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Elle parcourait les couloirs du palais d'un pas hâtif. Son Maître l'avait appelé, il lui avait fait savoir que l'Impératrice désirait la rencontrer. Cela faisait plusieurs jours qu'elle se demandait quand l'entrevue aurait lieu, dans une attente mêlée d'inquiétude, et elle avait enfin été convoquée. Pour cette occasion, elle avait revêtu une longue robe sablier blanche et bleue en accord avec ses bijoux de saphir qui rappelaient la couleur de ses yeux. L'écho de ses ballerines résonnait avec légèreté autour d'elle, accompagné parfois du doux froissement de tissus.
Elle parvint en vue de la haute porte de bois peint. Les gardes la laissèrent passer et elle entra dans la grande salle claire qu'elle avait vue plusieurs fois. C'était une pièce de réception assez simple, presque vide à l'exception de l'espace près du trône. La jeune femme fit une révérence et demeura ainsi jusqu'à ce qu'une voix claire lui dise :
« Approche. »
Elle se releva et regarda devant elle. À quelques mètres, sa souveraine était assise sur un siège d'apparat sobre, réhaussé sur une petite estrade tendue de tissu marine. Elle était magnifique, vêtue d'une somptueuse robe argent et bleu nuit assortie de bijoux précieux, pendants d'oreilles finement ciselés, bracelet et collier incrustés de pierreries, et diadème fabriqué avec art. Ses longs cheveux ondulaient autour d'elle, son teint presque blanc renforçait son air froid, et cependant elle semblait proche comme si elle eût été une humaine normale. Le Neuvième Exécuteur se tenait devant, sur la droite de l'estrade, il se tourna vers son agent et lui fit un léger sourire pour l'inviter à suivre l'injonction. Lazuli s'avança, impressionnée mais attentive à ne pas commettre de faux pas. Une fois devant le trône, elle s'inclina de nouveau avant de croiser le regard impérial. Comme la dernière fois où l'Archon avait posé les yeux sur elle, il lui sembla distant, comme perdu dans une autre réalité. Toutefois, il avait l'air moins indifférent, et elle croyait discerner de la chaleur au fond de cet océan de bleu. La plus jeune ne pouvait s'empêcher d'admirer la beauté surnaturelle de cette femme à l'aura de sérénité parfaite.
La Tsarine prit la parole d'une voix dont la douceur surprit à nouveau Lazuli :
« On m'a dit que tu m'avais sauvée d'une tentative d'assassinat. Je tenais à te remercier.
- Je suis profondément honorée, Votre Majesté. À dire vrai, j'ai simplement pu le faire car j'accomplissais mon devoir.
- Je vois. »
L'Impératrice ne paraissait pas exprimer d'émotion particulière, et continua :
« Cela fait quelques temps que tu viens à la Cour et que tu accomplis les ordres de Pantalons, et j'ai entendu parler de toi ; j'avais envie de te rencontrer. »
Lazuli ne suit que répondre et jugea plus prudent d'attendre la suit. Intérieurement, elle se dit avec amusement que ''quelques temps'' n'était pas tout à fait exact, elle avait fait son entrée à la Cour une dizaine d'années auparavant et cela faisait cinq ans qu'elle était active pour le compte de son maître, mais pour les Archons qui vivaient des centaines d'années la perception du temps était différente. Sans qu'elle s'y attende, la Tsarine la questionna :
« Que fais-tu lors de tes missions ? »
Incertaine quant à ce qu'elle pouvait répondre, la jeune femme consulta Regrator du regard. Celui-ci inclina légèrement la tête pour lui confirmer qu'elle pouvait parler. Priant pour ne pas faire d'erreur, elle répondit :
« Eh bien, il y a toutes sortes de tâches. Cela peut être de l'espionnage, de la surveillance ou de la recherche d'information, ou... des éliminations.
- Je comprends. »
Inquiète, l'agent guetta sa réaction, mais la souveraine ne paraissait pas particulièrement scandalisée. Elle découvrit même un imperceptible sourire sur ses lèvres alors qu'elle reprenait :
« Tu sais donc te battre, on ne dirait pas, en te voyant, tu me fais penser à mes demoiselles de compagnie. Cela n'est pas étonnant que vous le teniez secret. Tu es devenue une figure familière à la Cour, et les autres se demandent qui tu es, tu n'as même pas un rang de noble. En souhaiterais-tu un ?
- Sans vouloir vous offenser, Votre Majesté, nul n'est besoin d'un titre pour servir l'État. »
Surprise, la Tsarine écarquilla les yeux un bref instant puis eut un léger rire.
« Voilà qui est bien déclaré. Pantalone peut être fier de toi. Et je suis rassurée de compter parmi mes défenseurs un agent aussi fidèle. Quant à toi, si jamais tu as une requête particulière à me faire, n'hésite pas à venir me trouver.
- Je vous en remercie, Votre Majesté. »
Lazuli exécuta une nouvelle révérence avec le sourire, sous le regard désormais amusé et bienveillant de la souveraine.

Lazuli - Cycle deuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant