Lente reconstruction

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Deux semaines ont passé depuis la diffusion de l'annonce et aucun commerçant ne m'a contacté. Je commence à désespérer. La haute saison va commencer et je n'ai pas du tout la motivation nécessaire pour gérer tout ce qui est à venir. 

Elisabeth et Jean travaillaient main dans la main, ils se complétaient. Ils adoraient passer des heures à conseiller les touristes sur les activités locales, à évoquer l'histoire du village. Ils vouaient une réelle passion aux relations humaines. 

Je suis tellement différente. Je me force à sourire et à être aimable. Depuis que j'ai pris la décision de céder le commerce c'est encore pire qu'avant. Ouvrir les portes le matin est devenu un calvaire. 

Mes seuls moments de plaisir sont ceux que je passe en ligne avec Estelle et avec Samuel.

Depuis hier j'ai regagné mon appartement. Je n'ai pas envie de m'installer chez lui. Tout se passe bien entre nous mais je préfère garder une certaine distance. 

Dès que Gabriel est venu me rejoindre au commerce j'ai senti que je n'étais pas prête pour la vie conjugale. Samuel le comprend très bien et il souhaite aussi avancer doucement. La cicatrice de la perte de sa fiancée n'est pas encore complètement refermée et malgré ses sentiments pour moi il ne veut pas se précipiter. 

Nous nous voyons plusieurs fois par semaine lorsque nous en avons envie. Samuel s'est lié d'amitié avec des collègues professeurs et passe du temps avec eux. De mon côté je n'ai personne. Je me renferme sur mon piano et sur la composition de nouveaux morceaux.

Ce soir j'ai rendez-vous avec Estelle en visio.

- Bouge-toi Charline ! Tu ne peux pas vivre comme un ermite ! Essaie de faire la connaissance des collègues de Samuel ou inscris toi à une activité. Tu ne peux pas rester seule c'est trop triste.

- Tu me connais je n'ai pas ce grand besoin de vie sociale comme la plupart des gens.

- C'est malsain. Promets-moi que tu vas faire un effort ?

- Je suis à fond là, je suis en ligne avec toi.

- Je ne peux pas être ta seule ressource, je suis à des milliers de kilomètres je te rappelle.

- Oui je sais. Je vais bien ne t'en fais pas. Je ne pleure plus tous les jours, je remange, je joue du piano tous les après-midis et je fais l'amour !

- Oh ça va prétentieuse...Moi c'est le néant ici. Heureusement que j'ai ramené mon petit compagnon de poche.

- C'est le monde à l'envers Estelle, ressaisis-toi. Promets-moi que tu vas faire un effort ?

Nous pouffons, hilares pendant de longues minutes. Evidemment une Estelle célibataire et une Charline qui enchaîne deux histoires d'amour à quelques jours d'intervalle c'est véritablement le monde à l'envers. La vie est décidément pleine de surprises.

- Sinon plus sérieusement tu as eu des nouvelles de Sacha ou Gabriel ?

- Charline...

- Tu peux tout me dire. Je suis prête à tout entendre et je ne te demanderai pas de prendre parti.

- J'ai déjà pris parti. Ils ont essayé de m'embrouiller mais je serai toujours de ton côté.

- Comment peuvent-ils réagir ainsi après toutes ces années ? J'ai l'impression d'être devenue une inconnue en quelques jours. On aurait pu discuter tranquillement, apaiser nos relations.

- Tu sais Charline ils te mettaient tous les deux sur un piédestal, tous en réalité. Tout le village t'a toujours considéré comme une petite fleur à protéger mais tu es une humaine comme le reste d'entre nous. Il t'a suffi d'une seule erreur pour ruiner ta réputation.

Les délices de CharlineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant