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Je marchais avec violence en direction de la chambre où je dormais. Je rentrai en trombe dedans et me claquemurai dedans. J'étais rempli d'une telle énergie que je me sentais capable d'abattre des murs à main nue. Je tournai en rond, marmonnant dans ma barbe. Je me mis à dire tout ce que je pensais. Tout ce que j'avais put penser ces derniers jours et que j'avais gardé pour moi. Je n'avais pas de laurier rose à proximité mais le silence de la chambre ferait l'affaire. Je marchai jusqu'au mur à côté du lit. Je lui fis face.

- Emmet tes airs supérieurs tu peux te les mettre là où je pense...

Je fis demi tour.

- Je me sens dévastée car j'ai perdu la chose qui faisait que je me sentais plus seule.

Je tournai sur le tapis d'un vert profond, traçant presque des sillons dedans.

- Je suis tellement, tellement désolé de ne pas avoir courut te rejoindre Kols. De ne pas avoir courut plus vite pour te rattraper Drew. D'avoir proposé de nous rendre à cet étage.

Je marchai, marchai inlassablement. Je continuai à parler. Je parlais de mon arrivée à la maison de Torrence. Je parlai de ce que j'avais ressenti en me sentant plus perdue que jamais alors que tout ce que je pensais savoir de vrai sur ma vie s'effondrait. Je parlai de mes amis. Qui était devenu ma famille. Je parlai de ma terreur viscérale, de mon horreur et de toute la souffrance que j'avais put emmagasiner ce dernier soir à la tour de verre. De mon état de vide de ces derniers jours. De comment je m'étais senti aussi froide et glacée qu'une rivière en Alaska. Je parlais de tout. Encore, encore et encore. Je prenais conscience de tout ce que j'avais retenu. Je pourrai passer pour une folle. Mais, bon sang, c'est ce que j'étais et j'avais besoin de parler, de dire à haute voix mes pensées pour ne pas les refouler six pieds sous mon cœur. A un moment donné je m'étais mise à pleurer. A chaque larme, chaque sanglot, desserrait un peu plus l'énorme noeud dans ma poitrine.

- Je ne me suis jamais sentie aussi impuissante et faible qu'à ce moment où tu tentais de forcer la porte, Emmet.

Ma voix trembla. Mes pieds commençaient à ralentir. J'avais arpentée chaque dalle de marbre noir de la chambre. En long en large et en travers.

- J'ai bien cru que j'allais mourrir.

Ma voix se tue. Je m'immobilisai. La nuit était tombée depuis longtemps. Des étoiles brillaient dans le ciel. Je m'approchai de la fenêtre. Ce n'était pas la même vue que depuis la bibliothèque. Mais je la connaissais par cœur aussi. Même s'il faisait nuit noire au dehors, je pouvais situer presque tout les arbres, les vallons et montagnes face à moi. La bouche sèche d'avoir tant parlé, je remuais les lèvres. J'avais soif. Mais plus encore j'étais épuisée. Je titubais jusqu'au lit et m'effondrai dessus. Tirant les couvertures au dessus de moi, je soufflai véritablement pour la première fois depuis des jours. Je n'avais plus rien sur le coeur. J'avais tout dit. Tout dit ou presque. J'avais parlé de bien des choses. Sauf d'une. De Kallias.

***

Je me réveillais en sursaut. Je bafouillait des choses inintelligibles à moitié encore dans mon sommeil. Je basculais hors du lit, ne savant pas ce qui m'avait réveillée aussi brutalement. Je fis quelque pas, me rendant dans la salle de bain attenante. Je me passai de l'eau sur le visage quand je me redressai avec violence. Par tout les dieux ! Je savais ce qui m'avait réveillé. J'avais faim. Mon ventre était vide et gargouillait.

- Oh, bordel de poulpe, soufflai je en bondissant sur ma porte.

Je courus dans la maison, dévalais les marches et pénétrai la salle à manger. Un immense sourire aux lèvres. J'avais faim. Et cette seule sensation me faisait prendre conscience que j'avais laissé derrière moi l'immensité vide qui avait élue domicile dans mon esprit. J'étais vivante. Une assiette était posée sur la table. Mais personne a l'horizon. Je me laissais tomber sur une chaise et commençai à manger. Je fermai les yeux d'aise. Jamais je n'aurais penser qu'un jour manger me dégoûterait et c'était pourtant ce qui c'était passé ces derniers jours. Mais je retrouvais enfin le goût et les saveurs que pouvait procurer des œufs brouillés. Et ceux ci étaient vraiment délicieux. Une porte s'ouvrît dans mon dos. J'ignorais si c'était celle de la cuisine ou une autre qui donnait sur pleins d'autres salons. Je m'en fichais. Je continuais à manger.

Les fiancés des ténèbres Où les histoires vivent. Découvrez maintenant