Chapitre 15

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- Tu comptes faire la gueule encore longtemps ?

Assise en tailleur sur mon canapé, je relève la tête vers Clément et le fusille du regard pour seule réponse.

En même temps, il croyait quoi ? Que j'allais sauter de joie ? Le remercier d'avoir eu cette brillante idée ?

J'ai passé des jours entiers à me lamenter de la perspective de devoir affronter ma sœur tout un repas après avoir passer des années à l'éviter. Si on a envie de passer du temps avec quelqu'un, on ne fait pas en sorte de se barrer dès que cette personne arrive dans le coin, non ? Si je voulais partager des choses avec Alicia, je me serais réjouie de savoir qu'elle revenait habiter près de chez nous. Mais non : mon comportement est cohérent avec mes sentiments. Je la déteste, je l'évite. Point barre.

On est toujours en train de dire que les femmes sont compliquées et bien là pourtant c'était on ne peut plus limpide. Je ne comprends pas comment un mec peut avoir autant de diplômes et se montrer parfois aussi con. Ça me dépasse !

Parce que oui, sur ce coup là, il a agi comme le dernier des abrutis. C'est soit ça, soit il a voulu sciemment me faire chier. Ce qui ne lui ressemble pas.

- Allez, chérie, je suis sûre que tu seras contente finalement ! insiste Clément en me caressant la cuisse.

- Tu te fous de moi, j'espère ? je rétorque en dégageant violemment sa main et en me levant du canapé par la même occasion pour mettre de la distance entre nous. Tu as l'impression que j'ai passé une bonne soirée hier ? Quand tu me regardais, tu n'avais pas l'impression que je vivais un calvaire?

Et le voilà qui soupire. Ce mec est incroyable !

- Oh ça va, ce n'était pas la mer à boire non plus ! Alicia a tout fait pour être aimable avec toi, je te ferais dire... Tes parents, c'est une autre histoire, je ne dis pas.

- Aimable avec moi ? je répète en mimant des guillemets. Tu étais là quand elle a dit qu'elle m'appelait encore Margareth dans mon dos ? Se payer la tête des autres entre dans ta conception de "aimable" ?

- Elle te taquinait Amandine ! Faut travailler un peu ton auto-dérision...

Je recule instinctivement. La colère irradie tellement en moi que je suis à deux doigt de lui balancer au visage tout ce qui me tombera sous la main.

- Non mais tu fais exprès d'être débile ou quoi ? je réponds en grimpant d'un octave. On taquine quelqu'un devant lui pas dans son dos !

- Bon continue à bouder finalement, je n'ai pas envie de me faire insulter alors que je voulais juste t'aider.

Pauvre mec va... Récupérant la tablette qui trônait sur la table basse, je trace vers notre chambre avant de me jeter sur le lit. J'ai envie de crier, de hurler... bref d'évacuer toute cette tension en moi. Je suis tellement furieuse après Clément ! Il tourne en boucle avec son "je voulais juste t'aider". Sauf que je ne lui ai rien demandé. Qu'il s'occupe de sa famille, je gère la mienne !

Cherchant une série pour me vider l'esprit, je jette mon dévolu sur Mes premières fois. Hélène m'a rabattu les oreilles avec les abdos d'un certain Paxton et sur cette série a priori un peu déjantée. J'avoue que j'ai toujours un peu peur lorsqu'Hélène qualifie quelque chose de déjanté... Est-ce que ça pourrait être comme en maths : moins par moins, ça fait plus ? Du coup, ce qui est déjanté pour une fille déjantée serait en fait quelque chose d'à peu près normal ?

Je lance le premier épisode et après quelques minutes de scepticisme, je finis par me faire happer par les tribulations de cette pauvre Devi.

Le lendemain matin, ma rancœur est toujours là et je n'ai clairement pas envie de faire un pas vers Clément. Je tourne en rond tel un poisson dans son bocal en ressassant les événements du week-end. C'est donc après un "bonne journée" presqu'inaudible que je claque la porte de l'appartement.

Impensable !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant