Sensitive Love V : Remontée

27. Plaider Sa Cause

AARON

Je lace mes crampons tandis que l'odeur familière de l'herbe fraîche emplit mes narines – je dois dire que ça m'avait manqué. Le soleil tape fort sur le terrain, c'est un motivateur pour moi de m'entraîner plus longtemps. Aujourd'hui, ce n'est que moi sur le terrain, alors je compte repousser mes limites pour être au top de ma forme pour la prochaine saison. Le poids des attentes pèse lourd sur mes épaules et il y a tellement d'enjeux, mais je suis déterminé à surpasser tout ça et aller plus loin.

Lorsque j'entre enfin sur le terrain, une poussée d'adrénaline se répand dans mes veines, comme à chaque fois. L'air autour de moi fait flamboyer mon impatience et je peux sentir le feu en moi à chacun de mes pas. C'est ici que je prends vie, que mes rêves se forgent et que ma passion s'envole. C'est ici ma place, sur ce terrain, au milieu de ces tribunes et avec un ballon avec moi.

Je me positionne sur la ligne de mêlée, imaginant une foule autour de moi et des adversaires qui s'opposent à moi. Ça éveille mon esprit de compétition. Posant mon téléphone à côté de moi, j'attends qu'un coup de sifflet en sorte avant de m'expulser et cours plus vite que je ne l'aie jamais fait. Je pousse mon corps dans ses derniers retranchements, j'exécute les exercices que j'ai planifiés avec précision et concentration. J'essaie d'être le meilleur, d'agir comme le meilleur.

À chaque accélération, chaque fois que je fais un crochet, chaque fois que je ralentis, tout ça témoigne des heures que j'ai passées à me perfectionner. Je sens mes muscles brûler et ça ne me pousse qu'à continuer. Qu'à aller plus loin. Qu'à essayer plus fort. Jamais je ne laisserai la fatigue m'envahir, pas lorsque je me prépare aussi intensément pour la victoire. Tout ça, ce n'est que le début. La suite est ce que j'espère et c'est ce que j'obtiendrais lorsque j'aurais fait une saison exceptionnelle.

L'écho de ma propre respiration et le martèlement rythmique de mes pas constituent la bande sonore de ma quête incessante de grandeur. Je me surpasse, je vais plus vite, je ne me contente pas du minimum, mais bien plus que le mieux que je peux faire. À ce moment-là, il n'y a que moi et le terrain ; une relation symbiotique entre l'athlète et l'arène. Je contrôle la situation, chaque action, chaque précision passe sous mon expertise.

Cet été, je ne me suis pas seulement préparé physiquement, mais surtout stratégiquement. J'ai lu et relu une dizaine de livres. J'ai regardé et re-regardé tout ce que je pouvais trouver. J'ai imprimé chaque information utile parce que je suis sérieux. Je suis déterminé. Je suis si motivé que je ne laisserai aucune chance me passer sous le nez. La perfection dans mon jeu est tout ce que je cherche. Et c'est exactement ce que je compte obtenir.

Je ne sais pas combien d'heures je reste sur le terrain, mais lorsque je sens que je n'ai plus rien à donner, je m'allonge sur le sol, me passant de l'eau sur le visage avec ma gourde avant d'en boire, répétant l'action un nombre incalculable de fois. Après ça, je ferme les yeux en espérant retrouver suffisamment de force pour le retour à la fraternité.

— Tu vas bien ?

Je sursaute en me relevant d'un coup.

— Putain de merde... C'est quoi ce bordel ?

Je croise le mec de la veille – Takeshi.

— Les jurons sont implantés dans ton sang ?

Je soupire et me redresse, restant assis.

— Je suis à moitié français, alors oui. Qu'est-ce que tu fous ici ?

Merde, c'est vrai que je jure beaucoup.

— Je devais te parler de quelque chose.

— Tu veux dire de quelqu'un ? deviné-je.

Il me tend la main et j'hésite un moment avant de la prendre. Finalement, il m'aide à me relever et je sens immédiatement le poids de mon corps sur mes jambes. À tout moment, je crois que je vais t'écrouler.