Vivre avec des regrets
Je me suis régulièrement demandé comment serait ma vie si j'avais eu mon diplôme de secondaire, si j'avais lutté différemment contre ma dépression et mes angoisses. Si j'avais pris un autre chemin, terminé mes études d'AS. De me dire que la vie aurait été plus facile si je n'avais pas baissé les bras à un tel moment de la vie.
On peut vite en arriver à vivre avec des regrets. Les regrets, c'est comme cette colère, ces ressentiments qu'on enfouit au fond de soi, comme je l'ai expliqué précédemment. Ils nous bousillent de l'intérieur. Je tente de les chasser le plus possible.
Lorsque je bossais, j'étais relativement fier de mon vécu. Fier dans le sens, d'avoir été si bas dans ma vie et d'avoir remonté la pente tout seul, d'être arrivé comme technicien informatique sans avoir le moindre diplôme. D'être arrivé là par moi-même, sans piston.
Mon état d'esprit a changé depuis. Depuis, je pense que je suis un ado comme un autre, certes plus sensible, qui a peut-être fait des mauvais choix dans sa vie. Quand j'ai quitté mon emploi, je me suis dit que dès que je sortirais de mon burn-out, que je serais reposé, je retrouverais vite un job. J'ai vite déchanté. Lorsque j'ai une réponse, généralement, on me pointe mon absence de diplôme. Dans ces grands moments de découragement, j'en viens à regretter de ne pas avoir terminé mes études. Et si je ne chasse pas ces pensées, des idées noires, plus malsaines arrivent vite à prendre le dessus. C'est pourquoi je chasse toutes ces idées dès qu'elles ont tendance à vouloir prendre le dessus.
Je reste convaincu qu'un diplôme ne fait pas un homme. Le problème, c'est que la société ne pense pas comme cela. On juge la capacité d'un homme sur un bout de papier, et non sur sa volonté, son vécu, et ce pour quoi il se bat. Pour moi, c'est pourtant cela le plus important. Ce n'est pas un job, une fonction, un salaire qui définit une personne. C'est ce qui le fait vibrer, ce qu'il sème autour de lui.
Je n'ai pas à rougir de mon parcours. Il est différent de beaucoup de monde, certes. Mais dans un sens, c'est ce qui rend notre monde si riche. Des tas de vécus, d'expériences différentes. Avec mon histoire, je peux apporter mon point de vue à d'autres, des choses qu'on n'apprend pas sur les bancs de l'école ou de l'université. Et si j'arrive à faire réfléchir quelqu'un sur un sujet donné, c'est déjà ça de gagné. Tout comme un universitaire, par son savoir peut m'apporter des précisions, sur un sujet que je connais moins bien.
Ne pas regretter. Apprendre de son vécu et de son passé. Éviter de commettre les mêmes erreurs. Car après tout, la vie n'est qu'un moment d'apprentissage.
Ne pas oublier qui on est, d'où on vient et vivre ses rêves
Plusieurs personnes m'ont dit que j'étais cinglé de publier cette histoire, surtout que je suis en pleine recherche d'emploi. Ma compagne, qui d'habitude me soutient, m'a annoncé qu'elle ne partagerait pas mes morceaux d'histoire pour éviter qu'elle n'arrive chez un recruteur potentiel.
C'est peut-être cela le gros problème de notre société, dans le tout numérique. Nous ne pouvons plus être nous-même, dans une société où le paraître est devenu le maître-mot. Nous devons correspondre à une certaine image imposée par une société devenue superficielle. Lors de séances de coaching pour de la recherche d'emploi, on nous apprend à nous vendre, à donner cette image recherchée. On nous conseille de cacher nos aspirations, nos moments de vie, pour éviter de refroidir l'employeur. Apprendre à se vendre, comme si un être humain n'était devenu qu'une simple marchandise, un bien que l'on peut jeter, remplacer à souhait.
Peut-être que je me ferme des portes, que cette histoire, peut refroidir un futur employeur. Mais j'ai simplement décidé de rester moi-même, de ne pas paraître. Dans cette société ou la superficialité est devenue la norme, nous oublions qui nous sommes, ce que nous étions enfants ou adolescents pour correspondre à un moule. On a mis nos rêves de côté pour pouvoir simplement vivre. Maintenant, étant adultes, nous perdons notre vie à la gagner.
Je n'ai pas oublié l'adolescent qui était en moi. Ce petit gars rêveur, qui aspirait au bonheur, à une société meilleure. Pourtant, pendant des années, je l'ai enfermé à double tour au plus profond de mon cœur, pour être comme les autres, pour être conforme à ce que la société attendait de moi. Et en 2009, il a tambouriné si fort que je m'en suis senti mal. Je me suis rendu compte que ce que je faisais n'était pas la vie à laquelle j'aspirais. Que j'avais perdu mon temps, que j'avais mis mes rêves de côté. Il m'a fallu cependant attendre encore un bon bout de temps avant que j'accepte que cette partie de moi vienne me ré-habiter.
Durant quatre ans, je me suis à nouveau cherché. Je savais ce que je ne voulais plus : un travail qui ne sert à rien. Il m'a fallu quatre ans pour que ce rêve revienne me hanter : écrire. Je réalise dès à présent mon rêve. Pas comme je l'entendais étant ado, je ne suis pas un écrivain renommé et je n'enseigne pas les lettres à l'université, mais j'écris. Je partage ce que je fais. Certes, ce n'est pas facile tous les jours. Je cherche un job en même temps, car je ne veux pas que mon fils manque à quoi que ce soit. Je ne veux pas être une copie de mon père qui a mis à un moment donné le confort de ses enfants de côté pour réaliser son rêve de business en Afrique. Mais je continue de rêver. De rêver que cette société change, qu'elle redevienne plus humaine. Je me bats pour cela. Parce que je veux laisser un monde meilleur à mes enfants. Pour qu'eux aussi, puissent réaliser leurs désirs et leurs rêves les plus fous.
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Salut, moi c'est Greg [édité chez Atramenta]
Non-FictionEst-ce que cette histoire vaut la peine d'être racontée ? Honnêtement, je n'en sais rien. Pendant des années, je pensais que ce que j'avais traversé faisait de moi quelqu'un d'extraordinaire, d'avoir une histoire hors du commun et qu'il fallait que...