Nothing else matters

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[Metallica]

Simon

So close, no matter how far

Couldn't be much more from the heart

Anthony m'observe, les yeux rougis par l'émotion. C'est la première fois que je le revois depuis le procès et j'ai passé une bonne partie de la séance à lui en narrer le déroulement.

— Elle l'a fait, chuchote-t-il, la voix enrouée, à la fin de mon récit.

— Oui. Tu avais raison, Tonio. Elle s'en est tirée.

Le visage en larmes de la journaliste à la sortie du palais de justice se rappelle brutalement à moi. Elle était belle, si belle, auréolée de sa victoire.

— Merci, ajouté-je d'un ton faible. Merci à toi de m'avoir incité à lui faire confiance.

Le psychiatre laisse échapper un sourire timide. Derrière ce rictus gêné, je devine à quel point mes mots le touchent. À quel point il a tremblé, lui aussi. À quel point il est soulagé que tout se soit bien terminé.

— Comment vous sentez-vous ?

Mes lèvres s'étirent en une moue amusée. L'ami ému a vite disparu au profit du thérapeute expérimenté.

— Eh bien, ça ne fait que cinq jours, mais le contrecoup annoncé par Faustine Jourda s'est bien installé. Heureusement, Anna continue de voir Xavier, qui l'aide à passer cette étape.

Conformément à nos nouvelles règles relationnelles, je n'interviens plus dans les soins de la jeune femme, me contentant de l'écouter si elle en ressent le besoin et de la soutenir le cas échéant.

— Il est évident que ça doit remuer plein de trucs en elle, approuve Anthony, sans compter les hormones qui s'effondrent. L'adrénaline, le cortisol... elle doit dormir, non ?

— Oui, énormément. John lui a filé un congé de deux semaines pour qu'elle se remette.

— Et Mina ?

— Elle n'est pas revenue. A priori, ça va se terminer par un abandon de poste.

— Je suppose que c'est une bonne chose.

J'acquiesce doucement. J'imagine aussi.

Forever trusting who we are

And nothing else matters

— Et toi, Simon ? Comment tu te sens ?

Je lâche un rire bref. Je m'attendais à cette question, je me suis même préparé à y répondre dans la salle d'attente. Étrangement, maintenant qu'il la pose, j'ignore quoi rétorquer

— Bien, finis-je par soupirer. Un peu frustré, comme Anna, de ne pas avoir eu le fin mot de l'affaire concernant Mina, mais nous n'allons pas lui courir après.

— Toutes les questions ne nécessitent pas forcément des réponses.

Je lève les yeux vers le plafond, légèrement irrité par cette réplique des plus sibyllines.

— Puis, surtout, on n'a pas vraiment envie de remuer cette merde. Nous aspirons à aller de l'avant.

— Aller de l'avant ? De quelle manière ?

— Nous n'en avons pas encore discuté, mais j'imagine bien un mariage. Et un... bébé.

Ce dernier mot, pourtant chuchoté, explose contre les murs du bureau.

Récemment, depuis qu'Anna et moi nous sommes retrouvés pour être exact, l'idée de fonder une famille s'est imposée dans ma tête. Je sais que nous sortons de mois difficiles et qu'il va nous falloir un moment avant de construire quelque chose de suffisamment solide pour envisager une telle aventure, mais je songe de plus en plus à lui en parler.

A cœur perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant