leur cagibi.

En passant devant la cuisine, je constate qu'Alicia est aux fourneaux. J'aurais dû m'en douter, mes parents sont les premiers fans de sa cuisine. Elle va nous en mettre plein la vue, c'est certain. Je peux lui reconnaître ça, elle a toujours eu une vraie une vocation pour le monde culinaire. C'est une "artiste de l'assiette" comme dirait ma mère.

Impensable !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant