Monsieur Le Comte

Ch. 42 : Le retour

Affairée dans la cuisine auprès de Madame Chang, le bruit d'une calèche me fait lever les yeux pour constater que Taehyung nous rend visite. J'oblige le vieux majordome à ne pas quitter sa chaise, sur laquelle il déguste un café et lit son journal, pour me rendre moi-même à la rencontre du docteur. J'ouvre la porte pour découvrir son air maussade, ses yeux noirs sont remplient de colère et sa bouche pincée ne m'offre aucun sourire chaleureux.

- Suis-moi, m'ordonne-t-il en pénétrant dans la demeure.

Surprise pas sa requête autoritaire, je le suis sans sourciller en direction de la cuisine où il commande froidement un bac d'eau froide à l'une des domestiques.

- Assieds-toi, poursuit-il son monologue en m'indiquant un tabouret dans un coin de la pièce.

Je m'y installe sans trop comprendre pourquoi je suis malmenée ainsi. Taehyung sort son matériel médical, s'approche de moi en éclairant mon visage à l'aide d'une bougie et saisi mon menton pour m'obliger à relever la tête. Il demande à la cuisinière de bien vouloir lui tenir le bougeoir afin de procéder aux soins. J'étouffe un rire à peine voilé avant d'ancrer mes yeux aux siens.

- Cela t'amuse ? gronde-t-il.

- Tu va soigner quoi exactement ?

- Ta lèvre fendue ...

- A la bonne heure ! m'exclamais-je avant de me redresser ne manquant pas de le bousculer au passage.

En colère après son comportement et celui de Yoongi, qui a vendu la mèche, je me réfugie dans la bibliothèque au pas de course. J'entends mon ami me suivre et s'introduire dans la-dite pièce à ma suite.

- Mais qu'est-ce qui t'a pris de te rendre là-bas seule et de surcroît en pleine nuit ?

- Je constate que les nouvelles vont vites !

- Yoongi était aussi remonté contre toi lorsqu'il m'a raconté ton escapade nocturne !

- Je n'ai demandé le secours de personne ...

- Et pourtant j'ai comme l'impression qu'il t'a évité de graves ennuis ! crie-t-il.

- Je n'ai pas besoin d'être constamment choyée ! Je ne sais pas ce que vous avez promis à Jungkook mais je suis capable de m'assumer. Je me suis toujours débrouillée seule et j'ai bien l'intention de continuer ainsi.

- Soit ! lève-t-il les bras en l'air en signe de résilience. Mais nous aimerions tous que tu nous considère un peu si cela n'est pas trop te demander !

Jamais personne avant eux, mis à part mes parents, ne m'avait si sincèrement ouvert leur cœur. Je m'en veux de me montrer si rigide à leur égard alors qu'ils ne cherchent qu'à me prouver leur amitié. Je contourne mon bureau pour le rejoindre.

- Veux-tu bien soigner ma blessure ? lui quémandais-je.

Je me poste devant lui comme une petite fille fautive, je lui sourie pour tenter d'amadouer cet homme habituellement si enjoué. Il succombe et m'offre à son tour des yeux rieurs et me demande de bien vouloir m'asseoir pour examiner la plaie. Il sort de sa sacoche en cuir, qu'il avait faite suivre, un coton imbibé d'une solution désinfectante, qu'il coince dans une pince avant d'appliquer très soigneusement le baume sur ma lèvre meurtrie. Je grimace car le froid réveille la douleur lancinante qui se propage jusque dans ma joue.

- Elle ne t'a pas raté ! s'exprime Taehyung en plissant son nez pour relever ses lunettes. Il est possible que le goût te dérange un peu mais ça ne durera pas, m'explique-t-il.

- Et pour la douleur ?

- Elle ne sert qu'à te rappeler ton inconscience. Et j'espère que cela sera suffisant pour que tu ne recommence plus jamais un tel acte irréfléchi ! me gronde-t-il plus gentiment.