L'avocat de Seattle

Chapitre 21

Enzo

Autour de la table, en présence de mes deux petites sœurs, je devrais être le frère le plus heureux du monde. Pourtant, j'ai dû mal à sourire dès que l'on me parle. Mon esprit est ailleurs et je sais pertinemment qui est l'objet de ce comportement.

— Lorenzo ! Tu es avec nous ?

Je reviens à la réalité après m'être fait secouer par Luna. Les musiques de Noël en fond me parviennent à nouveau.

— Oui, je t'écoute.

Je me tourne vers ma petite sœur. Elle a tellement changé. Ses cheveux sont plus courts et d'une autre couleur. Elle porte une salopette noire et un bonnet de la même couleur sur la tête. Son style vestimentaire est la seule chose qui n'a pas changé. Ça et son caractère.

— Alors dis-moi de quoi Alessia et moi étions en train de parler ?

Je réfléchis quelques secondes pour trouver la réponse la plus probable.

— Vous vous questionnez sur comment la tour de Pise parvient encore à tenir debout malgré son inclinaison ?

Luna et Alessia lèvent les yeux au ciel au même instant. J'ai toujours aimé quand elles avaient des réactions à l'unisson.

— On a réglé cette question quand on avait 14 ans. Rappelle-toi, ont étaient sidérés de savoir qu'elle n'avait pas de super-pouvoir, intervient Alessia.

— Moi je crois toujours qu'elle cache un secret de ce genre, comme une prière du Pape pour qu'elle ne s'écroule jamais.

Alessia rit à la réponse de sa sœur avant de rejoindre Léonardo dans la cuisine pour préparer le dessert. Luna rapproche sa chaise de la mienne et s'approche de mon visage, me faisant comprendre que c'est l'heure des confessions.

— Alors, pourquoi mon frère préféré ne parvient pas à profiter de Noël alors qu'il dansait sur une chaise avant le dessert quand on était petit ?

— On a grandi et on a changé. Je suis fatigué par mon travail, voilà tout.

— Et tu es devenu grognon.

Toujours aussi insistante, Luna semble en avoir après moi.

— Je n'aime pas te voir comme ça. Tu ne sembles pas fatigué, tu me semble ... triste. Et le pire, c'est que ça ressemble à un chagrin d'amour.

Immédiatement, je relève le regard vers ma petite sœur. Suis-je si facilement à cerner pour mes proches ? Finalement, je ne suis peut-être pas si différent de Zoé sur ce point-là. Peut-être même qu'elle est parvenue à lire en moi aujourd'hui et qu'elle a pris peur en discernant l'envergure de mes sentiments pour elle. Je peux comprendre qu'elle ait pris peur, j'ai moi-même peur de ce que je suis en train d'éprouver.

— Oh mon dieu ! Tu vis vraiment un chagrin d'amour, s'exclame Luna en mettant une main sur sa bouche.

— Tais-toi.

— Quoi parce que Alessia n'est pas au courant ?

— Au courant de quoi ? débarque ma seconde petite sœur.

Je m'affaisse sur ma chaise, souhaitant disparaître sous la table. J'aimerais pouvoir disparaître de cette pièce.

Léo revient avec le gâteau et je me demande si l'un d'eux parviendrait à me rattraper si je courais maintenant pour sortir d'ici.

Je suis censé être celui qui porte les procès pourtant ce soir, j'ai l'impression d'en être l'accusé. Les trois personnes présentes dans cette pièce me regardent, attendant avec impatience que je lâche le morceau.