🧪Chapitre 22 : Délire de poison🧪

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Ma révélation plane dans l'air et le temps semble s'être figé. Caïo ne bouge plus, je n'ose même pas esquisser un geste, mes iris restent figés sur ce goret vide. Après de lourdes inspirations, je le bouscule, m'extirpant de sa prise. Essoufflée comme si j'avais couru un marathon, mes paumes reposent sur mes genoux. Mon corps frémit d'avoir avoué ce que je pensais garder pour moi.
   
— Tu fais tout foirer.
— Tu n'aurais rien dû dire.
   
Des douleurs percent mes tempes, tout devient insupportable. Caïo attrape mes épaules, m'obligeant à me redresser.
    
— J'en étais sûr... Depuis le début, à vrai dire. Tu voulais le tuer ? m'interroge-t-il, son sérieux me retournant l'estomac.
   
Je secoue négativement la tête.
   
— Je... n'arrivais pas à aller jusqu'au bout, avoué-je à bout de souffle.
   
Derrière son expression froide, je perçois un léger sourire. Il range son arme et pose une main propre sur ma pommette, me sondant avec une certaine appétence qui me fige. Tout mon corps me pousse à fuir, néanmoins, l'aura sombre qu'il dégage attire mon âme et m'interdit de bouger. La noirceur, résidant au fin fond de mon organe vital est titillée par la sienne, visible à des kilomètres.
   
— Comment est-ce que tu as procédé ? s'intéresse-t-il avec fascination.
— Il m'arrivait de mettre quelques microgrammes de Gloriosa superba dans son café. Si j'augmentais la dose, il pouvait mourir dans les heures qui suivaient, mais je préférais que son état de santé se dégrade, qu'il souffre, vomisse jusqu'à ne plus rien supporter.
— Tu parles de la lis de flamme ?
   
J'acquiesce tout en le repoussant. Son bras retombe le long de son corps et j'ajoute :
   
— En cas d'ingestion, elle peut provoquer des troubles digestifs, une forte déshydratation, des problèmes artérielle et d'autres atteintes plus graves encore.
Diabolicà, ça me plaît.
Diabolique.

Sa voix roule sur ma peau et je m'éloigne de lui. Son influence est toxique pour ma propre santé. Il exacerbe mes vices et encourage mes pires instincts. Mes iris se portent sur la scène qui nous fait face, l'hémoglobine incrustée dans ma peau. Je fixe le bistouri, mes pensées prenant l'ascendant sur ma maîtrise. Tel un aimant, la lame m'invite à la rejoindre.

— Venge-toi... chantonne encore et encore la voix de ma mère.

Je dodeline de la tête afin de m'ôter les scènes que j'imagine dans mon esprit. Un toucher puissant me fait revenir à la réalité et on me tire jusqu'au lavabo au coin de la pièce.
   
— J'aurais préféré que ce soit toi qui l'aies assassiné, grince Caïo en mouillant nos mains sales, ç'aurait facilité les choses.
— Comme ça t'aurais pu me tuer ?
— T'es consciente que je n'y serai pas arrivé.
   
L'air se fraie difficilement un chemin jusqu'à mes poumons. J'ai la sensation d'être perdue, de ne plus savoir où je suis ou ce que je fais. Les vertiges reprennent, toutefois, le massage de mon garde du corps sur des points précis de ma paume me ramènent à lui. Je ne peux m'empêcher de loucher sur sa main remplie de savon. Quelques traits noirs sont apparents, les autres sont cachés par la mousse. Mon ventre s'entortille d'une drôle de façon à la vue des veines sur son avant-bras.
   
— Pourquoi tu penses que ce n'est pas moi ? m'intéressé-je.
— Je te l'ai dit : on a retrouvé des traces de poison, ce n'est pas pour autant qu'il est mort à cause de ça. Ce que tu lui donnais aurait sûrement provoqué un arrêt. Ce qu'il n'a pas eu, car son cœur n'était plus présent, plus aucun de ses...
— Organes ne l'étaient, terminé-je à sa place, concentrée sur ses caresses magiques qui me rassurent plus que je ne l'aurais imaginé.
   
Lorsqu'il cesse ses gestes, mes pulsations redeviennent régulières. L'attention qu'il me porte colore mes joues, alors mon regard se concentre ailleurs et tombe directement sur l'animal en pièces.
   
— Je ne t'ai pas obligée à le vider seulement pour te punir de ça et d'être sortie en douce hier soir sans me demander, admet Caïo en m'essuyant sans me laisser la possibilité de le faire moi-même.

DélariaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant