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Hayleen

Je lâche un profond soupir en rangeant ma moto dans le fond du garage. Garage rempli de voitures qui valent chacune le prix d'une villa sur front de mer.

Y'en a qui ne se font pas chier...

Je secoue la tête d'exaspération en accrochant mon casque au guidon de ma Harley. Je passe ensuite la porte qui conduit au reste de la maison, tout semble bien calme.

Et c'est louche. Nikolaï est parti tôt du Red Light, il devrait déjà être rentré. Je ne l'ai revu que quand il est passé nous voir pour nous prévenir qu'il partait. Il m'a assuré qu'il serait là quand je rentrerais.

Je ne vais pas me plaindre, au moins je ne l'ai pas dans les pattes.

Après mon léger moment de faiblesse, je suis restée avec Keida, qui m'a épargné les questions gênantes, pour mon plus grand bonheur. Au point que j'en suis venue à demander si ce genre de scène n'était pas récurrente. S'il ne se tapait pas des femmes au milieu de la boîte de manière régulière. À cette simple idée, une jalousie sournoise s'empare de mes veines et porte mon sang à ébullition. Pour une raison qui m'échappe, je n'aime pas l'imaginer avec une autre que moi. Me dire qu'une autre ait pu ressentir du plaisir sous ses doigts me fout en boule. Et ce détail m'énerve encore plus.

Je monte avec lenteur le grand escalier de verre pour rejoindre ma chambre, éreintée par ma journée. Elle n'a pas été très fatigante, mais Keida m'a montré tant de choses, que j'ai cru que ma tête allait exploser. Je dois gérer à la fois le Red Light et les trafics que ce dernier camoufle. Le tout en me servant d'un nombre incalculable d'applications différentes, toutes plus protégées les unes que les autres, chacune par des mots de passe différents – que je dois bien évidemment garder en mémoire, interdiction de les noter.

Je fouille dans les tiroirs de ma commode pour sortir des sous-vêtements propres ainsi qu'un jogging et un sweat à capuche. Puis je traîne les pieds jusqu'à ma salle de bains, et ouvre le robinet après avoir bouché la baignoire.

Je lorgne d'un œil critique les flacons qui s'étalent sur le bord de la baignoire, à la recherche du gel moussant parfait. Oui, du haut de mes vingt-quatre ans, je veux des bulles dans mon bain. Je finis par opter pour un savon à la vanille, dont je vide presque la moitié dans l'eau fumante. L'odeur sucrée emplit mes narines pendant que je me déshabille.

Puis je pose mes yeux sur le reflet de mon corps pâle dans le miroir. Je me crispe en toisant d'un air sévère la femme en face de moi. La petite brune qui a subi plus qu'elle n'aurait dû alors qu'elle n'avait que sept ans. Alors qu'elle n'avait que quatorze ans.

Alors qu'elle n'avait que dix-huit ans.

Alors qu'elle n'était qu'un pari.

Un putain de défi entre potes.

Mes narines se dilatent sous l'effet de la rage, à l'instar de mes pupilles qui me dévisagent avec dégoût. Je décide enfin de détourner le regard pour me diriger vers la baignoire. Je m'assois dans l'eau chaude en refoulant mes souvenirs, mes sanglots, et mes envies de meurtre.

Plusieurs années se sont écoulées, et pourtant...

On pourrait croire que j'ai tourné la page. Mais non, c'est toujours aussi douloureux.

On pourrait croire que j'ai appris de mes erreurs. Mais non, je retombe encore et encore dans son piège.

Cet homme à qui j'avais donné mon corps par amour, et qui l'a pris par défi.

Cet homme qui soi-disant veut se racheter, et qui malgré mes craintes, semble sincèrement prêt à m'aider à garder la tête hors de l'eau.

La petite voix dans mon crâne me crie encore et encore qu'il joue avec moi, que je dois ouvrir les yeux avant qu'il ne soit trop tard. Que je dois retourner son jeu tordu contre lui.

Red Light - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant