Mon choix ultime sur Parcoursup se dirige vers une licence de Psychologie. Mes plans secondaires sont l'Histoire de l'art et la Philosophie. J'attends, je scrute les listes d'attente, elles bougent lentement. J'ai encore espoir. Je ne garde que l'Histoire de l'art, je libère la place en Philo. Je suis encore en liste d'attente pour la Psychologie. Je finis par entrer dans cette filière si atypique qu'est l'Histoire de l'art.
Je me surprends à être sociable, je n'ai pas le choix à la fac. Même si je ne suis pas venue pour me faire des amies, je me résonne et me dis que je ne peux pas tout faire toute seule. Être entourée est essentiel. Nous sommes une bande de quatre filles qui s'entendent plutôt bien. Je me renseigne et la scolarité m'informe d'une possibilité de passer en première année de licence de Psychologie au deuxième semestre par validation d'acquis à condition que je valide mon premier semestre du premier coup. Je me donne donc à fond. J'ai du mal avec ce rythme et cette liberté d'étudiante mais je m'y sens bien et je me surprends à apprécier ce cursus. Je valide mon premier semestre et je décide de rester en Histoire de l'art. Je ne sais toujours pas ce que je veux faire de ma vie mais qu'importe, j'ai encore le temps de trouver, je ne me mets pas la pression.
Vingt ans. Combien de jeunes adultes de vingt ans ont besoin de leur indépendance ? Beaucoup me direz vous et c'est normal. Une vie qui commence. Il faut faire place au changement mais encore faut-il que les parents se résolvent à laisser voler leurs enfants de leurs propres ailes. Justement ce ne sont plus des enfants mais des futurs adultes qui deviendront peut-être de futurs parents à leur tour.
J'ai peur de la réaction de mes parents. Je ne les crains pas mais je pense que j'ai peur de leur faire de la peine ou les décevoir. Ils m'estiment beaucoup et je veux les rendre fiers. Mais comme tous parents, ils sont quelquefois trop protecteurs ou possessifs. Personne n'est parfait. Je veux y aller en douceur, pour ne pas leur faire de mal, arracher le pansement progressivement. Je veux leur parler de mon souhait de prendre un appartement plus proche de la fac, mais je n'arrive pas à me lancer.
Quand je formule la phrase dans ma tête, je ne parviens pas à sortir un seul mot. Je reste figée à table pendant que nous regardons la télévision. Ils discutent entre eux, ou pas. Je reste là à regarder dans le vide, à me détester de ne pas y arriver. Ce n'est pourtant pas si compliqué ? Une fois de plus je me tais, je finis de manger, j'avale ma colère et je vais me coucher.
Lorsque mes parents reviennent d'un voyage en Martinique, je trouve le courage d'en parler à mon père puis à ma mère. Cela a fait un choc à mon papa car il sera seul le soir en attendant ma maman qui a des horaires de travail décalés. Ma mère a mal réagi. Elle est montée sur ses grands chevaux et s'est braquée. Sa fille unique ? S'en aller ? Jamais ! Frustrée qu'elle réagisse ainsi, je me braque aussi et je vais engloutir ma tristesse dans ma chambre, avant de crouler sous la fatigue.
Mon année est rythmée par les entraînements et les compétitions de twirling bâton, comme tous les ans depuis plusieurs années maintenant. Cette année mon club migre dans la ville d'à côté, un club change de direction. Nous nous lions en quelque sorte.
Je me mets en tête de trouver un travail étudiant, un petit contrat en contrepartie de mes études, tous les étudiants font ça maintenant. Je postule dans tous les cinémas bien sûr, mais pas de réponses, je postule également dans les magasins mais pas de repose non plus, je finis par postuler au McDo. Ikea me rappelle, je suis retenue pour un contrat de quinze heures.
Mon indépendance financière est là. Je cherche maintenant un appartement. Je fais les visites et le dossier seule. Sur mon premier coup de cœur je suis refusée puisqu'un dossier d'étudiante est bancal, mais je finis par découvrir ce que je trouve être la perle rare. Avec le recul, je vais me rendre compte que j'ai idéalisé ce lieu qui incarnait l'indépendance. À sept minutes à pied de la fac et à trois minutes à pied de chez une camarade. Clés en main, je profite de mon nouveau petit cocon. Je suis fière de ce que j'ai accompli. C'est peut être modeste me direz vous, mais je m'en fiche. Je me sens bien dans cet endroit, même si internet a mis un mois et demi à arriver.
VOUS LISEZ
Et pourtant
RomanceEloïse n'a que vingt ans lorsqu'elle s'enferme sans s'en rendre compte dans une relation toxique avec une perverse narcissique. Progressivement elle dépersonnalise et se laisse mourir car elle ne supporte plus les violences. Cette relation fini par...