You will never love me again

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[Fleetwood Mac]

Simon

Je vais tuer cette ordure de mes deux mains.

Ivre de rage, je pose mon smartphone sur le meuble de la cuisine en mode haut-parleur et attrape la balle antistress qu'Anthony m'a suggéré d'acheter. Je la serre fort. Très fort. Aussi fort que la fureur que je ressens. Elle explose entre mes doigts.

— Je viens chez toi.

Les mots fusent hors de ma bouche avec une détermination féroce. Je n'en peux plus. Je n'en peux plus de ces heures passées au téléphone sans la sentir, sans la respirer, sans la toucher.

Je veux la voir. Je dois la voir. Impossible de rester loin d'elle, surtout en la sachant dans un tel état de détresse. Quand je pense que ce connard a essayé de la faire passer pour une folle devant les flics...

Quel immonde fils de pute.

— Faustine Jourda nous l'a interdit.

Je grogne. J'en ai rien à foutre de Faustine Jourda, bordel !

— Anna, tu ne peux pas me demander de te laisser seule après l'épreuve que tu viens de vivre.

— Je suis forte, Simon, et...

— Je sais que tu es forte, la coupé-je avec fermeté. Tu n'as pas besoin de me prouver ton courage. Je le connais. Je l'ai éprouvé.

Un léger soupir retentit dans le combiné. Un soupir plein de lassitude, de douceur, de tendresse.

— On risque trop gros.

Son verdict est sans appel. J'en ai rien à foutre.

— À quoi je sers, Anna, si tu ne peux pas compter sur moi ? Si je ne peux pas t'enlacer quand tu traverses des moments difficiles ? S'il m'est refusé de te consoler lorsque tu vas mal ?

Si je n'ai pas la possibilité de te faire l'amour pour réparer les morceaux de toi brisés ?

— Tu n'as pas à me servir à quelque chose. Je t'aime pour ce que tu es.

Sa déclaration me touche. Profondément. Pourtant, ça ne suffit pas.

— Peut-être, Anna, mais moi, j'ai besoin de te soutenir. Laisse-moi faire, s'il te plaît.

Il est léger, mais je l'entends, ce petit blanc synonyme d'hésitation. Elle en a envie, elle aussi.

Alors j'insiste.

— Je mettrai une casquette avec un vieux blouson. Je peux même oser les lunettes de soleil dans la nuit noire. Et je viendrai en taxi. Je lui demanderai d'effectuer des détours et de me déposer à quelques mètres de ta rue.

Tout, je débite tout ce qui me passe par la tête dans l'espoir de la convaincre.

— Simon, je ne crois vraiment pas que ça soit une bonne idée...

Elle continue de refuser, mais son ton de voix trahit une certitude de plus en plus ténue.

— Je me ferai le plus discret possible. Je te le jure.

Anna ne dit rien. Je parviens presque à l'entendre cogiter. J'imagine aisément un angelot et un minuscule démon perchés sur ses épaules en train de se traiter de tous les noms.

— Je sais pas si c'est raisonnable...

— Je t'en prie, m'obstiné-je, dis-moi oui. Je te jure que je prendrai toutes les précautions nécessaires. Puis, on a besoin d'un break dans ce bordel. Juste un break.

A cœur perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant