VI

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     Je referme mon ordinateur, prenant une profonde inspiration. Les paroles de Mr. Kim restent dans un coin de ma tête. Je suis toujours perdu dans mes pensées, mais je sens une légère lueur de soulagement d'avoir pu m'exprimer, dire ce que je pensais. Ce que j'avais sur le coeur depuis bien trop longtemps. Finalement, ce n'est pas si mal, un thérapeute.
Je me lève lentement et me dirige vers la cuisine pour me préparer une tasse de café. J'avale mes cachets au passage, il est déjà midi. Mais je n'ai pas faim. Je n'ai plus faim. je n'ai même pas manger le reste de jajangmyeon hier. Et puis, un café fer l'affaire.
Une fois celui-ci prêt, j'attrape mon ordinateur et mon téléphone, déterminé à suivre les conseils de Mr. Kim. Je traverse la maison jusqu'au petit salon du fond, où est aménagé un coin pour travailler sur ma musique. M'installant au bureau, je regarde les écrans et l'équipement qui m'entourent. Autant ne pas perdre une seconde et tenter de voir des améliorations le plus vite possible. Et Nam a raison, ainsi que Mr.Kim, je dois tenter d'écrire. J'aime faire de la musique, j'aime m'exprimer à travers celle-ci.

     Je prends une gorgée de café, savourant la chaleur et l'amertume qui me réveillent un peu plus. Puis, je pose mes doigts sur le clavier de l'ordinateur, ouvrant le logiciel de musique. Commencer à écrire. C'est ce que je dois faire.
Je connecte mon Mac à l'ordinateur fixe du bureau et mes anciennes prod apparaissent sur l'application. Je clique sur l'une d'elle, l'écoutant pour m'inspirer.
Je ferme les yeux un instant, laissant les souvenirs et les émotions me traverser. J'attrape un stylo et un bloc note posé sur la table. Je pose le stylo, prêt à écrire le premier mot, mais rien ne sort. Que dire? Qu'est ce que je veux exprimer?
Là tout de suite, ce serait une chanson d'adieu. L'envie de mourir est toujours bien présente. La pulsion de mort, comme le dit le thérapeute.
Alors vas-y. Ça peut être intéressant.
Le stylo glisse sur le papier, emporté par le désespoir, la tristesse, et la détresse. Mais aussi, l'abandon.

Oubliez-moi.
Je veux juste qu'on m'oublie.
L'histoire d'une seconde, ou bien d'une vie.
Disparaitre, disparaitre sans laisser de mot.
Et sans se retourner.
C'est tout ce que je désire.
J'ai connu des hauts.
J'ai gouté à la gloire et au succès.
À tout ce dont j'aurais pu rêver.
Je m'en suis délecter jusqu'à la dernière goutte.
J'ai connus des bas.
J'ai gouté au désespoir et à la haine.
À tout ce qui pouvait me hanter.
Et que reste-t-il aujourd'hui ?
What am I?
Suis-je légitime de tout ça?

   Ma main tremble sur le dernier point, créant un gribouille désagréable sur cette page blanche. Un long soupire sort de ma bouche. J'arrache la page du bloc note, la roule en boule et la jette à terre. Il faut que je me calme et que je respire.
C'était nul.
Tais toi.

Je soupire à nouveau et réouvre les yeux. Mes mains retournent sur mon clavier et ma souris, je sélectionne une autre prod. J'augmente le son à fond, les notes résonnant dans la pièce, m'enveloppant tout entier.
Penser à l'amour... le pardon, l'évolution.
  Je saisis à nouveau le stylo et commence à écrire sur cette nouvelle page blanche.

( ce qui va suivre est un texte de moi, enfin, que j'ai vraiment écrit pour moi il y a longtemps. Je l'ai un peu modifié pour que ça colle à l'histoire mais soyez indulgents svp)

C'est assez assez dur, non?
De se rendre compte de ce que l'on a, qu'on est là.
Que ce n'est pas un rêve.
Que c'est ce que l'on a, qu'on touche le bonheur du bout des doigts.
Je n'arrive pas à croire que c'est réel, tout ce que je me dis, c'est que ça ne l'est pas. Que vous ne l'êtes pas, que tu ne l'ai pas?
Que je ne le suis pas.
Et que ce n'est peut-être qu'éphémère.
Comment ça peut-être possible? Que tout ce que j'ai toujours voulu, ce dont j'ai toujours rêver, se trouve en vous, en moi. Et que j'y ai enfin droit.
Suis-je même assez bien pour eux? Pour toi?
Est-ce que je mérites cet amour aussi doux et simple après tout?

Je marque une pause, réfléchissant à quoi dire ensuite. Je sens les émotions grandirent en moi, mais ce ne sont peut-être pas les bonnes. Le stylo se remet en mouvement.

Je déteste ça, mais j'adore ça.
Je me déteste de m'autoriser d'être avec vous, avec toi.
Je ne vous mérites pas, je ne te mérites pas, et je le sais.
Je déteste devoir admettre que vous êtes bons, que tu es bon, pour moi.
Mais le suis-je pour vous, pour toi?
J'ai tellement reçu d'amour secondaire que je ne sais pas comment agir quand je reçois de l'amour sincère.

Une larme roule sur ma joue mais je ne m'arrête pas.

Je veux être tout ce que vous méritez, tout ce que tu mérites.
Parce que vous êtes tout ce dont j'ai besoin et c'est si dur de l'admettre.
Je n'arrive pas à me dire que c'est vrai. Que c'est possible.
Mais quand je suis seule, que vous n'êtes pas avec moi. Quand tu n'es pas avec moi.
Quand personne n'est là pour voir à quel point ça m'impacte et à quel point ça me tient à coeur.
Mon dieu que je vous aimes, que je t'aime. Tellement fort.
S'en ai presque violent.
S'en est violent.
Mais comment pourrais-je vous le laisser savoir? Te le laisser savoir?
Même une seconde.
J'en suis tellement gênée.
Est-ce que je le mérites après tout?
Est-ce que je vous mérites?
Te mérites?
Je n'ai pas envie que vous me détestiez, que tu me détestes.

Des gouttent s'écrasent sur le bloc note, à nouveau. Et plus violemment. Je pleure sans le vouloir. Comme si je me vidais. Mon visage reste normal, mais les larmes coulent, l'encre s'étend sur le papier. Mais je conclu quand même.

C'est assez dur comme ça, de se laisser aimer.

Mes émotions reprennent le dessus alors que je regarde cette moitié de page. Écrire d'une traite. Sans une seule rature. Yoongi dit que si on écrit si facilement qu'on ne fait même pas une faute ou une rature, c'est que nous savions déjà ce que nous allions écrire et que c'était ce que nous devions écrire. Que ça vient du plus profond de nous. Jin a rigolé, ce jour là, disant qu'il avait écrit une chanson comme ça. The Astronaut, mais qu'il n'y croyait pas du tout. Nous avons alors lu sa chanson, Sejin est tombé dessus, et elle est sortie. Et ça a fait un carton. Yoongi ne s'est pas gêné pour rappeler que sa théorie était donc la bonne. Et que la chanson de Jin en était la preuve vivante.

Je regarde la feuillle devant moi. Peut-être que sa théorie est la bonne, mais je viens d'écrire ma vérité toute nue. Vraiment toute nue. Et il est hors de question que quelqu'un lise ça un jour ou l'autre.
Je déchire à nouveau, roule en boule et la jette à terre. J'attrape la tasse de café fumant et boit.
La mission est plus compliquée que prévue.
Tu n'es juste plus fait pour ça.
Tais toi. Je retrouverai l'inspiration. D'une façon ou d'une autre.

Serendipity . P.JM.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant