Oh, let's go back to the start

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[Coldplay]

Simon

— Rappelle-moi à quelle heure je dois passer te prendre demain matin ?

Je pose le smartphone sur ma commode et active le haut-parleur pour libérer mes deux mains. Il faut absolument que je termine cette foutue valise.

— 4h45, indiqué-je. Mon vol est prévu pour 6 heures à Charles de Gaulle.

Léna grogne en entendant ma réponse et je pince les lèvres pour m'empêcher de rire. Elle n'a jamais été très matinale, mais c'est la seule personne véhiculée de mon entourage disponible à une heure pareille.

Après la soirée au Sunrise, la belle avocate s'est montrée persévérante, pour ne pas dire butée, dans son désir de me revoir. J'ai fini par céder et accepter quelques cafés, en tout bien tout honneur.

— Je serai à l'heure, ne t'inquiète pas, soupire-t-elle. Tu pars combien de temps, déjà ?

Un rictus contrit barre mon visage. Sa demande n'a rien d'illégitime, toutefois, je reste sur mes gardes dès qu'elle s'aventure à me poser des questions personnelles. Pour le moment, je dois reconnaître que cette méfiance s'avère injustifiée. La jeune femme a respecté sa parole concernant notre nouvelle relation amicale. Non seulement elle n'exerce aucune pression pour que nos rencontres dévient vers autre chose, mais elle se montre à chaque fois douce, charmante, drôle.

— Je reviens deux jours après, en début de soirée.

— Tu veux que je passe te chercher ?

— Je m'en sortirai avec les transports en commun, je te remercie.

Un bref silence s'installe, durant lequel Léna semble hésiter à insister. Finalement, après un soupir las, elle se contente d'une réponse sobre.

— Très bien Simon, comme tu le souhaites.

Je hausse les sourcils, surpris qu'elle abandonne si vite la bataille. Cette nouvelle Léna se situe vraiment à l'opposé de celle avec qui je baisais.

— Si tu changes d'avis, appelle-moi ! ajoute-t-elle néanmoins.

— Ne t'inquiète pas à ce sujet, la rassuré-je en glissant deux pulls dans mon bagage.

— Promis ?

Un sourire faible éclaire mon visage devant cette sollicitude touchante.

— Juré. Bon, je dois terminer ma valise, on se voit demain ?

— Ouais. Je serais la nana avec des cernes et le regard mauvais.

Je raccroche dans un rire, amusé par cette touche d'humour noir, puis, la main dans mes cheveux, je contemple les affaires éparpillées sur la couette blanche. Je peste intérieurement en me hâtant de boucler mes bagages Je dois passer chez Raphaël pour lui déposer un double de mes clefs et je n'ai pas l'intention d'être en retard.

***

— C'est Léna qui t'emmène ?!

La mine hébétée, Raphaël hurle en chuchotant dans l'espoir de ne pas réveiller la petite Elizabeth, profondément endormie dans ses bras. Je scrute un instant mon meilleur ami, qui n'a visiblement pas approché une douche et une machine à laver depuis des jours, d'un air circonspect. J'ai du mal à déterminer si sa tronche de zombie provient de sa stupeur ou des cernes qui mangent son visage.

— Pourquoi, tu te portes volontaire ? répliqué-je d'un ton légèrement sarcastique, mes yeux rivés sur le nouveau-né.

— Très drôle, Simon. Hi-la-rant.

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