Sensitive Love V : Remontée

36. Aveux Refoulés

ALISON

Être honnête avec mes sentiments, ça n'a jamais été simple pour moi. J'ai toujours eu du mal à entièrement m'y confronter depuis que je me suis renfermée. Ce n'est pas vraiment intentionnel, mais davantage un instinct de survie que j'ai installé en réalisant que les gens pouvaient partir et définitivement me quitter.

Je crois que, comme tant d'éléments de ma vie, c'est quelque chose qui s'est éteint le jour où j'ai perdu mes parents. Parce que dans le fond, tout repose sur leur mort. Chaque peine, chaque doute, chaque descente vient du fait que j'ai perdu les personnes auxquelles je tenais le plus au monde. Et ça fait mal. C'est déchirant.

Encore aujourd'hui, je ne peux pas effacer cette douleur. Ce n'est pas possible de changer ce que je ressens. C'est imprimé en moi à la manière d'un rappel que ce jour bien précis, une partie de moi s'est envolée avec eux. Je me suis séparée de ma plus belle facette avec eux.

Alors depuis ce jour, tout est difficile. Rien n'est plus blanc ou noir ; absolument tout est nuancé. Et je pensais que ça resterait ainsi. Je pensais que le restant de mes jours, je serais coincée dans cette bulle où plus rien n'a réellement du sens. Je pensais que je ne pourrais jamais m'en remettre et que chaque jour alourdirait la peine et la culpabilité en moi.

Il y a encore quelque temps, c'était le cas. Toujours coupable, jamais comblée : comment faire pour changer les choses ?

J'ai ma réponse aujourd'hui et, finalement, elle a longtemps été sous mes yeux. Avec un peu plus d'amour pour moi-même, un peu plus d'amour pour le monde qui m'entoure, un peu plus d'amour pour ceux qui m'entourent, j'y suis parvenue. J'en suis enfin arrivée à ce que je n'avais jamais espéré obtenir. Et c'est étrange de vivre ça, c'est tellement inattendu que je peine encore à y croire. Mais pour la première fois, je suis en paix avec moi-même.

Et c'est tellement bon.

Je n'ai plus besoin de me cacher, plus besoin de prétendre, plus besoin de m'enfuir. Je sais ce que je veux. Je sais ce dont j'ai besoin. Et ces deux choses sont en accord.

Pendant trop longtemps, je me suis limitée. Je suis restée derrière les murs dont les briques sont doucement en train de tomber. J'ai bu ses mots sans jamais les lui rendre. Je me suis nourrie de ce qu'ils me procurent sans jamais lui donner la part qu'il mérite.

Mais je ne veux plus de ça, désormais. Je ne veux plus lui mentir, plus dissimuler le fond de mon cœur, je ne veux plus prétendre que chaque fibre de mon être ne l'appelle pas à chaque battement. Depuis le début, c'est lui. Ça a toujours été lui. Il n'a jamais été question de quelqu'un d'autre quand il est la première personne à m'avoir donné un sentiment de joie lors de mon arrivée.

Je ne peux pas l'expliquer. Je ne peux pas définir la connexion qui me lie à lui. Elle est là. Elle est juste là.

Je ne peux plus la laisser filer.

— Je dois te dire quelque chose, terminé-je enfin.

Il paraît surpris.

— Quoi ? Qu'est-ce que c'est ? J'ai dit quelque chose de mal ?

— Non ! m'empressé-je de le rassurer. Non, pas du tout. C'est loin d'être le cas. Tu... Tu sais toujours dire les bonnes choses.

Il sourit.

— Enfin, la plupart du temps, ajouté-je.

Je prends une longue inspiration, puisant dans mon énergie intérieure afin de le regarder droit dans les yeux.

— Il y a quelque chose que je... que je voulais te dire depuis longtemps. C'est...

Encore une fois, j'inspire. Je prends mon temps. J'apaise mon esprit qui bouge dans tous les sens dans sa propre panique. C'est difficile de maintenir mon regard dans les siens quand je peux y discerner tellement d'émotions. Il se prépare à toutes les possibilités.