45. Son Ombre

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ALISON

Huit mois auparavant,

Assise dans cette pièce dans laquelle je me rends tous les jours depuis un mois, je triture mes doigts comme si ça pouvait m'aider à contenir ma nervosité. Les murs blancs qui m'entourent semblent se refermer sur moi, me rappelant constamment que je cherche désespérément à faire table rase du passé. J'aspire à un nouveau départ, un vrai ; à une vie libérée des chaînes de mon passé. Une vie où je peux vivre avec.

L'air autour de moi est étouffant, comme si le poids de mes erreurs était si lourd qu'il m'oppresse. Cependant, je refuse de le laisser me consumer plus longtemps que nécessaire. À chaque respiration, je trouve le courage d'affronter les démons qui me retiennent prisonnière depuis trop longtemps et qui m'empêche de m'ouvrir et d'aller de l'avant. J'essaie de percevoir cette pièce comme la clé de ma sortie au lieu d'un mur qui me retient. Parce que je sais que c'est l'unique moyen d'aller mieux.

Face à moi, le docteur Rodriguez, mon psychologue, vient tout juste d'entrer dans la pièce, un sourire chaleureux aux lèvres et les yeux reflétant la compassion et la compréhension qui l'abritent. Je prends une profonde inspiration, me préparant aux émotions qui risquent de se déverser exactement comme à chaque séance. Ces fois précédentes, je me suis immédiatement renfermée. Chaque fois qu'elle touche d'un peu trop près mes émotions, je me sens contrainte de me renfermer. J'ai toujours aussi peur de me dévoiler, toujours aussi peur de me mettre à nu.

Néanmoins, aujourd'hui, je veux changer ça. Rien qu'une fois, je veux pouvoir essayer autre chose, essayer d'être plus brave et d'aller au-dessus de mes peurs. Je peux faire ça. Je sais que je peux faire ça.

— Bonjour, Alison. Comment te sens-tu aujourd'hui ?

J'inspire une nouvelle fois, me préparant pour cette séance.

— Je me sens... Je vais bien, je crois. Je prends les choses au jour le jour, réponds-je, un peu trop hésitante, peut-être.

Rodriguez hoche la tête.

— Très bien. Je veux essayer quelque chose aujourd'hui, tu es d'accord avec ça ? Je voudrais que tu m'expliques ce qui t'a amené ici, exactement. Qu'est-ce qui t'a poussé à choisir la désintoxication ?

Je baisse les yeux à cette question, les mains tremblantes. Repenser à ce jour-là est difficile, j'ai l'impression d'y être piégée une nouvelle fois, incapable de sortir de mon corps en pleine agonie. Je peux encore sentir la peur en moi, celle que, peut-être, je ne m'en sortirais pas. Tout de suite, assise ici avec Rodriguez, mon passé pèse sur mes épaules tellement plus qu'avant. La pièce s'efface et je suis transportée à cette période sombre, revivant l'angoisse.

J'ai du mal à trouver les mots, comme s'ils étaient enfermés au plus profond de moi, enfouis sous des couches de douleur que je masque depuis des années. Je ferme les yeux, tentant de rassembler le courage d'affronter la vérité, pas d'embellissement de la réalité. Je veux être honnête avec les autres autant que je le suis avec moi-même. La peur s'empare de mon âme, murmurant des doutes sur ce que j'ai fait ce jour-là. Les souvenirs sont vifs ; leur intensité écrasante. Et je me retrouve piégée sous tout ça. Emprisonnée, je suis incapable de bouger.

— J'ai, euh... fait une overdose, murmuré-je, les mots ayant un goût amer sur ma langue. Et j'ai failli mourir. Je... J'imagine que c'est ce qui m'a réveillée. J'ai réalisé que j'avais touché le fond et que j'étais aux abysses. Je savais que... si je devais vivre, je ne pouvais pas continuer à faire ça.

Les larmes me montent rapidement aux yeux.

— J'ai tout perdu, enchaîné-je. Tout le monde. Ma... dépendance m'a consumée et je... j'ai blessé beaucoup de personnes. Je leur ai fait beaucoup de mal, beaucoup plus qu'ils ne pouvaient le supporter.

Sensitive Love V : RemontéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant