Chapitre 3 - Le monde des puissants

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Après la tristesse vint la colère! Je me levai, telle une furie et je dis à haute voix qu'il était hors de question que je laisse passer cela, il fallait que le monde sache! Le peuple devait être au courant qu'il s'était bercé d'illusions et se trompait sur cette personne. Aussi ai-je dit ouvertement que j'allais aller voir les médias pour tout leur déballer, suivi certainement d'une plainte. Il était temps que je l'affronte. Nolvine se leva à son tour, et me cria dessus : « C'est hors de question! Je te l'interdis! »

Je me retournai pour la regarder, et je ne dis rien, j'étais surprise de sa réaction. Je me sentais à la fois provoquée, trahie, et déçue. Comment osait-elle m'en empêcher? Qui était-elle pour me dire quoi faire dans cette situation? Toutes ces questions et bien d'autres du même genre envahissaient mon esprit et me persécutaient. Cela avait dû durer quelques secondes, mais cela m'avait semblé des heures. Elle finit par rajouter, en baissant la voix, ainsi que légèrement sa tête: « Crois-moi, ce n'est pas une bonne idée... ». Là, je ne pus m'empêcher de la regarder avec de gros yeux. Elle s'assit gentiment, et moi, debout, j'hésitais à m'en aller, à l'engueuler ou à m'asseoir près d'elle. Je finis par me dire que Nolvine était ma seule amie, et que je ne voulais pas la perdre, alors j'allai m'asseoir près d'elle et je ne dis rien. Dans un premier temps, elle resta silencieuse, puis elle prit son verre de whisky, le descendit cul sec, et le reposa. Ensuite, elle se leva, marcha un peu, et se décida à me parler. «

- Stélina... vu que je sais la raison qui t'a amené si loin de chez toi, autant que tu saches la mienne.

- Ne t'y sens pas obligée.

- Ce n'est pas le cas, mais je vais te la dire, tu dois comprendre pourquoi je m'oppose à ce que tu ailles te livrer aux médias. Tu te souviens que je t'ai dit que j'étais une citadine? Eh bien, j'aurais dû ajouter une riche citadine. Nous n'étions pas millionnaires, mais mes parents avaient beaucoup d'argents, vraiment. Je n'ai pas grand-chose à te dire, jusqu'à ce que j'aie atteint l'âge de huit ans. J'ai ramené à cette époque ma première mauvaise note de l'école, mon père est devenu franc fou et m'a tabassé. Et attention hein, je n'ai pas dit giflé, j'ai dit tabassé. Mes parents avaient toujours été sévères avec moi, mais leur comportement devenait de plus en plus extrême au fil des années.

- Ta mère ne disait rien?

- Non, la plupart du temps elle me disait qu'il avait bien raison, et parfois, elle l'encourageait.

- Pourquoi étaient-ils comme ça?

- Je vais y venir. Après cela, ils ont commencé à me battre, me torturer, m'humilier pour un oui ou pour un non. J'avais oublié de mettre une chaussette dans le bac à linge sale? Un coup de bâton. J'étais rentrée à la maison avec deux minutes de retard? Ils m'enfermaient à la cave, nue, m'urinait dessus et me laissaient là pendant des heures... bref, cela a continué pendant des années et quand j'ai eu treize ans, ma mère a commencé à s'y mettre aussi, et elle m'a une fois mis la tête dans les toilettes et a tiré la chasse, c'était un nouveau pas supplémentaire.

- Mais personne ne remarquait tes bleus ou autre?

- Ils faisaient bien gaffe de ne pas me blesser le visage ou les mains. Bref, tu as compris, ils me battaient souvent, et m'humiliaient, me rabaissait et cela marchait, je pensais que j'étais une moins que rien. Je n'avais pas d'amis, pas de vie sociale, et ma mère choisissait mes habits et n'hésitait pas à me faire beaucoup de mal si je portais un truc trop serré, ou si on voyait mes jambes. Ce que tu dois comprendre, c'est que ça, c'était derrière leur masque. Parce qu'en société, avec leurs amis, employés (ils avaient une entreprise), tout le monde les appréciait. Tellement d'ailleurs, que mon père s'était mis à la politique. Quand j'ai eu seize ans, il a été élu au Conseil d'État du canton de Zurich. Seulement voilà, quand il a été élu, il était revenu complètement saoul à la maison après avoir fêté sa victoire et ma mère n'était pas en bon état non plus. Moi j'étais de corvée de ménage. Ma mère m'a attrapé et m'a arraché mes vêtements vers le bas en me frappant et hurlant "il est temps que tu deviennes une vraie femme! Mais hors de question que ce soit un de ces jeunes stupides qui te transforme! C'est une affaire de famille", mon père est arrivé, mais là, je me suis débattue et j'ai réussi à m'enfuir. J'ai dormi une nuit dehors, sans manger ni boire et ne sachant pas où aller... Le lendemain, je suis allée à la police pour tout raconter, et ensuite je suis allée voir les médias. Je me suis dit que c'était une excellente idée et une exclusivité pour eux, et c'était pour moi une façon de me venger de tout ce qu'ils m'avaient fait, tout en faisant fonctionner la justice! Sauf que rien n'a fonctionné, RIEN! Il n'y a jamais rien eu dans les médias, et la police a classé le dossier "faute de preuve". Je suis restée à la rue pendant une semaine, en me nourrissant exclusivement des aliments que les magasins et restaurants jetaient, et en allant me laver dans le lac. J'avais froid en plus, car c'était l'hiver, je dormais dans des halls d'immeubles, mais ce calvaire n'était rien comparé à ce que j'ai découvert en fin de semaine. Un journal gratuit, qui appartenait à une entreprise privée, traînait par terre et je l'ai lu, la première page était consacrée à mon père. Il avait raconté que j'étais une droguée, bipolaire, et que j'étais un danger pour moi-même. Il s'était également posé en victime en racontant que ma "fugue" l'avait rendu triste et que c'était un coup très dur pour lui, mais qu'il ne m'en voulait pas parce je n'étais pas responsable de mes actes.

L'ombre des puissantsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant