Il était très tôt quand elle quitta son logement le lendemain et les rues étaient quasiment vide. Néanmoins, les trois personnes qu'elle croisa étaient des espions de Richelieu, elle en était certaine !
Un mélange de peur, de haine et de colère l'avaient empêché de dormir, et elle avait passé la nuit à imaginer des tonnes de choses toutes plus atroces les unes que les autres.
Les geôles du Châtelet.
Aramis entre les mains de l'ennemi.
Richelieu la jetant au bûcher.
Tréville mourant dans d'atroces souffrances !
De tout ce qu'elle avait imaginé, c'était la seule chose dont elle était certaine ; elle allait débarrasser Richelieu de l'épine Tréville qu'il avait dans le pied.
Il avait envoyé Aramis en Espagne !
— Putain de bordel de merde, grommela-t-elle pour la énième fois en passant le porche de la garnison.
Elle faillit s'arrêter auprès des deux gardes, qui la fixaient avec incrédulité, pour leur demander si Tréville était là, mais se ravisa. D'une, il n'y avait aucune raison qu'il rentre plus tôt que prévu, et surtout pas de nuit ; de deux, il y avait un espion dans cette garnison et elle devait être prudente. Pas un mousquetaire, ça, elle en aurait mis sa tête à couper, mais d'autres personnes gravitaient autour d'eux. Des lavandières, des fournisseurs, des messagers. Si la garnison était gardée jour et nuit, il n'y en avait pas moins du passage, et pas mal de personnes qui n'appartenaient pas à la compagnie.
Les seuls qu'elle pouvait prévenir, c'étaient les inséparables ! Eux pourraient la protéger, et surtout, commencer à s'intéresser à la fouine qui hantait la garnison.
Mais pas avant le retour de Tréville. Si cette fouine s'apercevait qu'on la cherchait, Porthos n'était pas des plus discrets quand il posait des questions, alors, Richelieu saurait aussitôt qu'elle avait vendu la mèche. Seul Tréville pourrait la tirer des pattes du cardinal.
Tréville. Encore et toujours Tréville. Sa guéguerre avec Richelieu les mettaient en péril elle et son enfant.
Elle claqua la porte de l'infirmerie en jurant une nouvelle fois, se débarrassa de sa cape et de ses gants, ouvrit les volets et jeta une buche dans la cheminée que Philippe était déjà passé pour allumée.
Épuisée, tant par les émotions que par une nuit blanche, elle se laissa tomber sur le fauteuil et attendit que les patients se présentent. La journée promettait d'être longue.
Et elle le fut. Une partie de la garnison avec Tréville, une autre au Louvres, le peu d'hommes qui restait n'avait pas besoin d'elle.
Seul Philippe lui tint compagnie, et pour se changer les idées, elle entreprit de lui apprendre à couturer une plaie sur un morceau de porc recouvert de sa peau, que Serge avait bien voulu lui céder.
Mais le soir venu, quand elle renvoya Philippe, ses idées sombres revinrent à la charge. Elle envisagea un instant de rester à la garnison, mais elle pensa à sa malle. Elle devait s'assurer que les gardes rouges ne rentrent pas chez elle pour la fouiller. Ils s'apercevraient sans peine qu'elle avait un double-fond, et si elle était certaine qu'ils ne pourraient pas l'ouvrir, ils pourraient s'en emparer. Ce que cette malle contenait était bien trop précieux.
C'est Porthos qui la raccompagna ce soir-là. Il resta tard, partageant avec elle le repas que Serge lui avait donné.
Épuisée par une première nuit blanche, elle dormit, mais d'un sommeil peuplé de cauchemars et la journée qui suivit fut à l'aulne de celle de la veille. Philippe savait couturer une plaie, elle lui enseigna comment réduire une fracture, puis comment remettre une articulation en place.
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Quatre Siècles et une Croix - II - Revenir Vers Toi
FanfictionQuelque chose ne tourne pas rond dans le monde de Skye. En dehors du fait qu'elle ne se sent plus chez elle au 21ᵉ siècle, en dehors du fait qu'Aramis lui manque, il y a autre chose de plus pernicieux. Quand elle comprend enfin ce qui se passe, sa d...