Je sors de cet immeuble blanc la tête baissée et les épaules lourdes. Il pleut toujours autant et rien ne sera de nouveau comme avant. Je pleure à chaudes larmes et je me dépêche de monter dans la voiture. Il est dix heures et demi et je crois bien que j'ai réussi. Je suis enfin libre et déchargée de toute cette douleur qui pesait tellement lourd sur mon cœur. Plus de nausées ni d'étourdissements plus de hauts de cœur ni de vomissements. Plus rien de tout cela. Juste ma mère et moi.
Elle m'emmène chez le médecin et patiente dans la voiture. Elle a cette faculté de pouvoir attendre autant que vous voudrez, c'est fascinant. Je ressors de mon rendez-vous avec des antidépresseurs et des calmants pour m'endormir.
Maman me ramène à la maison et Loïc est déjà en chemin. Je ne sais plus depuis combien de temps je n'ai pas vu ma soeur et mon beau frère mais bien trop longtemps à mon goût. Nous décidons dans l'après-midi d'aller, mon beau-frère et moi, dans mon appartement pour faire le tri des affaires à te redonner. Lorsque nous nous garons sur le bas-côté, j'ai comme une sensation étrange, comme l'impression d'être observée.
Nous voilà dans les escaliers et un souvenir me revient, impossible de le mettre de côté. Je revois la tête du voisin passer dans l'embrasure de la porte après une dispute mouvementée. Je revois tes bras sur ma tête, tenant mes cheveux noirs afin de me retenir dans ma descente. Je t'entends me crier dessus silencieusement et me menacer de partir si je ne changeais pas. Changer quoi ? La façon que j'ai d'être moi ? Certainement pas ! Je te revois me gifler et me supplier de faire de même sinon tu ne pourrais te le pardonner. Et je me revois acquiescer puis m'exécuter.
Je ne sais pas quand la tendance s'est inversée ni quand j'ai commencé à espérer que tu ne partes, que je sois seule ; mais finalement je suis là et tu ne l'es pas.
« L'amour ne cogne pas le cœur » j'ai lu un jour. Cette phrase m'a toujours marqué. L'amour nous frappe tel la foudre, un jour on se sent chanceux et sans l'avoir remarqué, on finit par se faire frapper tout court. Toujours par amour.
À la fin, comment ne pas penser que je suis la méchante ? C'est vrai, je t'ai frappé moi aussi. Je t'ai rendu la pareille lorsque tu m'as suppliée et rien ne pourra m'en excuser. Mais n'y a-il pas là une sorte d'abus de pouvoir ? Un ascendant physique qui expliquerait la peur que je ressens dans ces moments-là ? J'ai sérieusement peur de me faire dessus lorsque tu me bats alors je suis prête à tout pour ne pas te contrarier.
« Heureux ceux qui pleurent car ils seront consolés. » Ceci est un de mes versets préférés de la Bible. C'est la seule phrase qui caractérise si bien - à mon humble avis - l'espoir. Même dans les moments les plus sombres, quand tout n'est qu'ombre, je garde mes prières les plus sincères pour moi. Je les récite dans ma tête avant de dormir. Au moins ça, tu ne me l'as pas volé.
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Et pourtant
RomanceEloïse n'a que vingt ans lorsqu'elle s'enferme sans s'en rendre compte dans une relation toxique avec une perverse narcissique. Progressivement elle dépersonnalise et se laisse mourir car elle ne supporte plus les violences. Cette relation fini par...