L'avocat de Seattle

Prologue

Zoé

Je tente de rester positive malgré ma valise qui se cogne pour la troisième fois dans tout ce qu'elle trouve sur son chemin.

Les haut-parleurs du gigantesque hall vitré grésillent avant d'émettre un message.

Mesdames et messieurs, nous vous informons que le vol numéro 714 à destination de Seattle est maintenant prêt pour l'embarquement à la porte 13. Nous invitons tous les passagers voyageant sur ce vol à se présenter immédiatement à la porte d'embarquement...

J'ai décroché du discours qui résonne dans les enceintes de l'aéroport à partir du moment où j'ai récolté les informations nécessaires pour valider mon aller simple.

Paris - Seattle.

15 heures de vol.

Une correspondance à Amsterdam.

Mon dernier salaire envolé dans ce billet.

C'est avec un pincement au cœur que j'observe le sol français pour la dernière fois. Cette terre qui m'a accueilli durant les vingts sept premières années de ma vie et qui enveloppe tous mes souvenirs, les meilleurs comme les plus tristes. Je laisse derrière moi, mes peines, mon deuil, mes incertitudes mais aussi mes plus gros fous rires, mes amis et mes plus belles réussites.

Aujourd'hui, ma vie repars à zéro. C'est un nouveau départ et je compte bien vivre mon rêve américain à Seattle. Je fais ce voyage pour moi, pour vivre enfin mon rêve, quitte à changer de vie de l'autre côté de l'Atlantique.

*

17 heures plus tard,

Tout semble fonctionner pour le mieux depuis mon atterrissage. Le propriétaire de mon appartement m'attend sagement avant de tendre vers moi les clés. Conforme aux photos et en plein centre ville de Seattle, je ne pouvais pas souhaiter mieux. Heureusement, mes trois dernières années en tant qu'assistante juridique à Paris m'ont permis d'accumuler des économies confortables, sans quoi, jamais je n'aurais pu recommencer une vie ici.

Les murs sont d'un blanc fade, aucune décoration n'est accroché au mur. Il n'y a même pas de fausse plante pour égayer les lieux. Je vais devoir rendre mon nouveau foyer chaleureux. Heureusement que les meubles d'un gris moderne donnent un minimum d'allure à la pièce principale.

En attendant, je vais devoir me contenter de mon frigo vide dans la cuisine donnant sur le salon. Un petit couloir dessert une salle de bain reliée à une chambre. Je découvre avec plaisir qu'elle dispose d'un lit deux places. Un king size même.

Je dépose ma valise devant, la jugeant du regard.

— Toi, je t'ouvrirais plus tard.

J'aime la solitude. Elle ne m'a jamais rendu nostalgique ou morose mais la compagnie de mes amis va me manquer. Je ne me fais pas d'illusion, le décalage horaire et la distance va creuser un fossé entre nous jusqu'à ce que l'oublie s'imprègne dans nos relations. Mais je suis prête à vivre ce moment, rien ne pourra me faire regretter ce voyage.

Dorénavant, c'est moi, contre le reste du monde.

Mon ventre s'affirme et la fatigue me fait bailler. Le choix entre dormir et manger s'impose dans mon esprit mais bien vite, l'appel de la nourriture gagne le duel. Je n'ai rien mangé de ce qu'on me proposait dans l'avion. J'avais trop hâte de goûter à un plat typiquement américain, moi qui n'ai jamais mis les pieds dans cette nation.

La vue du 47e étage est imprenable. J'ai l'impression d'être en haut de ma tour et de pouvoir dominer la ville. Comme si j'étais la maîtresse qui règne sur les habitants de Seattle. D'ici, l'ambiance est calme. Je n'entends pas les bruits des voitures en contrebas, ce qui me change bien de mon appartement au premier étage que j'ai connu à deux pas du Sacré-Coeur.

Tout ici semble différent de ma vie en France.

C'est exactement le sentiment que j'étais venue chercher.

Nouveau lieu, nouvelle vie.