Chapitre 17

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Kieran

Deux camionnettes du groupe furent mobilisées pour l'opération. Sanna n'opposa aucune résistance lorsqu'on la fit monter, menottée, dans le véhicule de tête sous la garde des trois chefs d'équipe et de Wyatt Greer, l'un de mes coéquipiers. Blake et moi héritâmes de la surveillance de Shane, d'Elizabeth, ainsi que de mon collègue Warren Alvarado qui nous servait de chauffeur puisque l'héritier anglais semblait détester la conduite à droite.

Sur le chemin menant au nord, nous fîmes halte à la clinique Nemeton où je découvris qu'Hailey n'avait pas l'intention de nous accompagner. La tâche était confiée à un Haut-Chaman éveillé répondant au nom de Kangee. Pour tempérer un Esprit-dieu animal, mieux valait envoyer un Sorcier capable d'une approche non humaine des événements, car un loup millénaire n'avait ni les mêmes valeurs ni la même morale qu'un homme.

À présent au complet, les camionnettes prirent la direction des Territoires du Yukon à plus de trente heures de route de Seattle. En temps normal, le déplacement se serait fait en avion pour le gain de temps, mais notre ignorance quant à l'endroit exact où trouver Amarok nous obligeait à préférer la voie routière afin de pouvoir nous rendre presque partout sans problème. Blake et moi savions seulement que le loup légendaire appréciait les forêts offrant un meilleur abri que la toundra. Pour le reste, ce serait à Blake de jouer.

Elle avait hurlé à notre départ. Une réponse avait aussitôt suivi non sans affoler tous les chiens de l'État. Au moins notre commanditaire nous savait-il en route, nous n'avions plus trop à nous inquiéter des limites de sa patience.

Au début du trajet, Shane envoya des textos de manière régulière. Lorsqu'Elizabeth l'avait aussi remarqué, cela l'avait faite sourire.

Ces deux-là formaient un couple atypique. À première vue, ils n'allaient pas ensemble tant ils étaient différents. Il était rentre-dedans, râleur, impatient ; elle était pleine de vie, brillante et réfléchie. C'était pourtant bien leurs différences qui les rendaient complémentaires, car l'un équilibrait l'autre au point parfait qu'atteignent les personnes lorsqu'elles frôlent la mort ensemble. Leur entente ne semblait pas souffrir de la routine. Ça laissait rêveur.

Blake se réinstalla à mes pieds et s'allongea de tout son long. Je me penchai vers elle :

— Ça va, Blake ?

Elle acquiesça tout en fermant les yeux. Au moins n'avait-elle pas de perte de conscience pour le moment. Malgré tout, je n'étais pas tranquille.


Notre premier arrêt se fit à la tombée de la nuit, au Quality Inn, à Quesnel en Colombie-Britannique, à plus de sept cents kilomètres de Seattle. L'établissement, en plus d'accepter les animaux de compagnie, possédait une salle de fitness bienvenue pour des chasseurs de Surnaturels chez qui l'entraînement était quotidien. En sus, l'auberge jouxtait un parc que Blake se fit un plaisir de découvrir. Je veillais à rester près d'elle, et Sitjaq près de moi puisqu'il était toujours responsable de nous.

— Comment va Sanna ? me renseignai-je.

— Elle reste silencieuse. Je pense qu'elle a peur du sort que lui réserve Amarok. Le chaman n'a rien dit de plus ?

— Non. Il est Sioux, alors il ne connaît pas bien les Esprits-dieux de l'Arctique. Tu ne saurais pas quelque chose qu'on ignore ? Tu es le seul qui puisse posséder une information que Blake et moi n'avons pas.

— Je connais de lui seulement ce que nos mythes en disent, que c'est un loup solitaire qui s'en prend aux chasseurs esseulés, et que grâce à son intervention, ses enfants les loups gardent les troupeaux de caribous en bonne santé en dévorant les individus malades ou faibles. Ainsi, il reste pour les hommes ceux gras et bien portants.

Le Souffle du loupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant