Sensitive Love V : Remontée

47. Tête-à-Tête

AARON

Mettre fin aux fossés que j'ai créés me fait du bien.

Hier, je suis allé voir mon père afin de lui parler. Je n'avais pas énormément d'attente en venant le faisant, si ce n'est écouter les conseils d'Alison. Toutefois, je dois dire qu'il m'a surpris. Mon père vit toujours à la résidence, seul, mais passe ses journées au travail quand il le peut. Retourner là-bas, ça m'a rendu nostalgique des souvenirs qui, malgré la solitude que j'ai longtemps ressentie entre ces murs, m'a aidé à y voir plus clair.

On a beaucoup parlé, lui et moi. J'ai passé l'après-midi là-bas à l'écouter s'excuser de m'avoir laissé être impliqué là-dedans et à l'entendre me parler du regret qu'il a en lui. Il n'a pas hésité à me faire comprendre qu'il fera de son possible pour se faire pardonner si je lui en laisse la chance. Nous n'avons pas parlé d'Alison. À chaque fois qu'il approchait le sujet, je m'en suis éloigné parce que je ne suis pas encore prêt à l'aborder avec lui. Nous n'avons pas non plus parlé de ma mère, mais mes quelques évocations l'ont fait sourire.

Je ne sais honnêtement pas quoi en penser.

En rentrant, j'en ai parlé à Alison. Elle m'a écouté tout le long et a vraiment été attentive, au point où je me suis demandé comment j'ai pu un jour la mériter. Elle était heureuse pour moi que j'aie sauté le pas – une chose que je ne parviens toujours pas à croire – et m'a encouragé quand je lui ai parlé d'un dîner qui était prévu avec mon père et Wesley un jour dans le futur. Mon père veut qu'on se retrouve tous les trois, mais je lui ai simplement dit que j'y réfléchirais.

Maintenant, je me dis que ce serait une bonne chose, finalement, d'autant plus qu'Alison est entièrement d'accord avec ça – et c'est ça qui me perturbe le plus. Au-delà de juste ça, je la trouve étrange depuis notre repas avec ma mère. Je ne pourrais pas dire ce qu'il y a de bizarre, exactement, mais je vois qu'il y a quelque chose qui cloche. Je me demande si ma mère ne lui aurait pas dit un truc qui l'a rendue comme ça, mais Alison a été de bonne humeur tout le long du dîner et je ne vois pas quand ma mère aurait pu lui dire quoi que ce soit sans que je sois là.

Je pense que c'est surtout dû au fait que notre temps à Seattle n'est pas éternel et que nous devrons un jour ou l'autre revenir à nos vies respectives. Moi aussi, je m'en inquiète déjà. Néanmoins, ce que j'ai prévu en fin de semaine devrait forcément la rendre d'un peu plus de bonne humeur – même beaucoup plus, si tout se passe bien.

Je tourne d'ailleurs la tête vers elle tandis que nous nous trouvons au milieu d'un embouteillage. La route est peu à peu en train de se désengorger, mais on devrait y rester encore de nombreuses minutes. À côté de moi, la brunette semble stressée. Je lui ai proposé qu'on sorte quelque part aujourd'hui, et elle m'a dit vouloir visiter un endroit particulier – un parc, dont elle a entendu parler. Il y a énormément de parcs à Seattle, alors je n'ai pas cherché à savoir lequel.

Tout ce que je fais, c'est suivre ses indications qui nous ont amenés tout droit au milieu de cet embouteillage dans lequel nous sommes coincés depuis au moins trente minutes. Et je commence sérieusement à perdre patience.

— T'es sûre qu'on ne peut pas prendre la prochaine sorte, là ?

Elle jette un rapide coup d'œil vers moi avant de revenir à son téléphone qu'elle ne lâche pas depuis que nous sommes dans ma voiture.

— Non, c'est toujours tout droit. On arrive bientôt, me répète-t-elle.

Je soupire.

— « Bientôt » ? Comme il y a vingt minutes ?

— Sois patient. Pourquoi t'es pressé, de toute façon ?

— Je le suis pas. J'aime juste pas rester dans une voiture aussi longtemps.