Chapitre 10 - Combat clandestin

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Profitant du fait que la nuit durerait encore plusieurs heures et ne souhaitant pas perdre de temps, jugeant qu'il en gaspillait déjà suffisamment durant ces recherches alors que la situation de Manolis était certainement toujours plus précaire, Nigel encouragea Jill à les conduire à l'arène clandestine immédiatement, après s'être assuré que Gaëlan se sentait capable de le faire. Après tout, Nigel avait bu de son sang et il endurait le choc des événements des dernières heures, lui qui n'avait jamais été habitué à ce genre d'existence, contrairement à Nigel, pourtant, le jeune homme affirma que tout allait bien et qu'il pouvait encore continuer.
Nigel conserva néanmoins un bras autour de ses hanches pour le soutenir, vérifiant que la faiblesse ne le gagnait pas et que ses jambes vacillantes le portaient, et également pour le réconforter alors qu'il le sentait légèrement trembler contre lui, certainement perturbé par l'atmosphère déliquescente de Kaleth, ce que Nigel pouvait comprendre. Cette ville marquait les êtres en révélant la part d'ombre de chacun.
Eclairés par la lanterne tenue par Jill, ils se dirigèrent vers le sud de la ville à travers les ruelles sombres.
Soudainement, une rumeur agitée monta d'un autre quartier, peut-être celui de la Jarretière bleue qu'ils avaient quitté. Il devait s'y passer quelque chose.
Si Gaëlan s'en inquiéta, stoppant dans sa marche en se retournant vers la provenance de ce brouhaha lointain, Nigel et Jill échangèrent un regard lassé puis haussèrent les épaules. Il ne s'agissait que d'une nuit de plus à Kaleth.
Ne faisant donc que peu de cas de cet incident, quel qu'il soit, ils poursuivirent leur chemin, en entrainant Gaëlan, dont l'angoisse augmenta et il se blottit contre Nigel en avançant. Habituellement, il craignait de se montrer aussi démonstratif à l'extérieur mais, en pleine nuit à Kaleth, personne ne s'en serait soucié et les lieux l'inquiétaient bien trop pour qu'il préfère s'accrocher à sa peur des préjugés plutôt que de chercher de la force auprès de celui qu'il aimait.
Après encore plusieurs minutes, Nigel remarqua que Jill les conduisait vers le port mais, plutôt que de se diriger vers les quais, elle les entraina vers le chantier naval, sur lequel ils débouchèrent.
Lorsque Kaleth avait été une ville aussi prospère et florissante que tout le royaume grâce aux mines d'Arëynky, le chantier naval était très actif, les commerçant réclamant toujours plus de navires et ceux qui effectuaient les voyages sans relâche ayant régulièrement besoin de réparations à cause du rythme effréné des traversées pour distribuer les marchandises extraites des galeries. A présent, l'endroit était désaffecté et tout ce qui s'y trouvait encore étaient des épaves placées en cale sèche pourtant, il était très loin d'être désert.
Au contraire, une foule fébrile et bruyante s'y agitait, massée autour d'un navire légèrement incliné vers l'avant du côté de la proue, dont la figure semblait pleurer à cause des sillons laissés par l'humidité.
Pour y accéder, il fallait suivre un couloir dont les parois avaient été dressés à partir de débris de bois certainement arrachés aux épaves alentours. Des torches éclairaient les lieux à intervalles réguliers. L'entrée était surveillée par deux colosses qui inspiraient peu de sympathie, certainement des membres de pègres locales, celle qui se chargeait d'organiser ces combats clandestins.
Probablement fallait-il payer le droit d'assister aux combats. Rien n'était gratuit, encore moins à Kaleth.
Le devinant parfaitement, Nigel commença à sortir la bourse qu'il avait récupérée sur un garde inconscient pour payer leur droit d'entrée mais Jill lui ordonna de ne rien en faire d'un geste de la main.
Son sac sur l'épaule, elle alla saluer les deux hommes avec une certaine familiarité néanmoins distante en indiquant que Nigel et Gaëlan l'accompagnaient, les désignant d'un geste. Les deux colosses les détaillèrent puis acquiescèrent et leur intimèrent de passer d'un mouvement de la tête sans réclamer aucun payement en échange.
Stupéfaits, Nigel et Gaëlan se pressèrent d'emboiter le pas à Jill.
Après quelques mètres, pour ne pas que les colosses l'entendent, Nigel demanda à son ancien camarade :

« Comment t'as fait pour qu'ils acceptent qu'on entre sans payer ?

– Je travaille parfois pour eux, répondit Jill. Puisque j'ai des connaissances en médecine, je soigne les combattants qui se démontent la gueule.

Le Sang des Déchus - Tome 1 : Sang de Mercenaires [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant