Sensitive Love V : Remontée

22. Temps à Deux

ALISON

Aujourd'hui,

Je n'avais pas prévu de retrouver Aaron aujourd'hui, encore moins un Aaron aussi compréhensif, aussi à l'écoute et aussi patient avec moi. Je sais que je suis loin d'être la fille la plus facile ; de nombreux problèmes me suivent et me collent à la peau. Je ne peux rien n'y faire. Pour autant, je suis reconnaissante qu'il me fasse sentir presque comme si rien n'avait d'importance.

Pour la première fois depuis longtemps, j'ai l'impression que je n'ai pas besoin de me justifier sur chaque détail ; Aaron ne se préoccupe que des plus importants. Alors oui : j'en profite pour omettre les plus durs, ceux que je ne veux tout simplement pas partager avec lui, tout de suite. Il n'a pas besoin de les connaître si jamais il décidait qu'il ne voulait plus jamais me voir ; je ne voudrais pas attiser sa pitié uniquement pour me faire pardonner.

La vérité implique que je sois honnête avec lui, mais surtout que je n'utilise pas sa peine en ma faveur. C'est donc ce que j'essaie aujourd'hui lorsque je raconte mes deux derniers jours ici.

— Et voilà, c'est tout. Je n'ai pas vraiment fait grand-chose.

Il hoche la tête tandis que son regard se pose sur le prospectus que j'ai laissé sur la table. Dans l'attente de nouvelles de lui, j'ai décidé d'établir un itinéraire afin de me vider l'esprit en visitant la ville. J'ai aussi veillé à m'éloigner de son périmètre à lui pour ne pas m'immiscer dans sa vie sans qu'il ne le veuille.

— J'ai encore rien fait, m'expliqué-je. J'avais prévu de faire ça aujourd'hui ou... un autre jour.

Pendant un moment, il me contemple comme s'il intégrait doucement ma réponse. Je fronce légèrement les sourcils en le voyant, me demandant quel genre de pensées traversent son esprit. Et lorsqu'il se relève d'un coup, je n'ai aucune idée de quoi faire, si ce n'est de rester calme lorsqu'il s'approche de moi.

— Allons-y, dans ce cas.

— Quoi ?

Il me prend la main et me pousse à me lever.

— Allons-y, répète-t-il. On a fait Buenos Aires, alors laisse-moi te montrer Notre Dame.

— Mais–

— Non, non, non. Je n'accepterai pas de refus. Allez, viens.

Sans attendre mon avis, il me tire avec lui jusqu'à l'entrée et patiente tandis que je me prépare pour dehors. Il pleut toujours, alors j'ignore ce qu'il a prévu de faire, d'autant plus qu'il y a encore quelques minutes, il voulait seulement qu'on reste à l'intérieur. Je dois dire que, quelque part, ça me rassure que nous ne restions pas confinés dans cette petite chambre d'hôtel parce qu'il y a des limites à mon habilité à demeurer calme, seule avec lui.

Il me rend tellement nerveuse que j'ai l'impression de faire une gaffe à chaque seconde qui défile. Je suis en train d'imaginer ce qu'il peut bien penser de chacune de mes actions et comment il les interprète. En récupérant mon badge, j'essaie de ne pas me détruire l'esprit avec ça et choisi de le suivre. Les doutes sont toujours là, mais je ne veux pas les laisser envahir mes pensées quand j'ai enfin la chance de profiter d'un peu de temps avec lui. Je ne peux pas être sûre qu'il voudra que je reste, ni même s'il m'enverrait un autre message les jours qui suivront pour que nous puissions poursuivre ma course à la rédemption. Je ne veux donc gâcher aucune de mes chances.

Sans plus attendre, nous montons dans la voiture d'Aaron en essayant autant que possible de ne pas être touchés par la pluie.

— Il n'y a pas tellement de choses à faire en ville, admet-il, mais fais-moi confiance.