De l'addiction
Si on s'arrête à la première partie du récit, on pourrait croire que je suis devenu totalement anti cannabis. Eh bien non. En fait, je dois bien vous le dire, il m'arrive encore de fumer un pétard épisodiquement, même si ça devient de plus en plus rare au fil du temps. Je suis même d'ailleurs partisan de la légalisation du cannabis.
Le cannabis est une plante et peut être utilisée de bien des manières. Elle soigne des tas de maladies ou les soulage. Rassurez-vous, je ne vais pas vous faire tout un exposé sur l'herbe, ce n'est pas le but de mon récit. Le problème n'est donc pas la plante en soi, mais bien l'usage que l'on en fait. Fumer comme je l'ai fait, lorsque j'étais adolescent, était symptomatique de mon mal-être, et ne m'a aidé en rien, bien au contraire. En consommant de cette manière, on se voile la face. On dit que ça soulage la douleur, mais on ne fait que postposer ses problèmes qui continuent à s'accumuler.
Lorsqu'on dit que le cannabis ne crée aucune dépendance, là aussi je dois dire que mon avis est mitigé. Je pense que cela dépend de la psychologie de la personne qui en consomme. Dans mon cas, oui, j'ai eu des crises de manque. Pas comparable à quelqu'un dépendant d'héroïne ou d'autres drogues dures, mais plus comme la cigarette. Chaque fois que je consommais énormément pendant un grande période, la première semaine était infernale : le corps est habitué à recevoir une substance qu'il n'a plus. Et chaque fois, pendant une semaine, je ressentais des difficultés à dormir, j'étais extrêmement irritable, je me réveillais en sueur. Mais au bout d'une semaine tout rentrait dans l'ordre. Je ne suis pas le seul dans ce cas : plusieurs amis qui fumaient quotidiennement ont vécu le même phénomène.
Pour le psychologique, je dirais qu'il y a une légère dépendance. Bien sûr, je parle de mon cas personnel, et je pense que cela dépendra d'une personne à l'autre. Il m'arrive encore maintenant, même après plusieurs années, lorsque j'ai un coup dur, que je ne me sens pas très bien, d'avoir une envie énorme de fumer. Cette envie est telle que ça me cause une poussée d'anxiété et que j'ai du mal à penser à autre chose. Généralement, ça passe au bout de quelques heures.
Comme je le disais, il m'arrive encore de fumer de temps en temps. Mais mon rapport est tout autre. Je fume avec des copains, comme si j'allais boire un verre, et on passe un bon moment. Jamais je ne pourrais fumer comme avant, être dans les vapes en permanence. Je veux être au taquet, comme on dit, et ressentir les choses sans avoir l'esprit altéré. Et puis, il y a mon fils. J'ai envie de profiter un maximum des moments que je passe avec lui, en étant juste moi-même.
Il y a cependant d'autres raisons qui me font fumer quelques soirs d'affilée. Lorsque je suis très tendu, crispé, il m'arrive que les muscles de mon dos se coincent. Dans ces cas-là, je préfère fumer un bon pétard le soir. Car c'est un excellent décontractant musculaire. Je préfère cette solution aux médicaments.
Cette partie est consacrée à l'addiction. Simplement, car le cannabis n'est pas la seule drogue que j'ai prise. Mais seulement, dans la tête des gens, lorsqu'on est sous médication, que ces médocs sont prescrits par un toubib, on ne fait pas l'amalgame.
'ai donc clairement été toxicomane. Le Temesta est un calmant très puissant, faisant partie de la famille des benzodiazépines. Ces médicaments provoquent de graves dépendances. Il m'a fallu des années pour m'en défaire. Et on replonge très vite. En 2009, lorsque j'ai eu mon burn-out où j'ai tout envoyé valser, mon médecin traitant m'avais remis sous Temesta. J'ai tenu deux semaines : la première consultation, j'avais refusé l'ordonnance. J'avais trop peur de retomber dedans. Mais mes crises d'angoisse ne faisaient qu'empirer. Lorsque je retournai voir la toubib, elle insista pour que je reprenne ce médoc.
Il me fut impossible de m'en défaire. J'étais à nouveau à 4 ou 5 comprimés par jour. Ce n'est qu'une bonne année et demie plus tard que je réussis à arrêter totalement. Ma compagne et moi déménagions et changions de cadre de vie. Comme j'étais vanné par les efforts physiques du déménagement, j'en profitai pour m'en passer. Je n'en ai plus repris depuis, mais l'année suivante, suite à un très gros stress, je m'étais coincé le dos. Impossible de bouger correctement. À l'hosto, le médecin ne trouva rien de mieux que de me donner du Myolastan, un décontractant musculaire de la même famille de médicaments. J'étais vert. Je me suis alors tourné vers le seul décontractant que je connaissais qui ne m'avait pas autant rongé que ces merdes : le cannabis.
Je n'ai plus touché un seul médoc depuis cette aventure, en 2011. Je cherche systématiquement des produits naturels aux bobos, rhumes et autres. Je ne suis même plus retourné chez un médecin traitant (bon, je n'en ai pas réellement eu besoin non plus, de toute manière).
Pourtant, je remarque beaucoup, sur les réseaux sociaux entre autre, que le cannabis a toujours mauvaise presse. Le bashing dont il a été l'objet pendant des décennies par les gouvernements et la presse, ont rendu la population méfiante envers une simple plante. A contrario, les campagnes de sensibilisation de toujours les mêmes acteurs avec les lobbys pharmaceutiques, rendent normales et acceptables les dépendances aux médicaments. A croire que, lorsque la télévision annonce quelque chose et le ressasse sans cesse, la population perd tout sens critique et ne cherche pas à se renseigner plus.
Pour illustrer cet exemple, je voudrais parler d'une autre de mes expériences. Ma mère est une de mes confidentes, elle a toujours été là pour moi. Lorsque j'étais à Cardijn, je n'ai pas caché que j'avais recommencé à fumer. Elle a totalement paniqué. Elle avait peur que je refasse un méga plongeon dans l'enfer que j'avais vécu durant mon adolescence. J'ai tenté de la rassurer. Je lui expliquais que tout allait bien, qu'elle n'avait pas de mouron à se faire. Mes mots n'arrivaient cependant pas à l'apaiser. Mais durant cette période, on commençait à parler de changer la loi en Belgique, en faisant passer le cannabis comme « infraction mineure ». Cela provoquait un sentiment de panique chez bien des adultes. Un journaliste belge avait écrit un livre sur le sujet, le cannabis étant très populaire chez les jeunes. Je lui fis donc lire « le cannabis expliqué aux parents ». Tout était bien expliqué en détails. Ma mère était déjà plus rassurée. Et lorsqu'elle vit que je ne faisais plus aucune connerie, elle comprit bien que le cannabis n'était qu'un symptôme et non une cause de mes problèmes.
Je terminerai juste ce petit paragraphe par un peu de moralisation (il risque d'en avoir encore un peu dans les prochains sujets) : gardez l'esprit critique. Avant de paniquer sur le cannabis, renseignez-vous, lisez. Contentez-vous de plusieurs points de vue, et regardez les études scientifiques sur cette problématique. Comme pour presque tout, vous vous rendrez compte que ce n'est pas une consommation normale qui pose problème, c'est juste l'abus. Vous aimez boire votre petit verre de vin de temps en temps, ça ne fait pas de vous un alcoolique pour autant, non ?
Pour les jeunes qui me liraient, je voudrais juste dire une chose : ne vous enfermez pas si vous vous sentez mal. Parlez (voir le chapitre qui traite de ce sujet). Mais ne vous réfugiez en aucun cas dans l'herbe ou autre chose si vous vous sentez mal. Parce que j'ai encore eu de la chance, j'aurais encore pu plus mal tourner. Parlez, et si vos vieux vous semblent ringards, incapables de comprendre, prenez quelqu'un avec qui vous avez plus de distance.
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Salut, moi c'est Greg [édité chez Atramenta]
No FicciónEst-ce que cette histoire vaut la peine d'être racontée ? Honnêtement, je n'en sais rien. Pendant des années, je pensais que ce que j'avais traversé faisait de moi quelqu'un d'extraordinaire, d'avoir une histoire hors du commun et qu'il fallait que...