37. Temps Figé

17 1 0
                                    

AARON

J'ouvre doucement les yeux face à la lumière qui chatouille mes paupières, me sentant contraint de me réveiller malgré la fatigue qui me pèse toujours à cause du décalage horaire. Je me laisse tendrement porter par la réalisation que je me trouve chez Alison, dans son lit, et qu'elle est tout juste en face de moi, les yeux fermés.

Je pourrais croire qu'elle fait semblant, ayant remarqué que je me réveillais, mais elle est bel et bien profondément endormie. Je souris face à la paix sur son visage qui n'est pas seulement là lorsqu'elle dort, mais quand elle est réveillée, également. Ce n'est plus comme avant où le seul moment de répit qu'elle avait était lorsqu'elle plongeait dans le monde des rêves.

Je constate que tout ça, ça a changé. J'ai aussi l'impression qu'elle dort bien plus longtemps, loin de son habitude de se réveiller tôt – très tôt – dans la nuit. Et tout ça, ça me soulage. Ça veut dire qu'elle va mieux.

Lorsque je veux bouger, je réalise que mes bras l'entourent et qu'ils la tiennent prisonnière. Ça ne m'étonne pas que même dans mon sommeil, je sois aussi addict à elle. Je ne changerais ça pour rien au monde, d'autant plus depuis que j'ai pu entendre ces mots de sa bouche.

Je peine encore à le croire, seulement parce que je ne m'y attendais pas. « Je t'aime, Aaron ». Qu'y a-t-il de mieux qu'entendre la femme que j'aime me dire ça ? Je ne pensais pas que ça me toucherait autant, mais je réalise maintenant que c'était stupide de penser ça quand il est question d'Alison : tout ce qu'elle me dit me touche au plus profond de mon âme. C'est indéniable.

— Tu te moquais de moi parce que je te regardais dans ton sommeil, mais tu fais la même chose, en fait.

Je baisse les yeux vers ceux d'Alison qui sont entrouverts. Un sourire au coin des lèvres, elle se tourne sur le dos afin d'étirer ses bras.

— Seulement parce que toi, tu le faisais pendant des heures.

— Parce que tu te réveillais pas avant des heures ! se justifie-t-elle.

Je souris. Touché.

La toujours tenant dans mes bras, je la rapproche de moi afin de l'enlacer aussi fortement que possible tandis qu'elle proteste. J'aime me réveiller dans le même lit qu'elle quand elle est encore là. Finalement, c'était peut-être une bonne idée d'ajuster mes habitudes pour me lever plus tôt ; ça me permet de la voir.

Je m'imprègne de son odeur et de sa chaleur, sachant que demain déjà, je vais devoir rentrer et ce moment à deux prendra déjà fin. Je déteste ça – me trouver aussi loin qu'elle. J'aimerais tellement qu'on soit au moins dans le même état – être du même côté du pays me suffirait même. Je ne peux m'en prendre qu'à moi-même pour ça, pour avoir décidé de me rendre à une fac à des milliers de kilomètres.

Mais je ne regretterai ce rêve pour rien au monde. C'est celui que j'ai depuis que je suis petit ; je peux survivre à cette distance encore quelque temps si c'est ce qui est nécessaire. C'est tout ce qui me reste, de toute façon.

— Reste ici, l'intimé-je en la retenant une bonne fois pour toutes.

Je la sens enfin se relâcher, ce qui me pousse à la rapprocher davantage de moi et à lui donner un bref baiser – je ne sais pas pourquoi j'en suis autant accro, dernièrement.

— Pourquoi t'es debout, de toute façon ? me demande-t-elle tandis que mes yeux sont toujours sur ses lèvres. T'as fait un mauvais rêve ?

Je remonte immédiatement mon regard vers le sien.

— J'ai besoin de faire un cauchemar pour me réveiller tôt, dans ton esprit ?

Elle se pince les lèvres.

Sensitive Love V : RemontéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant